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mercredi 18 décembre 2019

Détournement frauduleux de l’argent européen : les montants des irrégularités ont progressé de… 183 %


D’après un rapport de la Commission européenne, le nombre de fraudes s'est réduit. En revanche, leurs montants ont littéralement explosé.

Securiteinterieure.fr dresse une synthèse de ce rapport en évoquant l’état des fraudes au budget européen, ainsi que les mesures prises par les Etats membres et par l’Union elle-même.


Argent détourné : de plus gros montants détournés

En 2018, 11 638 irrégularités au total, frauduleuses ou non, ont été signalées à la Commission, soit une diminution de 25 % par rapport à 2017.
Elles portaient sur un montant d’environ 2,5 milliards d’euros, un chiffre stable par rapport à l’année précédente.

Comme le note le rapport, le nombre des irrégularités signalées comme frauduleuses (qui inclut les soupçons de fraude et les fraudes établies) et les montants correspondants ne constituent pas un indicateur direct du niveau de fraude affectant le budget de l’UE.
Ils indiquent simplement le nombre de cas de fraude potentielle détectés et signalés par les États membres et les organes de l’UE.

En 2018, 1 152 irrégularités au total ont été signalées comme frauduleuses (soit 10 % de l’ensemble des irrégularités détectées et signalées), portant sur un montant d’environ 2 milliards d’euros (représentant 48 % des montants financiers totaux affectés par des irrégularités).
Ces irrégularités affectent aussi bien le volet des dépenses que celui des recettes.

Le nombre des irrégularités frauduleuses signalées en 2018 est resté stable par rapport à 2017. Les montants financiers en jeu ont, quant à eux, augmenté dans une très grande proportion, à savoir 183 %.

Si l’on examine une période de cinq ans (2014-2018), ce nombre a été inférieur de 27 % à celui de 2014, et de 16 % à la moyenne des cinq années.
Leur incidence financière fluctue notablement, étant donné qu’elle peut être fortement influencée par des cas particuliers impliquant des sommes très élevées. Les raisons de cette forte augmentation en 2018 concernent la politique de cohésion.

Par ailleurs, l’OLAF a ouvert en 2018, 219 enquêtes et en a clôturé 167, recommandant des recouvrements financiers d’une valeur de 371 millions d’euros.
À la fin de l’exercice, 414 enquêtes étaient encore en cours.

La réaction des États membres

L’Union européenne et les États membres partagent la responsabilité de la protection des intérêts financiers de l’Union et de la lutte contre la fraude.
Pour mémoire, les autorités des États membres gèrent environ 74 % des dépenses de l’UE et perçoivent les ressources propres traditionnelles.

Fin 2018, 11 États membres au total avaient adopté une stratégie nationale antifraude et l’avaient communiquée à la Commission.
En outre, en 2018, les États membres ont fait état de 71 mesures visant à protéger les intérêts financiers de l’UE et à lutter contre la fraude.
Les mesures couvraient l’intégralité du cycle de lutte contre la fraude, principalement dans le domaine de :
  • la gestion partagée et des marchés publics,
  • les conflits d’intérêts,
  • la corruption et les stratégies de lutte contre la corruption,
  • la criminalité financière,
  • les douanes et le commerce illicite.
  • La plupart des mesures concernaient la prévention et la détection.
Environ un tiers des mesures communiquées traitait également des enquêtes et des poursuites et du recouvrement et des sanctions.

Ces mesures étaient, en majorité, davantage sectorielles (64 %) que transversales (36 %). Parmi les mesures sectorielles :
  • 14 concernaient les recettes dans les domaines de la fraude fiscale et des douanes. 
  • 31 mesures concernaient les dépenses et couvraient tous les domaines budgétaires.

Ainsi, en 2018, 10 États membres ont adopté 13 mesures portant sur les marchés publics. Ces mesures portaient sur :
  • la lutte contre la corruption
  • les conflits d’intérêts
  • le renforcement de la transparence.
Environ la moitié de ces mesures impliquait des actes législatifs pour clarifier ou consolider les règles existantes ou adapter les systèmes nationaux aux évolutions de la législation de l’UE.
Des mesures organisationnelles ou opérationnelles ont aussi été notifiées, qui portent principalement sur les formations et l’introduction de nouveaux outils informatiques.

La réaction de l’Union elle-même

1e exemple : le Système d’information antifraude (AFIS)

Il s’agit d’un terme générique qui recouvre un ensemble d’applications informatiques antifraude gérées par la Commission européenne (OLAF). L’AFIS permet :
  • de créer des contacts avec les autorités compétentes dans les États membres
  • d’assurer un échange rapide et sûr des informations dans ce domaine entre les administrations nationales et de l'Union. 
Le portail AFIS est une infrastructure unique et commune assurant la fourniture des services mentionnés  à presque 8 800 utilisateurs finaux enregistrés dans plus de 1 900 services compétents des États membres, pays tiers partenaires, organisations internationales, services de la Commission.

Le projet AFIS couvre 2 grands domaines:
  • l’assistance mutuelle en matière douanière;
  • la gestion des irrégularités (portant sur plusieurs secteurs de dépenses).
L'AFIS (système d'information antifraude) soutient l’assistance mutuelle en matière douanière en s'appuyant sur :
  • le système d’échange d’informations sécurisé et en temps réel VOCU (unité virtuelle de coordination des opérations) utilisé pour les opérations douanières conjointes,
  • la messagerie web sécurisés (AFIS-Mail),
  • des bases de données comme CIS+ (système d’information douanier) et FIDE (fichier d’identification des dossiers d’enquêtes douanières)
  • des outils d’analyse tels que l’A-TIS (système d’information transit antifraude).

Le système de gestion des irrégularités (IMS) est un outil de communication électronique sécurisé qui aide les États membres à remplir leur obligation de signaler les irrégularités détectées en rapport avec des Fonds comme  :
  • le Fonds «Asile, migration et intégration» (FAMI),
  • l’instrument de soutien financier à la coopération policière, à la prévention et à la répression de la criminalité, ainsi qu’à la gestion des crises (ISF).

2e exemple : les Opérations douanières conjointes (ODC)


En plus de ses enquêtes relatives à des cas de fraude aux recettes, l’OLAF coordonne les opérations douanières conjointes (ODC) de grande ampleur auxquelles participent des partenaires opérationnels européens et internationaux.
Les ODC consistent en des actions ciblées, d’une durée limitée, visant à lutter contre la contrebande de marchandises sensibles et contre la fraude dans certaines zones et/ou sur certaines routes commerciales à risques.
En 2018, l’OLAF a apporté son soutien à 5 ODC.

3e exemple : l’assistance mutuelle et la lutte contre la fraude dans les accords internationaux
La coopération avec les pays tiers est destinée à lutter contre les violations de la législation douanière. Elle repose sur des accords d’assistance administrative mutuelle (AAM) en matière douanière.
Il existe actuellement des accords en vigueur avec plus de 80 pays, notamment les États-Unis, la Chine et le Japon. Le protocole d’AAM avec la Nouvelle-Zélande est entré en vigueur en 2018.

Les accords de libre-échange incluent généralement une clause relative à la lutte contre la fraude, autorisant le retrait temporaire des préférences tarifaires relatives à un produit en cas de fraude douanière grave et d’absence persistante de coopération adéquate pour y remédier.
L’OLAF contribue activement à la négociation de ces clauses.
Une clause a été convenue au niveau technique avec le Mercosur et la Nouvelle-Zélande en 2018.
Une telle clause sera également intégrée à l’accord de libre-échange modernisé avec le Mexique.

4e exemple : l’action du Centre commun de recherche (JRC)

L’OLAF coopère étroitement avec le JRC de la Commission, notamment conernant:
Instrument de suivi automatique (AMT) pour l’analyse des mégadonnées.
Le module AMT calcule des estimations de prix de référence pour les marchandises importées dans l’UE, pour chaque combinaison de produit, pays tiers d’origine et État membre de destination.
Il génère aussi des alertes automatiques lorsque des prix aberrants apparaissent dans les données commerciales.

L’analyse des données aux fins de la lutte contre la fraude en matière douanière (INTEL4CUSTAF) – Hercule III a financé ce projet lancé en 2018 par l’OLAF à la suite de demandes émanant des États membres.
Il s’agit de déterminer comment utiliser au mieux les sources de données et techniques d’analyse nouvelles ou émergentes.
De manière générale, ce projet permettra d’améliorer les capacités d’analyse à l’échelle de l’UE dans le domaine de la lutte contre la fraude en matière douanière.

5e exemple : le système de détection rapide et d’exclusion (EDES)

Depuis sa création en 2016, l’EDES, qui est géré par la Commission, a atteint sa maturité.
D’après le rapport, il s’est révélé être un outil solide pour renforcer la protection des intérêts financiers de l’UE contre les opérateurs économiques non fiables et les fraudeurs (les sanctions incluent l’exclusion du bénéfice des fonds de l’UE).

Le système EDES notamment:
  • la détection rapide des opérateurs économiques qui représentent un risque pour les intérêts financiers de l’UE;
  • l’exclusion des opérateurs économiques non fiables de l’accès aux fonds de l’UE et/ou l’imposition d’une sanction financière;
  • la publication, dans les cas les plus graves, sur le site web de la Commission, des informations relatives à l’exclusion et/ou la sanction financière.


synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr 


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