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dimanche 2 novembre 2025

Protection civile : l’UE se dote d’une Plateforme de Coordination de Crise



Le mécanisme de protection civile de l'Union (MPCU) est en cours de révision et pour ce faire, une proposition de règlement est présentée. La principale nouveauté du règlement proposé est la mise en place d’une couche de préparation transsectorielle ainsi que l’intégration d’un financement pour la préparation et la réaction aux situations d’urgence sanitaire. L’autre grande nouveauté est la Plateforme de Coordination de Crise destinée à devenir la capacité centrale de l’UE en matière de préparation aux risques transsectoriels et de gestion opérationnelle des crises, notamment en ce qui concerne la constitution de stocks.



De quoi parle-t-on ?

Le règlement proposé introduit un cadre pour la protection civile et le financement de la préparation et de la réaction aux situations d’urgence sanitaire en vue d’exploiter les synergies et de soutenir une meilleure coordination entre les secteurs. 
L’objectif est d’améliorer l’efficacité globale du soutien à la prévention, à la préparation et à la réaction aux dangers naturels et d’origine humaine, y compris les menaces transfrontières graves pour la santé, en tenant compte de la nature de plus en plus complexe et interconnectée des risques et des menaces auxquels l’Union est confrontée, comme le soulignent les conclusions du Conseil européen de 2023 et 2024.


Pourquoi cette proposition ?

Ces dernières années, l’Europe est en butte à une sérieuse aggravation du paysage des risques et des menaces, engendrée par un faisceau de plus en plus imprévisible de défis en matière de sécurité, de santé, de changement climatique et d’environnement.
En outre, la nature multidimensionnelle des crises transsectorielles telles que la pandémie de COVID 19 et la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine exige une approche plus globale et intégrée de la gestion des crises, nécessitant une coopération étroite et efficace entre l’Union et ses États membres afin de relever efficacement les défis qu’elles posent. Le contexte géopolitique actuel nécessite de renforcer la préparation civile et militaire de l’Europe, comme le préconisent la stratégie européenne pour une union de la préparation et le livre blanc conjoint intitulé «Préparation de la défense européenne à l’horizon 2030» .

Dans les grandes lignes, quelles sont les avancées prévues dans dans la proposition de règlement ?
Le mécanisme de protection civile de l'Union (MPCU) a toujours couvert les catastrophes naturelles ou d'origine humaine. Cependant, la proposition de 2025 introduit une intégration transsectorielle bien plus poussée, en particulier concernant la santé :

  • Intégration Sanitaire : la proposition de Règlement introduit un cadre pour la protection civile et le financement de la préparation et de la réaction aux situations d’urgence sanitaire. L'intégration de ces mesures est considérée comme la principale nouveauté. L'objectif est de renforcer les capacités de prévention, de préparation et de réaction aux menaces transfrontières graves pour la santé.
  • Risques complexes : la proposition tient compte de la nature de plus en plus complexe, interconnectée et systémique des risques et des menaces, y compris les crises transsectorielles et prolongées, telles que la pandémie de COVID-19 et la guerre en Ukraine.
  • Approche «Préparation dès la conception» : le Règlement promeut le principe de la «préparation dès la conception» (preparedness by design), qui consiste à intégrer systématiquement les mesures préventives et les considérations de résilience dans l'ensemble de la législation et des politiques de l'Union.



Une nouveauté : la Plateforme de Coordination de Crise

L'institution de la Plateforme de coordination de crise représente une nouveauté majeure dans le cadre proposé, visant à doter l'Union d'une capacité centrale pour la gestion des menaces qui dépassent le champ traditionnel de la protection civile.
La Plateforme est explicitement conçue pour combler les lacunes qualitatives et quantitatives du cadre juridique actuel, en particulier face aux crises transfrontières complexes et prolongées. Elle est destinée à devenir la capacité centrale de l’UE en matière de préparation aux risques transsectoriels et de gestion opérationnelle des crises, notamment en ce qui concerne la constitution de stocks.
La Plateforme aura des fonctions essentielles de préparation et de coordination :

  • Appréciation de la situation et Prospective : Elle doit faciliter l’appréciation de la situation, la préparation et la coordination opérationnelles transsectorielles. Elle anticipe et surveille les risques liés aux crises transsectorielles, notamment en élaborant régulièrement des séances d’information sur les perspectives opérationnelles relatives aux dangers transsectoriels et tous risques.
  • Soutien à l'ERCC : La Plateforme s'appuiera sur la structure et les capacités existantes du Centre de coordination de la réaction d’urgence (ERCC), y compris ses capacités analytiques et scientifiques. Elle complétera la fonction de l'ERCC, qui, lui, continuera d'assurer le point central de coordination opérationnelle 24h/24, 7j/7 pour la poursuite des objectifs du mécanisme de l’Union.
  • Coordination intersectorielle : Elle assure une coordination avec les autorités nationales compétentes, les services de la Commission, et les institutions de l'Union, notamment dans des situations déclenchant une réaction politique intégrée (IPCR) ou l’activation de la clause de solidarité, ou en cas d’urgence de santé publique de portée internationale (déclaration de l'OMS).
  • Liaison Externe et Interne : Elle coopère étroitement avec le centre de réaction aux crises du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) pour la dimension extérieure des crises transsectorielles. Elle assurera également la cohérence avec l'architecture de sécurité intérieure de la Commission (y compris le futur Centre intégré d’opérations de sécurité - ISOC).


Renforcement et développement des capacités rescUE

Pour mémoire, rescEU est la réserve de capacités de réaction au niveau de l’Union. Contrairement à la Réserve européenne de protection civile (ECPP, l'ancien EERC, constitué de capacités volontairement engagées par les États membres), rescEU est destiné à compléter ces capacités et à répondre efficacement et rapidement aux demandes d’assistance.
Le rôle de rescEU est confirmé et renforcé dans la proposition de règlement. Le renforcement de rescEU implique :

  • Le financement du maintien des capacités existantes.
  • L'augmentation et la création de nouvelles capacités.
  • L'acquisition de capacités par divers moyens, tels que l'achat, la location, le crédit-bail, y compris pour les contre-mesures médicales. L'accent est mis sur l'utilisation de solutions développées ou produites dans l'Union pour renforcer l'autonomie stratégique.


Incendies de forêt : vers la mise en place progressive de la flotte aérienne permanente rescEU

La prolongation de la période transitoire pour le financement des moyens aériens nationaux de lutte contre les incendies de forêt jusqu'en 2034 est une mesure essentielle pour faire face à la fréquence et à l'intensité croissantes des feux de forêt.
Cette disposition vise à assurer une transition sans heurts vers la mise en place progressive de la flotte aérienne permanente rescEU de lutte contre les incendies de forêt, dont les nouveaux moyens devraient être disponibles à partir de 2028.
Pendant cette période transitoire (jusqu'en 2034), même si ces moyens sont désignés comme capacités de rescEU, la décision finale de les déployer est prise par l'État membre qui les a mis à disposition.


Des précisions sur l’utilisation et le déploiement de rescUE


Les capacités de rescEU peuvent être déployées lorsque l'Union a un intérêt à réagir à l’urgence ou lorsqu'une crise est susceptible d’avoir une incidence significative sur l’Union ou ses États membres. Cela inclut les cas où la crise menace les citoyens de l'Union, nécessite une intervention urgente et a été notifiée via d'autres mécanismes internationaux.

En outre, les capacités de rescEU dans les domaines des transports et de la logistique peuvent être sollicitées pour fournir un soutien à l’assistance consulaire aux citoyens de l'Union dans des pays tiers, notamment pour des rapatriements, des évacuations ou des départs assistés.
Il est important de noter que les capacités de rescEU ne peuvent être utilisées à des fins nationales (y compris les capacités à double usage) que lorsqu’elles ne sont pas utilisées ou nécessaires à la réaction de l’Union. 
La décision de déploiement des capacités de rescEU est prise par la Commission (par l'intermédiaire de l'ERCC), en coordination étroite avec l’État membre demandeur et l’État membre hôte de la capacité


Comment fonctionne la gestion de risque envisagée dans la proposition de règlement ?

Le processus d’élaboration des politiques prévu par la présente proposition de règlement révisé comprend plusieurs éléments et rapports clés, qui sont alignés sur les cycles de déclaration et séquencés afin de garantir une approche cyclique et efficace de la gestion des risques de catastrophes.

Le processus commence au niveau national, où les États membres sont chargés d’élaborer et de rendre publiques les évaluations des risques au niveau national ou infranational. 
Ces évaluations des risques servent de base à l’élaboration d’une planification de la gestion des risques de catastrophes, y compris les risques pour la sécurité et les menaces hybrides, qui tient compte de la collaboration transfrontière et des risques ayant des effets transfrontières. Ces évaluations et plans devraient être cohérents et coordonnés avec d’autres processus nationaux pertinents. En outre, et en tant que condition préalable aux évaluations éclairées des risques, les États membres devraient améliorer leur collecte de données sur les pertes dues aux catastrophes.

Au moins une fois tous les cinq ans, les États membres présentent à la Commission des résumés de leurs évaluations des risques, de leurs capacités de réaction et de leurs activités à l’appui des objectifs de l’Union en matière de résilience face aux catastrophes. La Commission poursuit l’élaboration des lignes directrices pour la présentation de ces résumés, en veillant à ce que le processus soit normalisé et efficace.
 

Une action de l’Union prenant le relai de celle des Etats membres

Au niveau de l’Union, la transmission des informations demandées et des autres données disponibles permet à la Commission de cartographier les capacités de gestion des risques aux niveaux européen, national et infranational afin de faciliter l’échange de bonnes pratiques et le renforcement des capacités connexes. 

Sur la base de l’évaluation des risques établie, la Commission réexamine régulièrement les scénarios de catastrophes à l’échelle de l’Union en matière de prévention des catastrophes et de préparation et de réaction à celles-ci, qui contribuent ensuite à la poursuite de l’élaboration des objectifs de l’Union en matière de résilience face aux catastrophes, en tant qu’hypothèses de planification convenues concernant les capacités de gestion des risques de catastrophes à mettre en place. 

Grâce à ces indicateurs convenus, la Commission établit des rapports réguliers sur les risques naturels et d’origine humaine auxquels l’Union est confrontée, sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des actions de gestion des risques et des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes, ainsi que sur les capacités de réaction nécessaires au niveau de l’Union pour soutenir les actions nationales visant à faire face à l’évolution du paysage des risques et des menaces. Ces rapports devraient être cohérents et coordonnés avec d’autres processus pertinents au niveau de l’UE.


Une couche « évaluations et la planification »

Ce séquençage garantit que les évaluations et la planification des risques au niveau national sont intégrées dans un processus d’évaluation et de définition d’objectifs au niveau de l’Union, qui alimente à son tour les actions nationales et le renforcement des capacités, avec des mécanismes réguliers de réexamen et de mise à jour afin de garantir que les politiques restent efficaces et pertinentes.
La Commission peut demander des informations complémentaires aux États membres concernant des mesures spécifiques de prévention et de préparation. La Commission peut également proposer le déploiement d’experts ou formuler des recommandations pour renforcer les niveaux de prévention et de préparation.


Qu’en est-il de la « couche prévention et préparation » ?


La forte augmentation du nombre d’activations du mécanisme de l’Union indique que les systèmes nationaux continueront probablement de demander un soutien accru pour réagir aux catastrophes et aux crises. 
Par conséquent, le mécanisme de coordination au niveau de l’Union doit être suffisamment équipé pour agir de manière plus efficiente et plus efficace afin d’offrir ce soutien, notamment en renforçant la prévention et la préparation.

La nouvelle couche de préparation vise à combler les lacunes quantitatives et qualitatives du cadre juridique actuel. 
Elle s’appuie sur les enseignements tirés de la pandémie de COVID 19, de la récente flambée de mpox et des récentes opérations du MPCU, en particulier en ce qui concerne les crises transfrontières complexes et la réponse aux besoins liés à la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. 
Elle reflète la recherche et la prospective sur l’évolution du paysage des risques et des menaces en Europe, en soulignant la nature de plus en plus systémique des risques et l’incidence croissante des effets en cascade dans tous les secteurs. 
Elle envisage en outre des réflexions prospectives avec les États membres sur la nécessité de préserver le fonctionnement des systèmes de protection civile existants en Europe dans des scénarios d’urgence et de crise de plus en plus complexes.

En ce qui concerne les lacunes quantitatives, cette nouvelle couche devrait permettre de faire face aux crises transsectorielles à forte incidence dans le cadre d’une approche plus globale et intégrée coordonnant plus efficacement les dispositifs de préparation et de réaction dans les secteurs touchés. 
En ce qui concerne les lacunes qualitatives, elle permet de faire face aux risques et aux menaces pour lesquels il n’existe encore aucun instrument. 
Cela permettra de réduire la fragmentation des structures de gestion des crises au niveau de l’UE, de simplifier les procédures et d’utiliser plus efficacement les ressources pour faire face, en particulier, aux risques émergents pour la sécurité liés aux menaces hybrides et aux perturbations des infrastructures critiques ayant une incidence intersectorielle. 


Qu’en est-il de la « couche préparation et de réaction » ?

L’intégration des mesures de préparation et de réaction aux situations d’urgence sanitaire dans la présente proposition offre un niveau supplémentaire de protection des citoyens de l’UE, ce qui, à terme, est de nature à renforcer la résilience et à protéger la population contre les menaces graves pour la santé. 
Les urgences sanitaires peuvent avoir des répercussions étendues au-delà du secteur de la santé, affectant la stabilité sociale, l’équilibre environnemental ou les infrastructures critiques. Les actions de préparation et de réaction aux situations d’urgence sanitaire continueront d’être coordonnées au sein des structures actuelles, dont le comité de sécurité sanitaire et le conseil de l’HERA. 

Le volet relatif à la préparation et réaction en cas d’urgence sanitaire de la proposition de règlement améliorera le financement de la surveillance, de la détection et de la compréhension des menaces sanitaires émergentes et imminentes, et établira un lien entre ces informations et les contre-mesures médicales. 
En étroite coordination avec les États membres, il améliorera l’accès aux capacités de production pendant les crises et soutiendra la passation de marchés, la constitution de stocks et le déploiement de contre-mesures médicales dans le cadre des efforts de préparation et de réaction. 
Il soutiendra également le développement des connaissances et la capacité des États membres de l’UE à prévenir les menaces transfrontières graves pour la santé, à s’y préparer et à y réagir.

Dans cette couche, quel est le rôle de l’ERCC et des capacités de l’UE en matière de gestion des crises ?
L’ERCC devrait jouer un rôle clé grâce à une nouvelle capacité élargie d’une plateforme centrale de coordination de crise de l’UE. 
Son principal domaine d’activité vise à mettre l’accent sur une meilleure compréhension des crises en facilitant des dispositifs de préparation et de réaction plus proactifs, une coordination intersectorielle sans prendre la main ni faire double emploi avec l’expertise sectorielle et un meilleur suivi tout en tenant les États membres et les décideurs informés, en ce qui concerne les compétences et les responsabilités.

Compte tenu de la compétence de soutien dans ce domaine d’action et des sensibilités nationales liées au développement des capacités de l’UE en matière de gestion des crises, le recours opérationnel aux dispositifs de réaction au titre de cette couche de préparation supplémentaire devrait être lié à un mécanisme de déclenchement à activer par le Conseil et lié aux procédures existantes telles que l’activation du dispositif IPCR ou la clause de solidarité (au titre de l’article 222 du TFUE).

Des mécanismes de financement plus souples

Sur la base des enseignements tirés, les taux de cofinancement et les règles opérationnelles énoncés dans la décision nº 1313/2013 et dans le cadre du programme «L’UE pour la santé» (EU4Health) seront simplifiés afin de permettre une mise en œuvre plus efficace et plus souple en cas de crise à évolution rapide. 
La proposition de règlement vise donc à clarifier les règles relatives à la mise en œuvre de nombreuses actions de réaction, telles que la mise en place de plateformes logistiques et de plateformes d’évacuation sanitaire, les évacuations sanitaires proprement dites, ainsi que le prépositionnement des capacités de réaction et des équipes d’intervention. 
Elle intégrera également plus clairement les dons du secteur privé dans le cadre du MPCU, mis en place avec succès au cours d’opérations visant à répondre aux besoins en Ukraine.

Le rôle central du réseau européen de connaissances en matière de protection civile


En outre, la proposition de règlement définira mieux le soutien apporté aux États membres au titre du MPCU dans leurs cycles de préparation nationaux. Cela concerne notamment des règles spécifiques encourageant les examens par les pairs et les évaluations volontaires des systèmes nationaux de préparation. 
Le rôle du réseau européen de connaissances en matière de protection civile en tant que pilier du renforcement des capacités sera encore consolidé en tant que plateforme d’échange d’expertise, d’enseignements tirés et de pratiques innovantes en matière de gestion des risques de catastrophes, avec en outre l’ajout de règles relatives à la préparation de la population et à la coopération avec les principales parties prenantes (secteur militaire et privé) dans le cadre de formations et d’exercices.


synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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dimanche 26 octobre 2025

Sécurité & technologies : une stratégie européenne pour d’avantage d’IA en matière de défense et de sécurité intérieure




La stratégie transectorielle dite « Apply AI » a fait beaucoup parler d’elle. Il faut dire qu’elle a un impact direct en matière de sécurité. L’objectif ? Accélérer la mise en oeuvre de l’IA dans le monde des entreprises et des administrations. Le but est que l’UE et ses Etats membres n’aient pas de train de retard. La défense et la sécurité intérieure ne sont pas en reste. Des mesures concrètes sont prévues. Outre le fameux « mur anti-drones » européen largement évoqués dans les médias, il est possible de mentionner par exemple, le développement d’outils de la détection des vulnérabilités en matière de cybersécurité ou des architectures de surveillance des menaces notamment celles contre les cables.

De quoi parle-t-on ?

La stratégie Apply AI vise à aider les entreprises (secteur de la sécurité inclus) et le secteur public à mieux comprendre le potentiel de l'IA, ses domaines d'efficacité et son potentiel d'avantage concurrentiel. Elle encourage les organisations à accorder une plus grande place à l'IA dans leurs efforts de résolution de problèmes. 
En proposant des actions politiques transversales et sectorielles, la stratégie fournit un modèle pour soutenir le déploiement et la mise à l'échelle de solutions d'IA pertinentes. En établissant un mécanisme de gouvernance unique, la stratégie encourage le dialogue entre les décideurs politiques et les différentes communautés sectorielles. En connectant et en renforçant les instruments liés à l'IA, elle sert de modèle pour l'adoption et l'intégration complètes de l'IA dans les secteurs stratégiques de l'UE.

S'appuyant sur le plan d'action pour l'IA sur le continent et sur l'engagement de l' UE à promouvoir une IA centrée sur l'humain et digne de confiance, conformément à l'AI Act, la stratégie se concentre sur l'exploitation du potentiel de transformation de l'IA, servant de catalyseur à une intégration verticale accrue. 
Elle vise à stimuler l'utilisation de l'IA, en particulier parmi les PME et les petites et moyennes entreprises, et à faciliter l'intégration de l'IA afin de renforcer la compétitivité des industries européennes, notamment les plus stratégiques. Elle vise à libérer les avantages sociétaux plus larges de l'IA, depuis la possibilité de diagnostics de santé plus précoces et plus précis jusqu'à l'amélioration de l'efficacité et de l'accessibilité des services publics,. En outre, elle vise à renforcer les capacités de l'UE et à atteindre l'excellence dans l'IA de pointe.

L’IA en matière de défense et de sécurité

Comme annoncé dans le Livre blanc, la feuille de route pour la transformation de la défense européenne sera présentée d'ici fin 2025 afin de favoriser une intégration plus rapide des technologies disruptives essentielles, dont l'IA, dans les capacités de défense, afin d'atteindre la préparation de la défense européenne d'ici 2030, conformément aux intérêts et objectifs économiques et de sécurité de l'Union.
En outre, la Commission cofinance avec les États membres les capacités de calcul, notamment en synergie avec la défense. Les États membres, par le biais de leurs plans nationaux, peuvent également bénéficier du programme « Action de sécurité pour l'Europe » (SAFE) pour investir dans des domaines clés de la défense, notamment les équipements basés sur l'IA et la cybersécurité.

Pour soutenir la politique de l’IA en priorité dans le secteur de la défense et de l’espace, la Commission entend accélérer le développement et le déploiement de capacités européennes de connaissance de la situation et de C2 (commandement et contrôle) basées sur l' IA par l' intermédiaire du Fonds européen de défense (FED), tout en encourageant les solutions d'architecture ouverte à double usage pour la sécurité des frontières et la protection des infrastructures critiques, en garantissant l'interopérabilité à l'appui des fleurons de la défense, notamment Eastern Flank Watch et le Drone Wall, en particulier pour l'intégration de fonctionnalités autonomes dans différentes solutions.

La Commission et le SEAE mettront en corrélation les actions prioritaires en matière de défense avec les engagements, initiatives et actions coordonnés pris par les États membres dans le cadre du processus de feuille de route de préparation à la défense, ainsi qu'avec le cadre et les initiatives pertinents visant à accélérer l'adoption de l'IA dans la défense, notamment en tirant parti du FED et du Hub for EU Defence Innovation (HEDI) de l'Agence européenne de défense.

L’IA en matière de sécurité intérieure

Comme le souligne ProtectEU – la stratégie de sécurité intérieure de l'UE, l'IA devient également un outil essentiel pour garantir la sécurité intérieure et la cybersécurité, alors que les États et les citoyens sont confrontés à des menaces numériques de plus en plus complexes et en constante évolution. Les organisations terroristes et criminelles organisées utilisent de plus en plus les technologies basées sur l'IA pour accélérer, intensifier et élargir la portée de leurs activités illicites. La cybercriminalité, le sabotage et le terrorisme se combinent pour donner lieu à des attaques hybrides, où l'IA est souvent exploitée par des acteurs malveillants. Il convient donc garantir la mise en place rapide de solutions basées sur l'IA pour la sécurité intérieure et la cybersécurité. 
Cela soutiendra le travail des autorités dans l'exécution de tâches de sécurité complexes, contribuera à la lutte contre l'utilisation malveillante de l'IA, détectera les anomalies, analysera et répondra aux incidents plus efficacement. Cela permettra une identification plus rapide des attaques, une meilleure prise de décision et une utilisation plus efficace des ressources. 

Pour soutenir la politique de l’IA en matière de sécurité intérieure, y compris dans le secteur de la cybersécurité, la Commission :
  • favoriser le développement et l’adoption de solutions d’IA à des fins de sécurité intérieure, notamment en soutenant la recherche appliquée et l’innovation et en stimulant la mise sur le marché de solutions d’IA adaptées à une utilisation dans le domaine de la sécurité intérieure.
  • financer des projets visant à développer et à déployer des outils, des technologies et des services de cybersécurité s'appuyant sur l'IA et traitant de la détection des menaces, de la détection des vulnérabilités, de l'atténuation des menaces, de la reprise après incident par auto-réparation, de l'analyse des données et du partage des données.
  • soutenir l'interopérabilité et l'intégration fiable de l'IA dans les architectures de cybersécurité, les infrastructures et la surveillance des menaces, y compris les Cyber Hubs et les futurs Cable Security Hubs, ainsi que pour les environnements numériques à double usage et pertinents pour la défense.

Assurer une meilleure régulation de l’IA, dans le prolongement de l’IA act

Dans le plan d'action pour l'IA sur le continent, la Commission s'est engagée à une mise en œuvre claire, simple et propice à l'innovation du règlement sur l’IA. Les interdictions de pratiques présentant des risques inacceptables et les obligations liées aux modèles d'IA à usage général sont déjà applicables. 
Des initiatives telles que le code de bonnes pratiques pour l'IA à usage général, les lignes directrices de la Commission et le pacte sur l'IA apportent des précisions sur les règles applicables et soutiennent leur application. Cependant, les retours des parties prenantes montrent que l'incertitude et le manque d'orientations constituent les principaux obstacles à la mise en œuvre du règlement sur l’IA, ralentissant l'adoption de l'IA. Dans le cadre de la stratégie Apply AI, la Commission intensifiera ses efforts pour garantir le respect du règlement sur l’IA. 

Premièrement, comme annoncé dans le Plan d'action pour l'IA sur le continent, la Commission a mis en place le Service Desk du règlement sur l’IA, une plateforme permettant d'accéder à toutes les informations pertinentes sur le règlement sur l’IA, de parcourir son contenu, de comprendre son application et d'obtenir des réponses personnalisées à toute question relative à sa mise en œuvre. 
Il comprend une plateforme d' information unique dotée d'outils interactifs, notamment un outil de vérification de la conformité pour aider les parties prenantes à déterminer si elles sont soumises à des obligations légales et à comprendre les étapes à suivre pour s'y conformer. 

Deuxièmement, la Commission élaborera de nouvelles lignes directrices sur l'application pratique du règlement sur l’IA. Elle travaillera notamment en priorité sur :
  • lignes directrices sur la classification des systèmes d’IA à haut risque.
  • lignes directrices sur l'interaction du règlement sur l’IA avec d'autres législations de l'Union, couvrant la législation sectorielle pertinente (par exemple, les transports, les machines, les équipements radio).

Établir un mécanisme de gouvernance unique


La stratégie Apply AI n'est pas une initiative descendante, mais un effort inclusif. Afin de structurer un dialogue continu sur l'IA et de permettre aux acteurs du secteur de participer activement à l'élaboration des politiques en la matière, la Commission entend transformer l'Alliance IA existante en un forum de coordination pour les parties prenantes d'Apply AI et les décideurs politiques. En rejoignant l' Alliance IA, les parties prenantes pourront exprimer publiquement leur intérêt à participer aux processus sectoriels et accéder directement aux décideurs politiques pour discuter de l'impact, des obstacles et des opportunités de solutions d'IA sectorielles spécifiques. Servant de point d'entrée, l'Alliance travaillera en étroite collaboration et en complémentarité avec les autres initiatives consultatives sur l'IA (notamment sectorielles, réglementaires et de recherche et innovation), connectant les parties prenantes aux discussions pertinentes. Elle permettra le réseautage entre pairs et entre fournisseurs et utilisateurs de solutions d'IA, par exemple en mettant en relation un développeur d'outils de conformité avec des adoptants potentiels. Ouvert à tous les secteurs, aux universitaires concernés et aux organisations de la société civile, le Bureau de l'IA organisera des réunions annuelles pour discuter des politiques d'innovation en IA et établira des conseils sectoriels pour discuter et suivre la mise en œuvre de la stratégie. La coopération continue entre l'Alliance IA, le Conseil de l'IA et RAISE facilitera également la transposition de recherches précieuses au développement et l'accès au marché européen. 

La Commission entend aussi créer un Observatoire de l'IA afin de fournir des indicateurs fiables pour évaluer l'impact de l'IA dans les secteurs actuels et futurs, et de suivre les évolutions et les tendances ainsi que les changements qu'elle pourrait apporter au marché du travail. Sur la base de ces activités de suivi, la Commission proposera, dans le cadre de la Décennie numérique, un objectif d'investissement public et privé dans l'IA. L'Observatoire soutiendra également l'organisation de discussions sectorielles. Il servira à l'analyse politique et à la prise de décision, ainsi qu'à informer la communauté de l'IA et le grand public des évolutions récentes dans ce domaine.

Le comité de l'IA, institué en vertu du règlement sur l’IA, restera le principal forum de discussion sur l'IA avec les États membres et sera régulièrement informé des activités menées dans le cadre de l'Alliance Apply AI. Grâce à la sous-configuration du comité de l'IA sur l'innovation, les efforts se poursuivront pour suivre les stratégies nationales en matière d'IA et faciliter l'échange de bonnes pratiques entre les États membres, y compris pour le secteur public. Dans ce contexte, la Commission appelle les États membres à aligner leurs stratégies nationales en matière d'IA sur l'approche sectorielle présentée dans la présente communication.

 


synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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mardi 14 octobre 2025

Frontières, migration et criminalité : les Etats-Unis veulent les données biométriques des Européens... et l’Europe veut un accord

 


Pour aller aux États-Unis pas besoin de visa. Néanmoins l’administration américaine a introduit une nouvelle exigence pour participer au programme américain dit « d’exemption de visa ». Cette nouvelle exigence ? Conclure un «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) avec le ministère américain de la sécurité intérieure. Parmi les conditions requises pour ce partenariat : transférer des informations, notamment des données biométriques, aux autorités américaines, sur les voyageurs en partance pour un vol outre-atlantique. Certes, il existe déjà des accords UE-Etats-Unis, par exemple l’accord PNR (passenger Name Record) ou des accords d’entraide judiciaire. Cependant, ces partenariats renforcés destinés à être conclus vont un cran plus loin. Comme ils touchent les compétences de l’UE, un projet de recommendation est sur la table visant à donner un mandat à la Commission de négocier un accord européen. L’idée ? Conclure un accord-cadre UE-USA sur l’échange d’informations en vue du filtrage à des fins de sécurité et des vérifications d’identité concernant les voyageurs arrivant aux frontières.



De quoi parle-t-on ?

Dans le cadre des «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF), les États-Unis ont l’intention de mettre en place un échange d’informations sur: 

  • les voyageurs qui se rendent aux États-Unis et sont susceptibles d’avoir un lien avec le pays partenaire du programme d’exemption de visa;
  • les personnes qui demandent à bénéficier des avantages liés à l’immigration ou de la protection humanitaire aux États-Unis;
  • les personnes détectées par les services répressifs du ministère américain de la sécurité intérieure dans le cadre des contrôles frontaliers et de l’immigration aux États-Unis.
  • ces échanges concernent des informations stockées dans les bases de données nationales des États membres. Sont visées également les données biométriques.

Les accords prévus par les PRSF devraient être conclus au plus tard le 31 décembre 2026.



Qu’est-ce que ce «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) ?

En 2022, les États-Unis d’Amérique ont introduit une nouvelle exigence pour tous les pays qui ont été intégrés dans le programme américain d’exemption de visa ou qui aspirent à l’être. Ce programme permet aux citoyens des pays participants de se rendre aux États-Unis sans visa pour une durée maximale de 90 jours à des fins touristiques ou professionnelles. La nouvelle exigence implique la conclusion d’un «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) avec le ministère américain de la sécurité intérieure.

Les partenariats exigés dans le cadre du programme d’exemption de visa concernent les contrôles aux frontières et l’immigration. Un de leurs objectifs est d’établir de solides échanges bilatéraux d’informations afin de permettre aux autorités d’authentifier efficacement l’identité des voyageurs en provenance de pays partenaires et de déterminer s’ils représentent une menace pour la sécurité des États-Unis.

Dans le cadre des partenariats relevant de leur programme d’exemption de visa, les États-Unis ont conclu des accords bilatéraux avec des États membres de l’UE, tels que les accords sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité. Ces accords établissaient un échange d’informations, y compris de données biométriques, sur les personnes soupçonnées d’infractions terroristes ou de formes graves de criminalité ou condamnées pour de tels actes. 


Des partenariats renforcés pour plus de données

L’échange d’informations envisagé dans le cadre des PRSF diffère de l’échange au titre des accords déjà conclus sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité. Si l’objectif d’un échange d’informations au titre d’un accord sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité est de combattre le terrorisme et les formes graves de criminalité, l’objectif de l’échange d’informations dans le cadre des PRSF est potentiellement plus large, car il concerne également les domaines de la gestion des frontières et de la politique des visas.



Pourquoi l’UE intervient ?

La délivrance de visas et le mécanisme de détermination de la réciprocité en matière de visas relèvent de la compétence exclusive de l’Union. C’est également le cas des règles de l’Union en matière de protection des données.

Par conséquent, la conclusion, conformément aux exigences du programme américain d’exemption de visa, d’un accord-cadre avec les États-Unis sur l’échange d’informations en vue de la mise en place, par les États membres, d’un échange d’informations au titre des PRSF relève de la compétence exclusive de l’Union.

Compte tenu du lien avec cette compétence exclusive de l’Union en matière de politique commune de visas, le 12 juin 2024, les représentants permanents des États membres réunis au sein du Comité du Conseil de l’Union européenne (Coreper) a invité la Commission à présenter une proposition de mandat pour la négociation d’un tel cadre au nom de l’Union. 


Quel est l’objectif de la recommandation ?

L’objectif de la recommandation proposée est de fournir à la Commission les directives de négociation lui permettant de négocier un accord-cadre qui définira la structure juridique et les conditions de l’échange d’informations entre les autorités des États membres de l’UE et des États-Unis. Il s’agit de définir la base duquel les États membres sont habilités à conclure des accords bilatéraux pour un échange d’informations avec les États-Unis à partir de leurs systèmes informatiques nationaux. 


Quel est l’objectif de l’accord-cadre objet de la négociation?

L’un des principaux objectifs de l’accord-cadre est de garantir la réciprocité dans l’échange d’informations avec les États-Unis.

La teneur de l’échange d’informations – catégories et types de données, types de personnes et types d’infractions – sera définie au cours des négociations de manière à garantir l’équilibre et la réciprocité dudit échange. 


Quels sont les arrangements bilatéraux ?

Sur la base du cadre pour l’échange d’informations fixé dans l’accord-cadre, les États membres seraient en mesure de négocier et de conclure des arrangements bilatéraux mettant en œuvre l’échange d’informations avec les États-Unis.

Ces arrangements bilatéraux fourniraient des précisions sur l’échange d’informations avec les autorités américaines compétentes, compte tenu des exigences légales nationales, de la structure des bases de données nationales et d’autres exigences ou limitations techniques. 


Et du point de vue de l’UE ?

L’Union a élaboré une politique commune de visas pour les séjours de courte durée (90 jours maximum sur toute période de 180 jours). Actuellement, les ressortissants des États-Unis bénéficient d’un régime d’exemption de visa dans l’espace Schengen.

Le principe de réciprocité est l’un des fondements de la politique de l’UE en matière de visas à l’égard des pays tiers. La réciprocité signifie que, lorsque l’Union a accordé aux citoyens d’un pays tiers l’exemption de visa pour se rendre dans l’espace Schengen, elle attend du pays tiers qu’il fasse preuve de réciprocité en autorisant les citoyens de l’Union à se rendre sur son territoire sans qu’un visa ne soit nécessaire. La réciprocité totale a en effet été atteinte avec tous les pays tiers exemptés de l’obligation de visa, sauf les États-Unis. À l’exception de la Bulgarie, de Chypre et de la Roumanie, tous les États membres participent au programme américain d’exemption de visa. Parvenir à une réciprocité totale avec les États-Unis reste un objectif politique que l’Union cherche activement à atteindre.

Or, l’accord-cadre proposé garantirait une approche cohérente pour tous les États membres participant au programme d’exemption de visa en ce qui concerne les PRSF exigés. 


Quelles sont les lignes rouges pour parvenir à un l’accord-cadre

L’accord-cadre avec les États-Unis est nécessaire pour atteindre l’objectif de réciprocité poursuivi par la politique commune de visas et garantir l’application du cadre de l’UE relatif à la protection des données. Par conséquent, les directives de négociation, annexées à la présente recommandation en vue de l’ouverture de négociations avec les États-Unis pour la conclusion d’un accord-cadre, sont fondées sur les exigences du cadre juridique applicable de l’UE en matière de protection des données [à savoir le règlement (UE) 2016/679 et la directive (UE) 2016/680]. 

  • Les négociations devraient avoir pour objectif minimal de fixer un niveau d’échange d’informations adéquat, qui ne devrait pas dépasser celui de l’échange d’informations entre les États membres.
  • Il convient que l’accord respecte les droits fondamentaux et observe les principes consacrés par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. 
  • Il devrait être exclu de pouvoir lancer, de manière routinière et systématique, une requête concernant toutes les personnes voyageant entre l’UE et les États-Unis.  


L’accord-cadre :

  • établirait des garanties pour assurer la compatibilité avec les capacités des États membres, en s’appuyant sur la structure actuelle des bases de données nationales.
  • devrait fixer un niveau adéquat d’échange d’informations entre l’UE et les États-Unis, qui ne devrait pas dépasser celui de l’échange d’informations entre les États membres dans un contexte bilatéral ou européen, dans le respect également des principes de proportionnalité et de nécessité.
  • devrait préciser les conditions dans lesquelles une requête concernant un voyageur peut être lancée. La définition de ces conditions devrait, dans tous les cas, empêcher le lancement d’une requête concernant une personne sans suspicion préalable.



synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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mardi 7 octobre 2025

Mécanisme de protection civile de l’Union : des synergies entre la sécurité civile et la sécurité intérieure sont à prévoir

 


C’est ce qui ressort du rapport de la Commission européenne sur la résilience. Il y est indiqué que des synergies avec la stratégie de sécurité intérieure ProtectEU vont favoriser une meilleure préparation des populations aux risques et aux catastrophes. A cet égard, le rapport fait le point sur les progrès effectués dans le cadre de la gestion des risques et du renforcement de la résilience dans l’UE. L’accent est mis sur quatre domaines thématiques:  l’anticipation; la préparation des populations; l’alerte précoce; et la résilience de la protection civile. Le mécanisme de protection civile de l’Union (MPCU) est mis à l’honneur, le rapport estimant que ce dispositif a démontré sa valeur comme composante essentielle du système de protection civile de l’UE.



Quels sont les éléments à retenir ?

Ce rapport examine la gestion des risques et le renforcement de la résilience dans l’UE du point de vue du MPCU. Il examine l’évolution de la situation tant au niveau national qu’au niveau de l’UE, en mettant l’accent sur quatre domaines thématiques: l’anticipation, la préparation des populations, l’alerte précoce et la résilience de la protection civile.
Les conclusions confirment globalement la nécessité d’une approche plus proactive, plus globale et mieux intégrée de la résilience et de la préparation, comme le propose la stratégie de l’UE pour une union de la préparation.

La gestion des risques de catastrophe dans l’UE s’est considérablement améliorée ces dernières années grâce au renforcement du système de protection civile de l’UE, lequel a démontré sa capacité à s’adapter aux exigences croissantes d’un paysage des risques en évolution rapide. L’adoption des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes en 2023 a marqué une étape majeure et a permis de dégager une orientation commune dans cinq domaines clés de la protection civile: l’amélioration de l’anticipation, la préparation des populations, l’alerte précoce, les capacités de réaction et la résilience de la protection civile. Les initiatives phares spécifiques qui ont suivi ont permis de traduire ces priorités en actions concrètes, en associant les autorités nationales de protection civile et d’autres partenaires à un effort de collaboration pour accroître la résilience de l’UE.


Que penser du mécanisme de protection civile de l’Union (MPCU) ?


Selon le rapport, le MPCU a joué un rôle central dans la réaction collective de l’UE en apportant une aide d’urgence coordonnée aux pays dans le besoin. Dans le même temps, le MPCU a relevé le défi de la complexification du paysage des risques en consolidant ses capacités de réaction grâce à l’expansion de rescEU et au renforcement du centre de coordination de la réaction d’urgence (ERCC). Les efforts se sont également concentrés sur l’amélioration de la gestion des risques de catastrophe et le renforcement de la résilience, notamment par l’adoption des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes dans le domaine de la protection civile en 2023 et de la stratégie de l’UE pour une union de préparation en 2025, avec un champ d’application transsectoriel plus large.

Le rôle du MPCU se concerntre notamment sur l’alerte précoce. Dans l’UE, la responsabilité de l’alerte précoce et des alertes publiques incombe en premier lieu aux autorités nationales. Le MPCU joue un rôle complémentaire en développant des outils transnationaux, en renforçant les capacités d’appréciation de la situation de l’ERCC et en fournissant une assistance technique et financière aux capacités nationales d’alerte précoce.


Quels sont les progrès obtenus en matière d’anticipation ?


Lancé en 2023 comme une initiative phare, l’exercice d’élaboration de scénarios a produit dix scénarios de catastrophe à l’échelle de l’UE. Les scénarios couvrent 16 risques naturels et d’origine humaine, sélectionnés pour refléter l’ampleur de l’évolution du paysage des risques dans l’UE, et explorent les événements plausibles les plus défavorables ayant des incidences transfrontières et transsectorielles. Parmi les scénarios figurent un accident nucléaire grave, des conditions météorologiques hivernales extrêmes assorties d’une composante de cybermenace, une crise énergétique dans l’Union, une pandémie grave, un conflit armé et un attentat terroriste.

Le MPCU a investi dans le renforcement de la base de connaissances nécessaire à la gestion anticipative des risques, notamment par l’intermédiaire du centre de données sur les risques mis en place au sein du centre de connaissances en matière de gestion des risques de catastrophe du Centre commun de recherche.

Le centre de données sur les risques a été créé pour relever le défi de longue date que représentent la fragmentation et l’incohérence des données sur les risques au niveau de l’UE, en soutenant à la fois la gestion des risques de catastrophe et l’adaptation au changement climatique.


Quelle est la voie à suivre en matière d’anticipation ?

Dans les années à venir, la poursuite des investissements dans la science, la production de données de qualité et les capacités d’analyse sera cruciale pour générer les connaissances et les informations nécessaires à une prise de décision fondée sur la connaissance des risques. L’élaboration de scénarios de catastrophe à l’échelle de l’UE a constitué une avancée significative dans la planification de la préparation, car elle traduit des données fondées sur les risques en hypothèses de planification convenues pour le MPCU. L’évaluation globale des risques au niveau de l’UE prévue pour 2026 sera un outil essentiel pour renforcer la base factuelle en vue d’une prévention et d’une préparation transsectorielles plus larges.


Quels progrès en matière de préparation des populations

La Commission a lancé l’initiative phare preparEU. Dans ce contexte, un recensement des pratiques de communication sur les risques dans l’ensemble de l’UE, associé à la consultation des États membres et des États participants, a permis de déterminer les besoins communs et les domaines dans lesquels une action au niveau de l’UE pourrait apporter une valeur ajoutée. Ce processus a révélé un paysage de communication sur les risques riche mais fragmenté. En réponse aux besoins recensés, la Commission a élaboré un ensemble de mesures relatives au renforcement des capacités , comprenant:

  • un inventaire des bonnes pratiques et des documents d’appui sur la plateforme du réseau de connaissances en matière de protection civile de l’Union;
  • une formation de l’UE pour les professionnels de la communication sur les risques;
  • une communauté de pratique visant à mettre en relation les praticiens et à faciliter l’apprentissage collégial.


En 2024, la Commission a publié un manuel de bonnes pratiques sur la sensibilisation aux risques d’incendies de forêt, qui aborde un problème critique étant donné que 96 % des incendies de forêt sont causés par l’action humaine.


Quelle est la voie à suivre en matière de préparation des populations ?


Malgré les progrès accomplis, d’importantes lacunes subsistent en matière de sensibilisation et de préparation du public aux risques, ce qui souligne la nécessité de stratégies de communication plus efficaces et plus inclusives. Trop de citoyens se sentent insuffisamment informés ou mal préparés aux catastrophes.
Pour combler ces lacunes, une approche plus proactive, inclusive et participative s’impose, en investissant dans l’éducation, en mobilisant les communautés et les citoyens, en renforçant la confiance et en promouvant une préparation intergénérationnelle centrée sur la résilience.

Les synergies avec la stratégie de sécurité intérieure ProtectEU contribueront à renforcer la communication sur les divers risques et menaces, en garantissant la cohérence des messages publics et en favorisant une préparation plus polyvalente des populations dans l’ensemble de l’UE.

L’initiative «preparEU» jouera un rôle clé dans la concrétisation de la vision de la stratégie de l’UE pour une union de la préparation, notamment par des actions visant à promouvoir un minimum de 72 heures d’autosuffisance des populations dans les situations d’urgence et de crise. Afin de soutenir les autorités nationales dans leurs activités de communication sur les risques, l’UE élaborera des lignes directrices, lancera une formation pilote à la fin de l’année 2025 et organisera une journée annuelle de l’UE sur la préparation. D’autres actions comprendront la promotion de la préparation au moyen de programmes en faveur de l’éducation et de la jeunesse, ainsi que l’élaboration de nouveaux travaux de recherche en vue d’éclairer les politiques et les pratiques. 


Quels sont les progrès en matière d’alerte précoce ?


La Commission a mis au point un large éventail de systèmes d’alerte précoce et d’information:

  • un catalogue de 27 systèmes au niveau de l’UE couvrant différents types de dangers, accessible aux autorités nationales de protection civile pour soutenir le suivi des risques et la prise de décision.
  • le système de situation mondiale (GSS), une plateforme unique qui combine des données provenant de différents systèmes d’alerte précoce et d’information au niveau de l’UE pour renforcer la capacité de l’ERCC à suivre l’évolution des menaces et à anticiper les incidences critiques potentielles. La plateforme est également à la disposition des autorités nationales de protection civile.
  • le service Copernicus de gestion des urgences, qui fournit des services d’alerte précoce sur les inondations, les incendies de forêt et les sécheresses, en créant des cartes au service des interventions de réaction, de reprise et de prévention, et en produisant des données sur l’exposition pour aider à recenser les zones et les actifs à risque.
  • le partenariat scientifique européen sur les risques naturels, une collaboration scientifique fournissant à l’ERCC un suivi en temps réel par des experts de la situation en matière d’incendies de forêt dans toute l’Europe pendant la saison des feux de forêt. Afin de partager cet avantage avec les États membres et les États participants, l’ERCC a lancé un programme permettant aux autorités nationales de demander des évaluations précoces au partenariat scientifique européen sur les risques naturels et au partenariat scientifique européen sur les risques anthropiques en relation avec les risques radiologiques et nucléaires, en cas d’urgence imminente.



Quelles sont les avancées notables dans ce domaine ?

La Commission travaille actuellement à de nouvelles initiatives, notamment la mise au point d’un outil fondé sur l’IA dans le cadre de l’initiative «L’IA au service du bien public». Cet outil, qui sera intégré dans le système mondial d’information sur les incendies de forêt, s’appuiera sur des algorithmes d’IA pour modéliser les prévisions de risque d’incendie, détecter les événements d’incendie et prédire le comportement du feu.

Un autre progrès majeur à venir est le service d’alerte d’urgence par satellite de Galileo, qui fournira un canal d’alerte par satellite en mesure d’atteindre les populations vivant dans des zones reculées ou moins connectées, même lorsque les réseaux terrestres ne sont pas disponibles.

Enfin, l’UE a réalisé des progrès significatifs en matière d’alerte publique grâce au code des communications électroniques européen qui impose aux États membres de permettre l’envoi direct des avertissements sur les téléphones portables des particuliers dans les situations d’urgence.


Où se dirige-t-on concernant l’alerte précoce ?

Les priorités comprennent le renforcement du service Copernicus de gestion des urgences, la promotion de son utilisation et de son intégration dans les systèmes nationaux et le soutien de solutions interopérables et multirisques.

L’ERCC continuera de développer et d’affiner ses capacités d’appréciation de la situation. Si la nouvelle plateforme GSS représente une avancée majeure, il est possible d’apporter de nouvelles améliorations en intégrant un suivi sectoriel afin de fournir des informations en temps quasi réel sur les perturbations des services critiques, tels que l’énergie, les transports ou les soins de santé, et de favoriser une appréciation plus complète et anticipative de la situation.


Quels sont les progrès en matière de résilience ?

Afin d’améliorer la continuité des opérations d’urgence au sein du MPCU, la Commission a lancé une initiative phare comportant deux volets principaux: d’une part, des tests de résistance mettant à l’épreuve la continuité des activités de l’ERCC et d’autre part, un soutien apporté aux points de contact nationaux pour la réalisation de leurs propres tests sur la base du volontariat, au moyen d’un échange d’expériences.

À ce jour, dix pays et l’ERCC ont procédé à des tests de résistance et ont fait part de leurs approches et des enseignements qu’ils en ont tirés.
En 2024, l’ERCC a également mené l’exercice à grande échelle intitulé «EU Integrated Resolve 2024 – Parallel and Coordinated Exercise (EU IR24 – PACE)» afin de tester l’état de préparation de l’UE aux crises hybrides complexes.

Le rapport indique que les tests de résistance de la continuité des activités des centres d’opérations d’urgence se sont montrés prometteurs, et des exercices similaires devraient être élargis afin de recenser les domaines à améliorer et de faciliter l’apprentissage mutuel. Il sera également décisif d’investir dans la résilience des actifs physiques et des processus opérationnels pour assurer la continuité des services de protection civile.


Un exemple concret : le positionnement avancé des pompiers

Le programme de partage des enseignements tirés établi par le MPCU permet aux États membres et aux États participants de réfléchir aux expériences d’activation du MPCU, en recensant les domaines à améliorer en matière de réaction, de préparation et de prévention. Outre les réunions générales relevant de ce programme, des réunions spécifiques se concentrent sur des sujets particuliers, tels que les incendies de forêt. Ces réunions ont débouché sur des mesures telles que le positionnement avancé des pompiers et le renforcement de l’état de préparation de l’Europe en vue de lutter contre les incendies de forêt, notamment par l’augmentation des capacités aériennes de rescEU en matière de lutte contre les incendies de forêt.

Quant au programme global de formation du MPCU il a contribué à la préparation des experts et à l’amélioration des capacités de réaction aux différents types de catastrophes. Trente exercices (EU MODEX et exercices à grande échelle) ont été menés sur la base de scénarios spécifiques, notamment des tremblements de terre, des urgences médicales, des incendies de forêt, des inondations et des risques CBRN.


Une success story : le réseau européen de connaissances en matière de protection civile

Le rapport indique que depuis son lancement en 2021, le réseau européen de connaissances en matière de protection civile est devenu la plateforme de référence pour la communauté de la protection civile. Par l’intermédiaire de sa plateforme en ligne, de sa lettre d’information et de ses événements, le réseau européen de connaissances en matière de protection civile tient la communauté informée de la mise en œuvre des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes et de sujets connexes. La bibliothèque de connaissances en ligne du réseau, lancée en 2024, fournit un répertoire de ressources sur les objectifs en matière de résilience face aux catastrophes et la gestion des risques de catastrophe, tandis que des groupes de discussion interactifs, tels que celui consacré à la communication sur les risques, permettent aux praticiens d’échanger des idées et des bonnes pratiques.


L’essor de la boîte à outils du MPCU

La Commission a élargi la boîte à outils du MPCU pour le renforcement des capacités afin de mieux soutenir les efforts de protection civile en matière de prévention des risques de catastrophe, de préparation et de développement de la résilience. La boîte à outils est alignée sur les priorités stratégiques du MPCU et les objectifs en matière de résilience face aux catastrophes, et comprend:

  • des subventions du MPCU pour la résilience face aux catastrophes: «Assistance technique en matière de gestion des risques de catastrophe» axée sur des projets ne concernant qu’un pays, et «Connaissances pour l’action en matière de prévention et de préparation», soutenant des initiatives de coopération plurinationales;
  • le mécanisme de financement de l’assistance technique, lancé en 2024 pour la mise à disposition des compétences en matière de gestion des risques de catastrophe de la Banque mondiale et du dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes et de reconstruction.


synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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