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vendredi 7 février 2025

Terrorisme: les ministres de l'Intérieur dressent les axes de la future stratégie et placent en son coeur le Système d'information Schengen

 


 
Une nouvelle stratégie antiterroriste de l’UE pour les cinq prochaines années est en gestation et le Conseil de l’UE en trace les grandes lignes. Différents aspects sont évoqués par ces conclusions, par exemple utiliser à des fins répressives les données des voyageurs utilisant les transports maritimes et terrestres, s'attaquer aux liens entre criminalité organisée et terrorisme, se pencher sur les fournisseurs de services en ligne non coopératifs, y compris les grandes plateformes, ou encore dépister l'infiltration de terroristes aux premiers stades de leur entrée dans l'Union. Des solutions concrètes sont déjà esquissées comme aligner les activités du pôle de connaissances de l'UE sur les besoins politiques en matière de radicalisation, optimiser le cadre juridique afin de permettre une procédure accélérée d'expulsion ou encore harmoniser davantage l'utilisation des "indicateurs de sécurité" du Système d'information Schengen (SIS). A ce sujet, ce système se trouve au centre des conclusions et particulièrement des mesures opérationnelles qu'elles contiennent.


Quelle est la situation actuelle ?

Des événements déstabilisateurs survenus sur le plan tant interne qu'externe, tels que la guerre d'agression menée par la Russie contre l'Ukraine et le conflit en cours au Moyen-Orient, ont accru le niveau de la menace terroriste dans certains États membres et contribué à l'intensification de la radicalisation et des clivages sociaux, ce qui pourrait conduire au terrorisme et à l'extrémisme violent dans l'ensemble de l'Union.

La menace terroriste est plus complexe que jamais et s'explique par divers facteurs. Parmi ceux-ci figurent notamment le risque posé par des acteurs isolés, la projection accrue sur le plan extérieur de la menace que représente l'État islamique, y compris sa branche de la province de Khorasan (ISKP), le détournement des nouvelles technologies par des groupes et acteurs terroristes, l'essor de mouvements extrémistes violents antisystème qui ne sont pas imputés à des idéologies précises et le brouillage des idéologies, qui aboutit à un assemblage de croyances tendant à privilégier la violence.
Le terrorisme djihadiste reste la menace la plus importante pour l'Union européenne, tandis que la menace que représente l'extrémisme violent de droite reste élevée dans certains États membres.

Des inquiétudes sur le retour des combattants étrangers et sur la radicalisation en ligne
Des inquiétudes subsistent quant au fait que des combattants terroristes étrangers présumés, issus de pays tiers, ainsi que des personnes liées à des groupes terroristes, puissent mettre à profit les flux migratoires pour infiltrer l'Union européenne.
Dans le même temps, le retour de ressortissants de pays tiers qui représentent une menace pour la sécurité et se trouvent en séjour irrégulier dans l'UE reste un défi de taille.

La radicalisation reste un sujet de préoccupation majeur, dans le cadre duquel l'espace en ligne joue un rôle important, en particulier chez les mineurs. Cet espace permet la diffusion rapide de contenus à caractère terroriste et il accentue les clivages sociaux, qui peuvent être attisés par la manipulation de l'information et l'ingérence étrangères, notamment les activités de  désinformation menées par des acteurs étatiques et non étatiques.

Quant aux technologies numériques, telles que les crypto-actifs et les plateformes en ligne, elles sont de plus en plus exploitées à cette fin, tandis que les méthodes de financement classiques, telles que les  paiements en espèces et le hawala, restent largement utilisées et difficiles à suivre. En outre, les organisations terroristes exploitent de plus en plus les conflits extérieurs pour lever des fonds également dans l'UE, masquant leurs intentions violentes derrière des activités caritatives.


Où va-t-on ?

Afin de faire face efficacement à l'évolution du paysage des menaces, et à la lumière du nouveau cycle institutionnel et de la révision du cadre stratégique de l'UE en matière de sécurité intérieure, le Conseil invite la Commission  à élaborer une stratégie globale pour prévenir et combattre le terrorisme et l'extrémisme violent. Ce travail doit être réalisé dans le cadre de la nouvelle stratégie de sécurité intérieure et du programme de l'UE concernant la prévention du terrorisme et de l'extrémisme violent et la lutte contre ces phénomènes;


Axe 1 : favoriser la coopération entre services d’immigration et de lutte antiterroriste

Le Conseil estime que les progrès accomplis dans la promotion de la coopération entre les autorités chargées de l'immigration et de l'asile et les autorités chargées de la lutte contre le terrorisme, notamment par la mise en place d'un réseau de points de contact et à sa participation volontaire, faciliteront la coopération et l'échange d'informations. La mise en œuvre du système d'entrée/sortie (EES) et du système  européen d'information et d'autorisation concernant les voyages (ETIAS) ainsi que l'interopérabilité des bases de données européennes sont importantes dans ce contexte.


Axe 2 : dépister les possibles retour des combattants étrangers

Le Conseuil estime qu’il est nécessaire de coordonner les efforts visant à détecter et prévenir, aux premiers stades de leur entrée dans l'Union, l'infiltration de personnes issues de pays tiers ayant des liens avec des organisations t erroristes.

Le recours à des interdictions d'entrée à l'égard des ressortissants de pays tiers qui représentent une menace terroriste et la saisie de données les concernant dans le SIS constituent un outil essentiel pour empêcher l'entrée de combattants terroristes étrangers en Europe. Toutefois, les cadres juridiques et institutionnels nationaux en matière d'émission d'interdiction d'entrée varient d'un État membre à l'autre. Cela peut donc poser un problème en ce qui concerne l'émission et l'enregistrement dans le SIS d'interdictions d'entrée imposées à des personnes lorsqu'il n'existe pas de lien direct ou de relation entre ces personnes et l'État membre d'émission.

Lorsqu'il n'est pas possible d'introduire des signalements aux fins de non-admission et d'interdiction de séjour dans le SIS, la possibilité d'introduire des signalements aux fins de contrôles discrets, de contrôles d'investigation ou de contrôles spécifiques.
Le Conseil invite la Commission à la suite de la prochaine évaluation du SIS à réfléchir  à une procédure post-concordance pour les combattants terroristes étrangers enregistrés dans le SIS, sur la base de la réception volontaire de notifications de concordance, afin d'améliorer l'échange d'informations.


Axe 3 : favoriser l’expulsion des individus dangereux

Les États membres sont invités

  • à harmoniser davantage l'utilisation de ces "indicateurs de sécurité" défini dans un règlement SIS, tout au long de la procédure de retour en partageant les bonnes pratiques;
  • à continuer à imposer des interdictions d'entrée nationales aux ressortissants de pays tiers qui représentent une menace terroriste, conformément à leur droit national, et à étendre ces mesures à l'espace Schengen conformément à un autre règlement SIS.


Le Conseil recommande aussi de continuer à étudier des solutions pour faire face à la menace pour la sécurité que représentent les personnes qui ne peuvent être renvoyées dans leur pays d'origine en raison du principe de non-refoulement.

Le Conseil invite les Etats membres et la Commission:

  • à poursuivre la réflexion pour faciliter l'émission d'interdictions d'entrée à l'égard de ressortissants de pays tiers qui représentant une menace terroriste, même s’il n’y a pas de lien direct entre ces personnes et l'État membre d'émission.
  • à s'employer à mettre en œuvre sur le plan opérationnel le retour effectif des personnes qui représentent une menace pour la sécurité en examinant la possibilité d'optimiser le cadre juridique afin de permettre une procédure de retour accéléréeoeuvrant conjointement au renforcement des relations avec les pays tiers et les pays d'origine définis comme prioritaires afin de faciliter l'expulsion de ces personnes.



Axe 4 : Promouvoir la recherche


Le Conseil estime que les investissements dans la recherche et l'innovation en matière de sécurité qui soutiennent les efforts de lutte contre le terrorisme, y compris la promotion de solutions innovantes dans le domaine de la gestion des frontières, des outils d'IA, de l'analyse des mégadonnées, des technologies de déchiffrement, des analyses de données biométriques et des outils de criminalistique numérique, sont essentiels pour permettre aux services répressifs et aux autorités chargées de la lutte contre le terrorisme de suivre l'évolution rapide des technologies.


Axe 5 : Miser davantage sur le renseignement


Le Conseil considère que les évaluations et les notes d'information du Centre de situation et du renseignement de l'UE (INTCEN), fondées sur le renseignement stratégique des États membres ainsi que sur les analyses d'Europol, devraient être prises en compte lors de l'élaboration de politiques. Afin de favoriser une appréciation de la situation fondée sur le renseignement, il demeure important de renforcer la capacité d'analyse du renseignement dont dispose l'UE en renforçant ses ressources et ses capacités, conformément aux objectifs de la boussole stratégique.


Axe 6 : Avoir une compréhension commune de la dangerosité

Le Conseil promeut le travail accompli pour avoir une compréhension commune entre les autorités répressives des États membres de l'UE. Ce travaile st fondé sur la base de critères non contraignants, à partir desquels les personnes sont évaluées par chaque État membre comme représentant une menace terroriste ou extrémiste violente, en vue de faire figurer ces informations dans les  bases de données européennes.


Axe 7 : étendre le système PNR (Passenger Name Record)  au transport terrestre et maritime

En vue d'examiner les possibilités d'utiliser à des fins répressives les données des voyageurs utilisant les transports maritimes et terrestres, le Conseil attend avec intérêt la présentation, par la Commission, de son étude de faisabilité sur l'harmonisation des obligations de déclaration.
compte tenu des conclusions de l'étude de faisabilité à venir et de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, il invite la Commission et les Etats membres à poursuivre la réflexion sur la manière dont la collecte de données auprès des voyageurs utilisant les transports terrestres et maritimes pourrait être utilisée au mieux et intégrée dans les pratiques d'échange d'informations.


Axe 8 : empêcher les liens entre criminalité organisée et terrorisme

Le Conseil estime qu’il importe de tirer parti des résultats de la priorité de l'EMPACT sur les réseaux criminels à haut risque (HCRN), de l'exercice de cartographie des HRCN mené par Europol sur les réseaux criminels les plus menaçants, ainsi que des renseignements stratégiques fournis par l'INTCEN. Le but est de mieux comprendre l'articulation qui peut exister entre des groupes criminels organisés et des organisations terroristes et de briser leurs liens criminels éventuels.


Axe 9 : Aligner les activités pôle de connaissances de l'UE sur les besoins politiques en matière de radicalisation

Le Conseil estime qu’il importe que les États membres participent activement à l'élaboration des activités du pôle de connaissances de l'UE sur la prévention de la radicalisation mis en place récemment. Cela contribuera à faire en sorte:

  • que son programme de travail soit aligné sur les besoins des États   membres, des décideurs politiques et des praticiens,
  • que ses résultats soient largement  accessibles et aient une incidence tant parmi les décideurs politiques que parmi les praticiens.


Axe 10 : Se pencher sur les fournisseurs de services en ligne non coopératifs, y compris les grandes plateformes

Le Conseil  invite la Commission à continuer à promouvoir l'échange de bonnes pratiques en ce qui concerne l'application du règlement relatif à la lutte contre la diffusion des contenus à caractère terroriste en ligne,

  • à examiner et combler les lacunes potentielles du cadre réglementaire,
  • à réfléchir à la meilleure manière d'aligner la mise en œuvre de ce règlement et du règlement sur les services numériques lors de l'évaluation du règlement relatif à la lutte contre la diffusion des contenus  à caractère terroriste en ligne.
  • à prendre des mesures pour relever les défis posés par les plateformes en ligne non conformes  dans le cas des très grandes plateformes en ligne.


 synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr


 

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vendredi 31 janvier 2025

IA et justice, vers des "lignes directrices et des normes pratiques et conviviales" et une "boîte à outils"


L'IA bouscule nos habitudes et les innovations se succèdent. Deepseek en est encore une illustration.  La justice n'est pas épargnée par l’IA. Cette technologie est un instrument crucial pour elle et le Conseil de l’UE a approuvé des conclusions en ce sens. L’idée que l’UE a une carte à jouer, notamment en favorisant le partage de connaissance, l’échange et la formation. Toutefois, l’utilisation de l’IA doit se faire dans un cadre strict, respectueux des libertés et des normes, en premier lieu « l’IA Act ».


L’IA, un potentiel énorme potentiel de transformation

L'Union européenne et ses États membres connaissent un développement continu des solutions juridiques, opérationnelles et techniques favorisant la coopération judiciaire et l'accès à la justice dans les affaires transfrontières en matière civile, commerciale et pénale.
L'IA recèle un énorme potentiel de transformation. Son utilisation peut faciliter l'accès à la justice, améliorer l'efficience et l'efficacité des procédures judiciaires et contribuer à ce qu'elles se déroulent en temps voulu.
Plus concrètement, elle peut aider, entre autres, à accomplir certaines tâches courantes ou auxiliaires, par exemple en guidant les personnes parmi les informations juridiques, en programmant les audiences, en réservant des salles de tribunal ou en empêchant la réidentification des personnes concernées, soit par anonymisation, soit par pseudonymisation des décisions de justice, dans le respect des règles en matière de protection des données.


D’où vient-on ?

Dans ses conclusions du 9 juin 2020 intitulées "Façonner l'avenir numérique de l'Europe", le Conseil a attiré l'attention sur les défis posés par la numérisation accrue de l'économie et de la société européennes, y compris par l'IA.
Dans ses conclusions du 13 octobre 2020 sur la numérisation, intitulées "Accès à la justice - saisir les opportunités offertes par la numérisation", le Conseil a souligné l'importance de la transition numérique pour accroître l'efficacité et l'efficience des systèmes judiciaires.
Les conclusions du Conseil du 20 octobre 2023 sur l'autonomisation numérique pour protéger et faire respecter les droits fondamentaux à l'ère numérique sont axées sur l'autonomisation numérique des personnes et des secteurs essentiels à la défense des droits fondamentaux, tels que la justice, ainsi que sur la construction d'un environnement numérique sûr dans lequel les droits fondamentaux sont correctement protégés.


Où en est-on ?

Un certain nombre d'organisations internationales ont également adopté des documents importants dans le domaine de l’IA:

  • la charte éthique européenne d'utilisation de l'intelligence artificielle dans les systèmes judiciaires et leur environnement, de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ) du Conseil de l'Europe;
  • la recommandation du Conseil de l'Organisation de coopération et de développement économiques sur l'intelligence artificielle
  • la résolution du Conseil des droits de l'homme des Nations unies (10 juillet 2024) sur la promotion et la protection de tous les droits de l'homme;
  • la convention-cadre du Conseil de l'Europe sur l'intelligence artificielle ;
  • le rapport final de l'organe consultatif de haut niveau des Nations unies sur l'intelligence artificielle intitulé "Gouverner l'IA au service de l'humanité".



Et pourquoi l’UE ?

La coopération transfrontière entre les États membres pour partager les enseignements tirés, les meilleures pratiques, l'expertise et les informations sur les réalisations en matière d'intégration de l'IA dans leurs systèmes judiciaires respectifs est particulièrement importante pour garantir l'égalité d'accès à la justice dans l'ensemble de l'UE.

La stratégie européenne en matière de justice en ligne (2024-2028) expose les objectifs stratégiques et opérationnels, définit les actions nécessaires pour atteindre ces objectifs et jette les bases d'un mécanisme de suivi permettant de suivre l'avancement des projets et initiatives présentés par les États membres ou d'autres parties prenantes.
Il s'agit notamment de tirer parti des technologies innovantes pour soutenir la réalisation des objectifs définis.
En outre, la stratégie constate que la transformation numérique s'accompagne de la nécessité de définir des actions spécifiques et appropriées qui soient adaptables aux défis et aux possibilités que créent l'IA et d'autres technologies émergentes.


Nourrir les algorithmes pour mieux entraîner l’IA


Selon le Conseil, il est essentiel de veiller à la disponibilité d'une grande quantité de données de qualité pour créer un environnement propice au développement de systèmes d'IA à valeur ajoutée.
La disponibilité de décisions judiciaires anonymisées ou pseudonymisées est un catalyseur important pour les applications de l'IA dans le domaine de la justice, qui nécessitent un accès à grande échelle à ces décisions pour en effectuer l'analyse, notamment au cours de la phase d'apprentissage des systèmes d'IA.


Mais quel est l’enjeu ?

Le règlement sur l’IA du 13 juin 2024 classe les systèmes d'IA pour certaines applications dans les domaines de l'application de la loi, de la justice et du règlement extrajudiciaire des litiges comme étant à haut risque et les soumet à un ensemble d'exigences telles que des procédures d'évaluation de la conformité et des contrôles, en vue de garantir un niveau élevé de fiabilité.

Or si des cas d'utilisation présentent des risques plus élevés, les systèmes judiciaires devraient néanmoins tirer parti de ces cas d'utilisation, moyennant des garanties appropriées, étant donné que l'IA peut contribuer grandement au travail judiciaire, par exemple en résumant des contenus judiciaires, en analysant la jurisprudence, en proposant des textes, en fournissant une interprétation en temps réel, en traitant les litiges de masse ou en soutenant la prise de décision.


Une IA respectueuse du droit et des libertés fondamentales

Le Conseil rappelle que l'Agence des droits fondamentaux a publié des études et des rapports sur des sujets connexes pertinents, tels que le rapport intitulé "Bien préparer l'avenir: l'intelligence artificielle et les droits fondamentaux", ainsi que le rapport intitulé "Bias in algorithms - Artificial intelligence and discrimination" (Les biais dans les algorithmes — Intelligence artificielle et discrimination).

Selon le Conseil de l’UE, l'IA devrait être utilisée en justice dans le plein respect de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et conformément, entre autres, au règlement sur l'IA, au règlement général sur la protection des données et à la directive en matière de protection des données dans le domaine répressif, afin de garantir la transparence, la responsabilité et la surveillance, en veillant à ce que les systèmes d'IA soient dignes de confiance et sûrs et à ce que leur utilisation respecte les droits fondamentaux.
L'accès à la justice devrait être garanti à tous, même dans les situations où les personnes concernées n'utilisent pas d'outils ou de services informatiques ou se trouvent en situation de vulnérabilité.


La création de lignes directrices et des normes pratiques et conviviales

Le Conseil estime que l'IA peut faciliter la prise de décision dans les procédures judiciaires et les modes alternatifs de règlement des conflits, mais ne devrait pas la remplacer, car la décision finale doit rester une activité humaine.
L'utilisation de l'IA dans ce contexte est généralement considérée comme étant à haut risque et devrait être transparente, traçable et explicable de manière appropriée, et faire l'objet d'un contrôle humain.
Il est essentiel de veiller à ce que ces principes soient pris en compte et évalués à la fois au stade de la conception et tout au long du cycle de vie des systèmes d'IA utilisés dans le secteur de la justice.

Des lignes directrices et des normes pratiques et conviviales sont nécessaires au développement et à l'utilisation éthiques et responsables de l'IA en justice, conformément au règlement sur l'IA.
Ces lignes directrices et normes devraient être fondées sur des échanges coordonnés et une coopération entre la Commission, les États membres et les parties prenantes concernées.

La mobilisation du Réseau européen de formation judiciaire

Le Conseil invite le Réseau européen de formation judiciaire et les autorités ou organismes nationaux chargés de la formation judiciaire à tenir compte de la nécessité de former les professionnels de la justice et de leur donner les moyens de faire face à la numérisation des systèmes judiciaires. Il s’agit en particulier de :

  • l'utilisation de l'IA en justice,
  • l’adaptation à l'évolution de l'environnement juridique,
  • la réduction des déficits de compétences numériques
  • le renforcement de la sensibilisation aux possibilités et aux risques que présentent les systèmes d'IA utilisés dans le domaine de la justice.

Les outils existants en matière de formation axée sur la numérisation de la justice, y compris les IA destinées aux professionnels de la justice, devraient continuer à être développés et mis à jour.


La création d’une « boîte à outils en matière d'IA dans le domaine de la justice »


La Commission est invitée à créer un instrument commun - la "boîte à outils en matière d'IA dans le domaine de la justice"-, en tenant compte des synergies possibles avec la "plateforme d'IA à la demande" déjà établie.
Cette boîte à outils en matière d'IA dans le domaine de la justice serait un répertoire de cas d'utilisation (notamment en ce qui concerne les acteurs, le champ d'application, la cible, l'objectif, les fonctionnalités, les scénarios, les avantages escomptés) et d'outils relatifs à l'IA dans le secteur de la justice.

Les outils d'IA à inclure dans la boîte à outils, qu'ils soient développés avec ou sans financement de l'UE, pourraient être mis à la disposition de tous les États membres.
La boîte à outils en matière d'IA dans le domaine de la justice pourrait favoriser la création d'un terrain d'entente et de cas d'utilisation entre les États membres en ce qui concerne l'utilisation transfrontière des outils d'IA en justice.

Quant aux États membres, ils sont invités à échanger des informations et à trouver un terrain d'entente concernant les cas d'utilisation, l'utilisation des outils d'IA et leur développement transfrontière, afin d'améliorer les systèmes judiciaires et de préparer les futures solutions d'interopérabilité, en tenant compte du cadre d'interopérabilité européen, qui est une approche convenue d'un commun accord pour la fourniture de services publics européens de manière interopérable.


Favoriser davantage l’échange et la collaboration

Conformément à la stratégie européenne en matière de justice en ligne (2024-2028), les États membres sont invités à collaborer et à partager des informations sur l'utilisation de l'IA en justice ainsi que sur les outils d'IA, y compris les caractéristiques essentielles liées à ces outils, telles que la configuration ou la description de leur fonctionnement et l'utilisation de logiciels libres.
Les initiatives de recherche et d'innovation visant à faire progresser le développement de systèmes d'IA sur mesure, dans le respect du droit de l'Union pour les applications juridiques spéciales, sont importantes.
La collaboration entre les universités, les entreprises, les autorités judiciaires ou autres autorités publiques et les professionnels de la justice est essentielle pour stimuler l'innovation et favoriser les progrès dans ce domaine.

Il convient d'encourager le soutien et la mobilisation des praticiens du droit, des professionnels des technologies de l'information et des autorités ou organismes afin de mieux relever les défis de la transformation numérique et d'y faire face en temps utile.
Outre l'obligation de prendre des mesures pour garantir, dans toute la mesure du possible, un niveau suffisant de maîtrise de l'IA pour tous les professionnels de la justice qui utilisent l'IA, la formation des professionnels de la justice et du personnel administratif des autorités judiciaires devrait être axée sur la sensibilisation.

 

 synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr


 

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vendredi 24 janvier 2025

Sécurité et souveraineté : le Sénat préconise la création d'une clause « bouclier » pour contrer l’immixtion d’une Cour européenne jugée trop militante

 


« Bruxelles règlemente trop ». Cette petite musique tend désormais à faire un bruit de fanfare assourdissant avec l’élection du nouveau président américain, celui étant noirement connu pour son aversion face au soft power de l’UE à cause du succès de son pouvoir normatif.
Moins légiférer donc. C’est en substance la préconisation d’un rapport du Sénat qui recommande l’application effective du principe de subsidiarité, l’emploi systématique d’analyses d’impact au préalable, la préférence aux directives par rapport aux règlements ou encore la limitation du nombre et du pouvoir des agences européennes. En matière de sécurité, le Sénat s’inquiète de l’érosion de «l’exception de la sécurité nationale » comme moyen pour les Etats de préserver leurs compétences en la matière. Il plaide en faveur d’une clause « bouclier » destinée à à protéger la France de la jurisprudence trop intégratrice de la Cour et surtout trop orientée « liberté » au détriment de la « sécurité ».


Une inflation normative inquiétante


L'Union européenne a un rôle essentiel à jouer pour apporter des réponses aux défis actuels comme la sécurité et la défense, les migrations, la transition écologique et numérique ou encore pour défendre et promouvoir le modèle social européen.
Confrontée à une succession de crises, depuis la crise migratoire à la guerre en Ukraine en passant par la pandémie de Covid 19, mais aussi en réponse au défi de la double transition, écologique et numérique, l'Union européenne a été amenée à adopter de nombreux actes ces dernières années : environ 13 000 textes entre 2019 et 2024, contre 5 500 aux États-Unis.
Plusieurs rapports récents, notamment celui de Enrico Letta sur l'achèvement du marché intérieur et celui de Mario Draghi sur l'avenir de la compétitivité européenne, ont tiré l'alarme sur les effets négatifs de l'excès de réglementation au niveau de l'Union européenne.


« Mieux légiférer » toujours au stade des bonnes résolutions

La préoccupation de « mieux légiférer » au niveau européen n'est pas nouvelle. Ces vingt dernières années, la Commission européenne a pris de nombreuses initiatives dans ce domaine : obligation de présenter une étude d'impact pour toute nouvelle proposition législative, création d'un comité d'examen de la réglementation, règle « une norme nouvelle, une retirée » (« one in, one out »).
Malgré ces mesures, de nombreuses propositions législatives présentées par la Commission européenne n'ont pas été accompagnées d'étude d'impact. Un accord interinstitutionnel « mieux légiférer » a été signé en 2016 entre les trois institutions européennes, qui prévoit notamment une étude d'impact pour tout amendement substantiel du Conseil ou du Parlement européen, mais en pratique il n'est pas respecté.


L’absence d’analyse d’impact : la directive sur la cybersécurité

La proposition de règlement établissant des mesures destinées à renforcer la solidarité et les capacités dans l'Union afin de détecter les menaces et incidents de cybersécurité, de s'y préparer et d'y réagir, déjà citée, ne comportait pas non plus d'étude d'impact. L'absence d'étude d'impact était là aussi justifiée par l'urgence : « En raison du caractère urgent de la proposition, aucune analyse d'impact n'a été réalisée » écrit la Commission européenne.
La Cour des comptes de l'Union européenne indique dans son avis : « dans ces conditions, nous estimons que la proposition de règlement est de nature à rendre plus complexe l'ensemble du paysage de l'UE en matière de cybersécurité. Il existe un risque de double emploi entre les SOC (centre de sécurité opérationnel) et le réseau des CSIRT (centres de réponse aux incidents de sécurité informatique) déjà en place ».


Le principe de subsidiarité, un frein moteur qui dysfonctionne

Le principe de subsidiarité, qui définit dans quelles conditions donner à l'action de l'Union priorité sur celle des États membres dans le champ des compétences partagées entre eux, s'impose à toutes les institutions européennes. Avec son corollaire, le principe de proportionnalité, le Sénat estime que c'est un gage d'efficacité et de démocratie : il assure que l'action européenne apporte une plus-value par rapport à celle des États membres et n'excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis.
Le traité de Lisbonne a confié un « rôle de gardien » du respect de ces principes aux Parlements nationaux, avec un mécanisme de « carton jaune » voire « orange » ou « rouge » pour alerter les institutions européennes en cas d'entorse à ces principes. Toutefois, ce mécanisme s'est révélé décevant en pratique : depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, il y a quinze ans, seulement trois textes ont donné lieu à un « carton jaune ».


Une (dé)multiplication des agences européennes


La multiplication des agences européennes, dont certaines sont pourvues d'un pouvoir réglementaire, soulève aussi des questions en termes de légitimité et de gouvernance.
Depuis le milieu des années 1990, de nombreuses agences européennes ont vu le jour, venant compléter la liste de celles initialement créées vingt ans plus tôt.
Ot, sous le premier mandat de Ursula von der Leyen à la présidence de la Commission européenne, le recours aux agences s'est ainsi fortement développé. Il est possible de mentionner notamment la création de :

  • l'agence européenne de l'asile (AUEA) en 2022,
  • le centre européen de compétence en matière de cybersécurité (CECC) en 2023,
  • l'autorité européenne de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (ALBC).

Si on ajoute les divers organismes qui n'ont pas le statut d'agence mais qui dépendent de l'UE, comme par exemple le Parquet européen, on compte au total une cinquantaine d'agences et d'organes divers au niveau européen, employant environ 12 000 agents.


Le risque de l’emprise des lobbies

Le Sénat point les risques que les agences européennes obéissent à une logique bureaucratique susceptible de négliger certains enjeux pourtant essentiels au regard de l'intérêt général européen.
Cet intérêt général européen court déjà le risque d'être occulté à Bruxelles par des intérêts privés particulièrement puissants, au vu du poids très fort qu'y ont acquis certains lobbys, avec une illustration lors de l'élaboration des législations européennes destinées à réguler les marchés et services numériques.


Le règlement ou un attrait pour la verticalité du pouvoir


Ces dernières années, le Sénat constate un recours croissant par la Commission européenne aux règlements plutôt qu'aux directives. Les  règlements sont d'application directe et ne nécessitent pas de mesure de transposition. Les directives sont donc par essence plus respectueuses de la diversité nationale puisqu'elles permettent de mieux prendre en compte les réalités du terrain et d'articuler objectifs européens et traditions juridiques nationales.
Ainsi, en matière de cybersécurité, la Commission européenne a fait le choix, en avril 2023, de proposer un règlement établissant des mesures destinées à renforcer la solidarité et les capacités dans l'Union, règlement modifiant une directive (la directive SRI 2), alors même que celle-ci n'avait pas encore été transposée dans tous les États membres, dont la France.
Selon le Sénat, cela soulève deux difficultés, à savoir l'instabilité de la règle européenne et son uniformité quel que soit le contexte local : ainsi, la directive SRI 2, adoptée en décembre 2022, doit être transposée dans le droit interne des États membres d'ici octobre 2024. Ce texte est donc très récent et n'est pas encore pleinement opérationnel, ce qui empêche actuellement de tirer des conclusions quant à son efficacité ou ses lacunes présumées.


Le Cloud européen, ou du « trop » au « pas assez » de règlementation

Selon le Sénat, si l'on critique souvent la surréglementation européenne, c'est parfois aussi l'absence d'intervention législative de l'Union européenne qui est pénalisante pour la compétitivité des entreprises, et plus généralement pour l'Union européenne.
Il est possible de mentionner l'exemple de l'absence de véritable stratégie de l'Union européenne en matière de services en nuage (cloud).
À ce jour, le projet de certification européenne des services en nuage n'a toujours pas abouti. Les autorités françaises plaident pour y intégrer le critère géographique dans un souci de protection des données, ou du moins pour conserver des critères de souveraineté au niveau national. A ce propos,  le Sénat rappelle que la France plaide en faveur du développement d'un cloud européen souverain et la mise en place d'un schéma de certification de sécurité dans le cloud (EUCS), permettant d'offrir un très haut niveau de sécurité, notamment vis-à-vis des demandes illégales d'accès aux données.



Une Cour de justice contre la souveraineté étatique

Depuis l'origine de la construction européenne, la Cour de justice de l'Union européenne a joué un rôle majeur pour renforcer l'intégration européenne, grâce à une interprétation téléologique des traités, c'est-à-dire une interprétation fondée sur la finalité plutôt que la lettre des traités.
Selon le Sénat, ces dernières années, plusieurs décisions rendues par la Cour de justice de l'Union européenne sont venues contrecarrer la souveraineté des États membres de l'UE dans des champs de compétences où ils n'étaient pas convenus par traités de la partager.
Il est possible de mentionner, à titre d'illustration, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne concernant le temps de travail des militaires.


Une jurisprudence européenne contre la sécurité ?


Il est possible de mentionner, à titre d'illustration, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne sur la conservation des données de connexion.
Dans un arrêt de 2016, la Cour de justice de l'UE avait estimé qu'une législation nationale prévoyant une conservation générale et indifférenciée des données à des fins d'enquête et de répression des infractions pénales était contraire au droit de l'Union.
Cette approche restrictive de la Cour de justice de l'Union européenne serait susceptible de nuire à l'efficacité des services de renseignement en matière de lutte contre le terrorisme mais aussi à l'efficacité des enquêtes des services de police et de justice en matière de lutte contre la criminalité.


L’« exception de sécurité nationale », un glaçon qui fond au soleil européen

Le Sénat rappelle que la dernière phrase de l'article 4, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne (TUE) affirme pourtant que « la sécurité nationale reste de la seule responsabilité de chaque État membre. »
Même si elle a revu depuis sa jurisprudence dans un sens moins restrictif au vu des difficultés opérationnelles provoquées, la Cour a semblé ignorer cette volonté explicite des auteurs des traités d'instituer une « exception de sécurité nationale » à l'application généralisée du droit de l'Union européenne. Sa jurisprudence l'amène en pratique à nier très souvent des clauses d'exception de sécurité nationale ou à en limiter drastiquement la portée.


Des intérêts nationaux essentiels de sécurité qui doivent plier

Ainsi, la Cour de justice de l'Union européenne a estimé dans son arrêt La Quadrature du Net du 6 octobre 20203, « conformément à la jurisprudence constante de la Cour, bien qu'il appartienne aux États membres de définir leurs intérêts essentiels de sécurité et d'arrêter les mesures propres à assurer leurs sécurité intérieure et extérieure, le seul fait qu'une mesure nationale a été prise aux fins de la protection de la sécurité nationale ne saurait entraîner l'inapplicabilité du droit de l'Union et dispenser les États membres du respect nécessaire de ce droit. »


La Cour a réaffirmé sa volonté extensive au sujet du temps de travail des militaires dans son arrêt du 15 juillet 2021 :« Selon une jurisprudence constante de la Cour, bien qu'il appartienne aux seuls États membres de définir leurs intérêts essentiels de sécurité et d'arrêter les mesures propres à assurer leur sécurité intérieure et extérieure, y compris les décisions relatives à l'organisation de leurs forces armées, le seul fait qu'une mesure nationale a été prise aux fins de la protection de la sécurité nationale ne saurait entraîner l'inapplicabilité du droit de l'Union et dispenser les États membres du respect nécessaire de ce droit. Il doit en aller de même des mesures nationales adoptées aux fins de la protection de l'intégrité territoriale d'un État membre. »


Une idée force : la « clause bouclier » en matière d'ordre public et de sécurité nationale

Le Sénat préconise de prévoir d'insérer dans toute législation européenne une « clause bouclier » respectant la compétence des États membres en matière d'ordre public et de sécurité nationale. Il reprend ainsi une préconisation du Conseil d'État en suggérant, lors de la négociation des propositions législatives, cette « clause bouclier » rappelant, dans chaque texte en discussion, que ses dispositions ne portent pas atteinte aux fonctions essentielles de l'État.

Au sujet de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne sur le temps de travail des militaires ou la conservation des données de connexion, le Sénat estime qu’une telle « clause bouclier » serait particulièrement bienvenue s'agissant des textes relevant de la coopération policière et judiciaire.


 synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr


 

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vendredi 17 janvier 2025

Daesh, Al-Quaïda, propagande d’extrême-droite violente : les 27 ministres de l’Intérieur réaffirment l’imbrication de la sécurité extérieure avec la sécurité intérieure

 


Le renforcement des liens entre les aspects intérieur et extérieur de la lutte contre le terrorisme est toujours une priorité. Le Conseil note que la menace terroriste et extrémiste violente est devenue de plus en plus diversifiée et diffuse, et est constamment remodelée par des facteurs extérieurs et intérieurs. Or les précédentes conclusions, celles des 9 et 10 juin 2011, consacrées à ce thème, sont obsolètes.  Il a donc approuvé de nouvelles conclusions dressant les modalités d’action à venir pour mieux lutter contre ce phénomène.




Quel est le cadre de la lutte ?

Le Conseil souligne que les évaluations et les engagements formulés dans les conclusions du Conseil du 20 juin 2022 intitulées "Faire face à une menace terroriste et extrémiste violente en constante évolution dans sa dimension extérieure" restent d'actualité.
Avec les conclusions antérieures du Conseil du 15 juin 2020, du 19 juin 2017 et du 9 février 2015, elles constituent un cadre politique de la lutte contre le terrorisme ainsi que de la prévention de l'extrémisme violent et de la lutte contre ce phénomène.


Le Conseil note que ce cadre vient compléter les aspects internes de la lutte contre le terrorisme, telles qu'elles figurent notamment dans les conclusions du Conseil du 9 juin 2022 intitulées "Protéger les Européens contre le terrorisme" et dans les conclusions du Conseil du 12 décembre 2024 sur les priorités futures pour le renforcement des efforts en matière de lutte contre le terrorisme.


Quel est l’état de la menace ?

La menace terroriste et extrémiste violente est devenue de plus en plus diversifiée et diffuse, et est constamment remodelée par des facteurs extérieurs et intérieurs. L'UE et ses États membres ont sensiblement élargi et renforcé les outils dont ils disposent pour faire face à cette menace en constante mutation.
La crise actuelle au Moyen-Orient provoque des clivages, attisant ainsi la radicalisation et la menace terroriste et extrémiste violente partout dans le monde.
Dans ce contexte, le Conseil note avec une vive préoccupation que des groupes terroristes et extrémistes violents se servent du conflit pour atteindre de nouveaux publics, mobiliser des fonds, radicaliser leurs partisans et inciter à la violence.

La menace émanant de l'extrémisme violent et du terrorisme de droite s'accroît, les liens transnationaux de plus en plus nombreux entre des groupes et des individus extrémistes violents de droite constituant un défi de taille. En outre, le Conseil note avec inquiétude la multiplication des mouvements extrémistes violents antisystème.
Qui plus est, le Conseil se déclare préoccupé par les financements étrangers inopportuns provenant d'acteurs étrangers qui influencent la société civile et des organisations religieuses au sein de l'UE et à l'échelle mondiale.


Quelles sont les grandes priorités ?

Le Conseil souhaite renforcer l'engagement multilatéral de l'UE en matière de lutte contre le terrorisme ainsi que de prévention de l'extrémisme violent et de lutte contre ce phénomène, et l'aligner sur les priorités de l'UE en matière de sécurité intérieure. Les domaines prioritaires sont:

  • lutter contre le financement du terrorisme,
  • assurer la sécurité aux frontières, lutter contre le trafic illicite - en particulier d'armes à feu -,
  • prévenir et combattre les contenus extrémistes violents en ligne,
  • accroître et renforcer la résilience des infrastructures critiques et la protection des espaces publics contre les attaques terroristes.  

En outre, le Conseil entend intensifier la coopération en matière de lutte contre le terrorisme avec les pays tiers qui jouent un rôle essentiel pour la sécurité de l'UE, en associant plus étroitement les agences de l'UE chargées de la justice et des affaires intérieures, entre autres moyens. Une attention particulière devrait être accordée aux pays candidats à l'adhésion à l'UE et à les voisins orientaux et méridionaux de l’Europe. En ce qui concerne la menace croissante que représente l'État islamique de la province de Khorasan (ISKP), le Conseil est conscient de l'importance que revêtent les partenaires de l'UE en Asie centrale en tant qu'acteurs clés des efforts de lutte contre le terrorisme.


Vers davantage de dialogue

Le Conseil invite le coordinateur de l'UE pour la lutte contre le terrorisme à renforcer les relations entre l'Union et les pays tiers en matière de lutte contre le terrorisme.

Le Conseil invite la haute représentante:

  • à continuer d'investir dans des dialogues et des consultations de l'UE en matière de lutte contre le terrorisme qui soient axés sur l'action avec des pays tiers et des organisations multilatérales. Le Conseil juge est essentiel de maintenir et de renforcer la complémentarité avec les dialogues de l'UE sur la justice et les affaires intérieures;
  • à soutenir l'élaboration de bonnes pratiques et de lignes directrices dans le cadre du Forum mondial de lutte contre le terrorisme (GCTF).


Vers davantage de synergies et d’efficacité

Le Conseil invite la haute représentante:

  • promouvoir les synergies entre les activités des missions et opérations PSDC, les délégations concernées de l'UE, les experts de l'UE en matière de lutte contre le terrorisme et de sécurité et les projets financés par l'UE dans le domaine de la lutte contre le terrorisme ainsi que de la prévention de l'extrémisme violent et de la lutte contre ce phénomène;
  • à exploiter pleinement le potentiel du réseau d'experts de l'UE en matière de lutte contre le terrorisme et de sécurité. Le réseau devrait  
  • recenser les tendances qui ont des répercussions sur la sécurité intérieure de l'UE,
  • contribuer à la programmation de l'UE en matière de lutte contre le terrorisme.
  • entretenir des échanges fréquents avec les États membres, tant au niveau local qu'à celui des groupes de travail.


Vers davantage de connaissances et de suivi

Le Conseil invite la Commission:

  • à fournir des notes d'information annuelles sur les projets de renforcement des capacités financés par l'UE dans le domaine de la lutte contre le terrorisme ainsi que de la prévention de l'extrémisme violent et de la lutte contre ce phénomène.
  • à assurer le suivi des négociations sur la révision de la définition juridique paneuropéenne des infractions terroristes dans le cadre de la convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme.


Le Conseil invite le coordinateur de l'UE pour la lutte contre le terrorisme:

  • à faire régulièrement rapport au Conseil sur l'état d'avancement des initiatives de lutte contre le terrorisme ayant des dimensions extérieure et intérieure, et à présenter des recommandations pertinentes au Conseil quant à l'action à mener;
  • à assurer le suivi de la mise en œuvre des conclusions du Conseil sur la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme violent.


 synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr


 

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