Alors que la crise ukrainienne s'aggrave de jour en jour, le flux de réfugiés aux portes de l'Union européenne est loin de se tarir. L'espace Schengen est de nouveau sous pression, et la réforme telle que voulue par le Président Macron trouve un relief particulier.
Un mécanisme conjoncturel est mis en œuvre qui sera évoqué très prochainement. Un autre plus structurel, prévu par une proposition de règlement, est quant à lui en cours de création.
Ce projet de texte, actuellement à l’examen par le législateur, est la priorité donnée au renforcement des contrôles de police à titre de mesure de substitution au rétablissement de la réintroduction des contrôles aux frontières.
Concrètement, il s’agit de « civiliser » cette réintroduction qui s’est opérée, ces dernières années, de manière anarchique.
Premier axe : instaurer une gouvernance politique de Schengen par le truchement du Conseil de l’UE.
Deuxième axe : favoriser les contrôles de police.
D’autres mesures sont prévues pour endiguer les flux de migrants entre États membres, notamment une révision des accords de réadmission bilatéraux.
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De quoi parle-t-on ?
Cette proposition est modification du règlement (le «code frontières Schengen»). Elle constitue un élément clé de la feuille de route du nouveau pacte sur la migration et l’asile. Toutes les solutions proposées dans le nouveau pacte sur la migration et l’asile contribueront à une gestion efficace de la migration, à une coopération plus étroite et à un partage des responsabilités entre les États membres ainsi qu’à un cadre contraignant en matière de solidarité, renforçant ainsi l’espace Schengen.
La proposition donne suite à plusieurs résolutions du Parlement européen et s’appuie sur les recommandations de la Commission adoptées en 2017 en vue d’ouvrir la voie à une levée des contrôles durables aux frontières intérieures: la recommandation du 12 mai 2017 relative à des contrôles de police proportionnés et à la coopération policière dans l’espace Schengen et la recommandation du 3 octobre 2017 sur la mise en œuvre des dispositions du code frontières Schengen relatives à la réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures de l’espace Schengen.
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La Commission a également proposé de réviser le mécanisme d’évaluation et de contrôle de Schengen afin de le rendre plus efficace, plus stratégique et mieux armé pour faire face aux réalités nouvelles et aux nouveaux défis. Cette révision accroîtra la faculté du mécanisme de faciliter le dialogue politique sur la situation dans l’espace Schengen, en se concentrant sur les domaines susceptibles de compromettre le fonctionnement de cet espace dans son ensemble.
La proposition contribue à renforcer la sécurité dans l’espace Schengen en précisant les mesures dont disposent les États membres pour assurer un niveau élevé de sécurité, malgré la suppression des contrôles aux frontières intérieures. Elle fait suite à l’adoption, le 8 décembre 2021, d’un train de mesures sur la coopération policière.
Pourquoi cette proposition ?
L’espace Schengen a été mis à l’épreuve à plusieurs reprises par une série de crises et de défis : la crise des réfugiés sans précédent de 2015 et la pandémie de COVID 19.
Tout cela a porté atteinte au climat de confiance nécessaire au maintien d’un espace sans contrôle aux frontières intérieures.
Pour ces raisons, la Commission a annoncé qu’elle entendait compléter la panoplie d’outils nécessaires au bon fonctionnement de l’espace Schengen afin de rééquilibrer l’écosystème de règles et de rétablir et renforcer la confiance mutuelle entre les États membres.
L’une des mesures visant à rendre l’espace Schengen plus fort et plus résilient est une nouvelle proposition de modification code frontières Schengen.
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Cette proposition doit être envisagée dans le contexte des initiatives en cours visant à améliorer la gouvernance globale de Schengen. En s’appuyant sur les travaux du forum Schengen créé en 2020, la Commission adoptera début 2022 un «rapport sur la situation dans l’espace Schengen» résumant la situation relative à l’absence de contrôles aux frontières intérieures, les résultats des évaluations de Schengen et l’état d’avancement de la mise en œuvre des recommandations.
La Commission intégrera dans ces rapports un «tableau de bord de la situation dans l’espace Schengen» afin d’évaluer de manière interconnectée la mise en œuvre de l’acquis de Schengen dans les différents domaines d’action et de mieux aider les États membres à remédier aux difficultés éventuelles.
Et juridiquement ?
La proposition modifie le règlement de 2016 et elle modifie également la directive "retour" du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, en ce qui concerne les dérogations à l’obligation de prendre une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers.
La proposition remplace la proposition de la Commission visant à modifier le code frontières Schengen adoptée par la Commission en 2017, qui est retirée.
En effet, l’initiative de 2017 n’a pas reçu un soutien suffisant pour que les colégislateurs puissent faire aboutir les négociations et doit donc être retirée.
Elle reprend malgré tout les garanties procédurales qui avaient reçu un appui général lors des négociations de 2017 (telles que l’obligation de communiquer l’évaluation des risques en même temps que la notification des contrôles aux frontières intérieures en cas de menace prévisible).
Mesure 1 : révision du mécanisme de rétablissement des contrôles aux frontières intérieures
La proposition vise à créer un nouveau mécanisme permettant une réponse européenne à des problèmes qui touchent simultanément une majorité d’États membres et mettent ainsi en péril le fonctionnement global de l’espace Schengen. Ce nouveau mécanisme devrait compléter le mécanisme existant pour les manquements graves persistants aux frontières extérieures, tel qu’il est actuellement prévu dans le code frontières Schengen. En vertu de ce nouveaux mécanisme :
- Les États membres conservent le droit de prendre les mesures nécessaires lorsqu’ils sont confrontés à une menace immédiate. Ils donnent au Conseil la possibilité d’autoriser cette réintroduction.
- Cette autorisation peut être prolongée pour des périodes allant jusqu’à 6 mois chacune, aussi longtemps que la menace persiste.
Surtout, cette proposition prévoit l’intervention du Conseil lorsqu’une menace est devenue une question véritablement européenne, touchant simultanément une majorité d’États membres. Selon la Commission européenne, elle établit ainsi un juste équilibre entre, d’une part, le droit souverain des États membres d’introduire des contrôles aux frontières intérieures et la nécessité de tenir compte du caractère durable de certaines menaces et, d’autre part, la nécessité de veiller à ce que ces réintroductions se fassent de manière coordonnée et soient accompagnées des garanties appropriées.
Corolaire de la mesure 1 : Garanties procédurales en cas de réintroduction des contrôles
Afin de garantir que les contrôles aux frontières intérieures restent une mesure de dernier recours, la proposition précise et élargit la liste des éléments qui doivent être évalués par un État membre lorsqu’il prend la décision de réintroduire temporairement les contrôles aux frontières.
Par ailleurs, les prolongations concernant des menaces prévisibles d’une durée supérieure à 6 mois devraient également inclure une évaluation des risques.
Afin de tenir compte de l’expérience selon laquelle certaines menaces peuvent persister pendant un temps considérable, la possibilité de prolonger le contrôle aux frontières dans de tels cas est étendue à une période totale de 2 ans maximum. Au-delà de ce délai, l’État membre concerné devrait informer la Commission tout en motivant, dans sa nouvelle notification, le maintien de la menace.
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En outre, afin de permettre une analyse a posteriori, les États membres, après avoir levé les contrôles, devraient rester tenus de présenter un rapport sur la réintroduction du contrôle aux frontières intérieures au Parlement européen, au Conseil et à la Commission.
Par ailleurs, lorsque les contrôles aux frontières sont maintenus au-delà d’une période de six mois, un tel rapport devrait être présenté au bout de 12 mois, puis chaque année aussi longtemps que les contrôles sont maintenus.
Mesure 2 : la priorité donnée à la coopération policière à titre de mesure de substitution
La recommandation de la Commission de 2017 relative aux contrôles de police et à la coopération policière transfrontière encourageait les États membres à donner la priorité aux contrôles de police avant de décider de la réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures.
Au cours des quatre dernières années, plusieurs États membres ont intensifié les contrôles de police dans les zones frontalières en raison de l’accroissement des menaces pesant sur l’ordre public ou la sécurité intérieure.
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Certains de ces cas constituent des exemples de bonnes pratiques dans l’action menée pour faire face aux menaces persistantes.
En effet, ces contrôles peuvent souvent se révéler tout autant, sinon plus, efficaces que le contrôle aux frontières intérieures, notamment parce qu’ils sont plus souples que le contrôle statique aux frontières à certains points de passage frontaliers et qu’ils peuvent plus facilement être adaptés à des risques évolutifs.
Aussi, cette proposition prévoit qu’un État membre qui envisage de prolonger la réintroduction du contrôle aux frontières devrait tout d’abord évaluer s’il peut être remplacé par ces mesures de substitution.
À cette fin, la proposition précise la possibilité pour les États membres de recourir plus largement aux vérifications autres que les contrôles aux frontières dans les zones frontalières.
Mesure 3 : Régime uniforme de mesures aux frontières extérieures en cas d’épidémie
Le caractère global de la COVID 19 a nécessité des mesures ad hoc aux frontières extérieures afin de ralentir la transmission transfrontalière.
En mars 2020, la Commission a proposé une décision coordonnée sur l’application de restrictions aux déplacements non essentiels effectués au départ de pays tiers à destination de l’espace Schengen.
Cette proposition a conduit à l’adoption d’une recommandation du Conseil en juin 2020, l’objectif étant de faciliter une approche unifiée en matière de restriction de l’accès à l’Union européenne pour les voyageurs en provenance de pays confrontés à une situation épidémiologique très problématique.
Toutefois, bien que les États membres se soient mis d’accord sur une liste de pays tiers pour lesquels la restriction des déplacements non essentiels pouvait être levée, ils ont appliqué cette recommandation de façons très différentes.
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La proposition vise à établir un nouveau mécanisme permettant l’adoption en temps utile, par le Conseil, d’un instrument contraignant. Cet instrument fixe des restrictions temporaires de déplacement aux frontières extérieures en cas de menace pour la santé publique.
Grâce à ce mécanisme, les restrictions de déplacement s’appliqueront de manière uniforme dans tous les États membres aussi longtemps que la menace pour la santé publique persistera dans l’Union.
La proposition définit de manière exhaustive tous les éléments nécessaires d’un instrument destiné à être adopté par le Conseil dans un acte d’exécution.
Cet acte précise les catégories de personnes exemptées de restrictions de déplacement.
Il définit une liste minimale de catégories de voyageurs qui sont considérés comme nécessaires par rapport à des fonctions ou besoins essentiels et qui ne devraient donc pas faire l’objet des mesures prévues par cet instrument.
Mesure 4 : Faciliter la réadmission en cas de flux de migrants dits « secondaires »
Pour lutter contre le problème des mouvements non autorisés de migrants en situation irrégulière, la proposition permet le transfert des migrants en situation irrégulière s’il est clair que la personne appréhendée aux frontières intérieures dans le cadre de la coopération policière opérationnelle transfrontière arrive de cet autre État membre (par exemple, enregistrement dans Eurodac par un autre État membre ou factures récentes émises dans l’autre État membre).
En lien avec l’initiative relative à la coopération policière transfrontière présentée le 8 décembre 2021, il s’agit d’encourager le recours à des patrouilles communes pour permettre ce transfert simplifié des personnes appréhendées aux frontières intérieures.
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La proposition prévoit également la levée de la «clause de statu quo» actuellement applicable aux accords bilatéraux existant en la matière entre les États membres.
Ces accords évoqués par la directive relative au retour détermine les conditions dans lesquelles les migrants en situation irrégulière peuvent actuellement être renvoyés dans un État membre.
La proposition modifie la directive « retour » pour permettre aux États membres de mettre en place des accords de réadmission plus efficaces.
En outre, la Commission est prête à élaborer un modèle d’accord bilatéral.
Mesure 5 : Répondre efficacement à l’instrumentalisation des migrants
Comme indiqué dans la communication de la Commission intitulée «Répondre à l’instrumentalisation étatique des migrants à la frontière extérieure de l’UE», dans le plan d’action renouvelé de l’UE contre le trafic de migrants (2021-2025) adopté par la Commission le 29 septembre 2021, ainsi que dans la proposition de règlement de la Commission concernant des mesures contre les opérateurs de transport qui facilitent la traite des êtres humains ou le trafic de migrants en lien avec l’entrée irrégulière sur le territoire de l’Union européenne, ou qui se livrent à ces pratiques, un phénomène très inquiétant observé est le rôle croissant d’acteurs étatiques dans la création artificielle et la facilitation de la migration irrégulière, qui utilisent les flux migratoires comme instrument à des fins politiques pour déstabiliser l’Union européenne ou ses États membres.
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La proposition vise à lutter contre l’instrumentalisation des migrants, c’est-à-dire lorsqu’un acteur d’un pays tiers utilise des êtres humains pour déstabiliser l’Union ou ses États membres.
La proposition définit ce qu’il convient d’entendre par «instrumentalisation».
En outre, la modification proposée devrait préciser quelles sont les mesures disponibles aux points de passage frontaliers et dans le cadre de la surveillance des frontières pour empêcher les franchissements illégaux des frontières et y réagir lorsque les États membres de première entrée sont confrontés à une telle pression de la part d’un pays tiers.
Par ailleurs, une nouvelle proposition sur les procédures exceptionnelles en matière d’asile et de retour vise à assurer une cohérence avec cette approche en introduisant des dispositions qui permettent aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour gérer de manière humaine, ordonnée et digne, dans le plein respect des droits fondamentaux et des principes humanitaires, l’arrivée de personnes instrumentalisées par un pays tiers.
synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr
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