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lundi 17 novembre 2025

TE-SAT 2025: toujours plus jeunes et violents, Europol s’alarme de la jeunesse des terroristes

 


12 ans. C’est l’âge du plus jeune terroriste. L’implication croissante des mineurs dans les actes terroristes est l’une des tendances inquiétantes figurant dans le dernier rapport sur l’état de la menace terroriste en Europe (TE-SAT). Deux autres tendances à noter sont l’usage de l’IA et l’hybridation du terrorisme islamiste et celui d’extrême-droite. A relever également : 14 États membres ont signalé ces 58 attentats (menés, échoués et déjoués). La plupart des attentats ont eu lieu en France (14), qui demeure par ailleurs la cible principale des djihadistes.


Points clés à retenir


Le Rapport sur la situation et les tendances du terrorisme dans l'Union européenne (EU TE-SAT) 2025 est un aperçu de la situation, présentant des chiffres agrégés et décrivant les principaux développements et tendances du paysage terroriste dans l'UE en 2024.
En 2024, 58 attentats terroristes ont été recensés dans l'UE, dont 34 ont été menés à bien, cinq ont échoué et 19 ont été déjoués. 24 attentats terroristes ont été attribués au terrorisme djihadiste, ce qui représente une augmentation significative par rapport aux 14 attentats signalés en 2023. La plupart d'entre eux ont été perpétrés par des acteurs isolés (20 sur 24).
14 États membres ont signalé ces 58 attentats (menés, échoués et déjoués). La plupart des attentats ont eu lieu en Italie (20) et en France (14), suivies par l'Allemagne (6), l'Autriche (3), la Grèce (3), la Tchéquie (2), le Danemark (2), la Lituanie (2), la Belgique (1), l'Irlande (1), Malte (1), les Pays-Bas (1), la Slovaquie (1) et l'Espagne (1).

Au total, 449 personnes ont été arrêtées pour des infractions liées au terrorisme dans 20 États membres, soit une augmentation par rapport à 2023 (426) et 2022 (380). La majorité des arrestations ont eu lieu en Espagne (90), en France (69), en Italie (62) et en Allemagne (55).
Les suspects arrêtés étaient majoritairement des hommes (405), dont 43 étaient des femmes. 275 personnes arrêtées pour des accusations liées au terrorisme étaient des citoyens de l'UE et 174 étaient des citoyens de pays tiers.

Seize États membres de l'UE ont informé Eurojust des procédures judiciaires pour infractions terroristes conclues en 2024.17 Ces procédures judiciaires ont abouti à 485 condamnations et acquittements pour infractions terroristes.
Le plus grand nombre de condamnations et d'acquittements pour infractions terroristes en 2024 a été signalé par la France, l'Autriche et la Belgique (133, 64 et 62 respectivement).


Une tendance inquiétante : la jeunesse des terroristes

L'implication de mineurs et de jeunes dans le terrorisme et l'extrémisme violent est une évolution inquiétante qui a continué de croître en 2024. Le nombre de mineurs et de jeunes impliqués dans des activités terroristes et extrémistes violentes a continué de croître dans l'UE en 2024. Sur 449 suspects arrêtés en 2024, 133 étaient âgés de 12 à 20 ans, soit plus de 29 % du total des suspects arrêtés pour des infractions liées au terrorisme. Le plus jeune délinquant, âgé de 12 ans, a été arrêté pour avoir planifié un attentat. La grande majorité de ces jeunes suspects étaient liés au terrorisme djihadiste (114), suivis par le terrorisme d'extrême droite et l'extrémisme violent (12). Ils faisaient le plus souvent l'objet d'enquêtes pour participation à des attentats (57)9, production et diffusion de propagande (32) et appartenance à un groupe terroriste et/ou extrémiste violent (17). Ces jeunes auteurs étaient majoritairement des hommes10, ils avaient le plus souvent subi un processus d'auto-radicalisation en ligne et agissaient en dehors de toute organisation centralisée, souvent seuls ou au sein de petites cellules de pairs.

Deux autres points à retenir : l’usage de l’IA et l’hybridation des terrorismes islamiste et d’extrême-droite

Une autre préoccupation majeure était l'exploitation continue de l'intelligence artificielle et d'autres technologies innovantes, ouvrant de nouvelles possibilités en matière de recrutement, de propagande, de modes opératoires et d'outils de financement. Ces outils technologiques avancés transforment le paysage des menaces, remettant en question les réponses conventionnelles des forces de l'ordre et de la lutte antiterroriste.
À ces défis s'ajoute l'imbrication croissante des vies numériques et physiques des individus – la réalité « sur le terrain » – où la radicalisation en ligne se traduit naturellement par des violences dans le monde réel. Il existe une multitude de communautés en ligne où des individus radicalisés, insensibles au mal et à la souffrance, se laissent entraîner à visualiser, échanger et perpétrer des actes de violence. Ces communautés se recoupent idéologiquement, reliant le terrorisme djihadiste à l'accélérationnisme, produisant une hybridation des idéologies traditionnelles.


Du côté du terrprisme djihadiste


En 2024, 24 attentats djihadistes ont été signalés par les États membres de l'UE, dont six ont été menés à bien et 18 ont été déjoués. Ces six attentats ont été signalés par la France (2), l'Allemagne (2), l'Irlande (1) et les Pays-Bas (1), faisant 18 blessés et cinq morts.
Tous les attentats ont été perpétrés par des assaillants isolés, sans être dirigés ni instruits par un groupe terroriste spécifique.
18 attentats ont été déjoués respectivement en France (9), en Autriche (3), en Allemagne (4), en Belgique (1) et en Espagne (1).

La tendance à l'implication de très jeunes individus dans des enquêtes liées au terrorisme djihadiste s'est poursuivie en 2024. Des groupes de mineurs ont été observés se mettant en réseau en ligne, se radicalisant et planifiant des attentats. La majorité de ces jeunes étaient des partisans de l'État islamique (EI), mais semblaient rester largement à l'écart des mouvements djihadistes établis et avaient une connaissance limitée de l'idéologie djihadiste.

La radicalisation dans les prisons et la libération d'anciens détenus terroristes sont également restées une préoccupation majeure pour les États membres de l'UE.

La propagande d'Al-Qaïda et de l'État islamique a continué d'exploiter les événements de Gaza tout au long de l'année 2024, dans le but d'inciter à des attaques et d'intensifier la violence, notamment contre des cibles israéliennes et juives.


Du côté du terrorisme d'extrême-droite

Dans l'UE, 47 personnes ont été arrêtées pour des infractions terroristes violentes d'extrême droite en 2024. Ce chiffre représente une augmentation par rapport aux 26 arrestations de 2023, mais reste conforme aux 46 arrestations effectuées en 2022.
Les 47 arrestations ont été effectuées dans 10 États membres, la grande majorité en Italie (15). Des arrestations ont également été effectuées en France (8), en Allemagne (8), aux Pays-Bas (7), en Hongrie (3) et en Belgique (2). La Tchéquie, le Danemark, la Lettonie et la Slovaquie ont signalé une arrestation chacun.

La menace posée par les terroristes d'extrême droite et les extrémistes violents dans l'UE se caractérisait par un mélange de réseaux transnationaux en ligne, d'acteurs isolés (bien que souvent inspirés ou guidés par des réseaux en ligne) et de quelques groupes structurés hors ligne.

En 2024, un volume important de contenu de propagande a été créé et diffusé en ligne. Ce mouvement s'appuyait sur des idéologies et des idées telles que l'accélérationnisme, le néonazisme et le suprémacisme blanc.
Le profil le plus courant des extrémistes violents d'extrême droite actifs en ligne était celui de jeunes hommes, souvent mineurs, souffrant fréquemment de troubles mentaux. Le très jeune âge de certains suspects arrêtés pour planification et préparation d'attentats suscite de vives inquiétudes pour les États membres.

Dans l'environnement numérique, les idées accélérationnistes restaient au premier plan, conjuguées à l'engagement croissant et très inquiétant des extrémistes violents d'extrême droite actifs au sein de communautés occultistes et sataniques (en ligne), connues sous le nom de réseaux « 764 » ou « Com ». Dans ces communautés, l'idéologie extrémiste violente d'extrême droite est supplantée par des récits sataniques, souvent associés à un accélérationnisme apocalyptique.

En 2024, Europol a constaté une augmentation substantielle de la propagande en ligne combinant extrémisme de droite violent, matériel pédopornographique, ésotérisme, occultisme et satanisme. Malgré les efforts constants de lutte contre le terrorisme, le nombre croissant de nouveaux services en ligne et la tendance récente à réduire la modération du contenu ont contribué à maintenir le volume de propagande à un niveau considérablement élevé.
L'utilisation de l'IA générative et des technologies émergentes pour créer et diffuser de la propagande et des discours de haine a atteint des niveaux sans précédent.

L'intérêt persistant des extrémistes violents d'extrême droite pour les armes et les explosifs s'est matérialisé par la saisie de plusieurs armes à feu, notamment celles produites par impression 3D, dans de nombreux cas. Ces armes à feu semblent souvent ne pas être uniquement destinées à des attentats, mais s'inscrire dans un mode de vie particulier axé sur l'autodéfense, les arts martiaux et les techniques de survie.
La popularité des armes à feu imprimées en 3D a continué de croître. L'acquisition d'armes à feu reste un sujet majeur, y compris en ligne. Des extrémistes violents d'extrême droite au sein de l'UE se sont parfois livrés à du trafic d'armes, tandis que des inquiétudes persistent quant à un éventuel trafic d'armes en provenance de la zone de guerre en Ukraine.


Le terrorismede d'extrême-gauche et anarchiste 


En 2024, 21 attentats terroristes de gauche et anarchistes, menés ou non, ont été perpétrés dans deux États membres. Parmi ceux-ci, 17 ont été menés à bien, tandis que quatre ont échoué. L'Italie a signalé 18 attentats (15 menés à terme et trois ratés) et la Grèce trois (deux menés à terme et un raté).
Treize attentats ont été commis par incendie criminel, onze par accélérateur de feu et deux par engin incendiaire improvisé. Quatre attentats ont été commis par engins explosifs improvisés (EEI), tandis que quatre autres ont été commis par des armes contondantes ou des moyens similaires.

Vingt-huit arrestations ont été effectuées pour des infractions terroristes d'extrême gauche et anarchistes : 20 en Grèce, 6 en Italie, dont une en Argentine suite à une demande d'extradition de l'Italie, et une en Allemagne. Une autre arrestatiEuropol a eu lieu en Espagne sur la base d'un mandat d'arrêt international émis par les autorités péruviennes compétentes. Parmi les personnes arrêtées, cinq étaient des femmes (âgées de 30 à 65 ans) et 23 des hommes, âgés de 26 à 78 ans.
Dans 22 cas, l'infraction principale était l'appartenance à une organisation terroriste. Les autres infractions les plus courantes étaient la participation aux activités d'une organisation terroriste, l'incitation à la violence et les menaces.

Sur la scène terroriste et extrémiste violente de gauche, les groupes sont plus susceptibles de suivre des lignes organisationnelles avec une chaîne de commandement définie. Les extrémistes violents de gauche continuent d'opérer clandestinement en petits groupes, recourant à des méthodes rudimentaires pour mener leurs attaques, ciblant généralement des biens ou des infrastructures plutôt que des individus.

En 2024, la propagande extrémiste violente de gauche et anarchiste s'est concentrée sur des enjeux sociopolitiques internationaux et locaux. À l'international, les discours s'articulaient autour de thèmes tels que la lutte contre la répression, l'antifascisme, l'anti-impérialisme, l'anticolonialisme, l'anticapitalisme, l'antimilitarisme et l'anti-autoritarisme. Europol a également observé de fortes expressions de solidarité avec le peuple palestinien, la cause kurde, la situatiEuropol au Liban, ainsi qu'un accent mis sur les préoccupations environnementales et climatiques. Au niveau local, la propagande s'est concentrée sur la désapprobation de l'adhésion à l'OTAN ou à la zone euro, l'opposition à des événements comme les Jeux olympiques de Paris 2024 et la critique de la police et des forces de l'ordre, notamment par des campagnes de doxing ciblant les forces de l'ordre ou les opposants politiques liés à la scène extrémiste violente de droite.

Les extrémistes violents de gauche et anarchistes maintenaient un réseau international bien établi, se déplaçant fréquemment à travers l'UE pour participer à des manifestations, des mobilisations internationales et des actions de solidarité.

Les groupes extrémistes violents de gauche et anarchistes ont continué de s'appuyer fortement sur les plateformes en ligne pour diffuser leur propagande et recruter de nouveaux membres. En 2024, l'utilisation de l'intelligence artificielle (IA) pour la création de propagande a été signalée pour la première fois au sein des sphères de gauche et anarchistes.

La plupart des attaques perpétrées par des groupes terroristes ou extrémistes violents de gauche et anarchistes en 2024 étaient relativement peu coûteuses et ont donc pu être financées soit par leurs auteurs eux-mêmes, soit par des fonds collectés par les réseaux de gauche et anarchistes.


Terrorisme ethno-nationaliste, séparatiste et autre

En 2024, l'UE a recensé quatre attentats terroristes ethno-nationalistes ou séparatistes, en France (3) et en Italie (1), tous menés à bien. Il s'agit d'une baisse significative par rapport aux 70 incidents signalés en 2023, tous survenus en Corse (France).
Sur les 27 arrestations effectuées dans l'UE pour des infractions terroristes ethno-nationalistes et séparatistes, plus de la moitié (15) concernaient des individus principalement liés au Parti des travailleurs du Kurdistan (Partiya Karkerên Kurdistanê, PKK).

On a constaté une augmentation significative des enquêtes sur des suspects impliqués dans d'autres formes de terrorisme non spécifiées. Si de nombreuses personnes arrêtées appartenaient à des groupes antigouvernementaux, antisystème et antiinstitutionnels, neuf suspects ont été arrêtés pour avoir agi pour le compte de services de renseignement étrangers dans l'intention de faciliter des actes de violence dans l'UE, au Royaume-Uni et en Amérique du Nord, tels que des actes de sabotage, le transport et la détonation d'engins explosifs et incendiaires.
Un mélange de désinformation, de théories du complot, de sentiments anti-système et anti-gouvernementaux, ainsi que des contenus empruntés à d'autres idéologies (notamment de droite), sont présents dans la majeure partie de la propagande en ligne consommée et partagée par ces individus.
Six attentats terroristes classés comme autres formes de terrorisme non spécifiées ont été perpétrés respectivement en Tchéquie (1), au Danemark (2), en Lituanie (1), à Malte (1) et en Slovaquie (1). Un attentat a été déjoué en Tchéquie et une tentative d'attentat a échoué en Lituanie.

synthèse et traduction par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr


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dimanche 9 novembre 2025

EUDA 2025 : la nouvelle agence européenne des drogues commence ses travaux...en fanfare !

 


L’agence européenne des drogues a publié son rapport d’activité et force est de constater une évolution significative par rapport à l’ancien observatoire européen des drogues. Le rapport constate en effet le début d'une transformation organisationnelle et culturelle significative, faisant de l'EUDA une agence capable non seulement de surveiller mais aussi de mettre en œuvre des mesures proactives pour anticiper et répondre aux menaces liées aux drogues. Quant aux points clés à retenir concernant le domaine de la sécurité, il s’agit de :

  • la mise en place d'une nouvelle capacité de surveillance et d'analyse des précurseurs de drogues,
  • son investissement dans la coopération policière et plus particulièrement dans des plans d'action opérationnels (OAPs) de la Plateforme multidisciplinaire européenne contre les menaces criminelles (EMPACT), concernant le cannabis, la cocaïne, l'héroïne, les drogues synthétiques et les nouvelles drogues de synth‘se (NPS',
  • sa participation au lancement du Partenariat public-privé de l'Alliance européenne des ports (European Ports Alliance), une initiative phare visant à lutter contre la contrebande de drogue et l'infiltration criminelle dans les pôles logistiques maritimes.
  • une analyse approfondie des marchés de la drogue, puisque l'EUDA a poursuivi sa collaboration étroite avec Europol pour la quatrième édition de la publication conjointe EU Drug Markets: In-depth analysis.



L’élément clé : la naissance de l’«agence européenne des drogues»

L’année 2024 a vu l'entrée en vigueur, le 2 juillet, du nouveau règlement de l'Agence européenne des drogues (EUDA). À compter de cette date, ce règlement abroge et remplace le règlement fondateur (refonte) (CE) n° 1920/2006 de l'OEDT, faisant de l'OEDT l'agence nouvellement créée dotée d'un mandat renforcé.
Cette transformation confère à l'EUDA un mandat plus fort et des compétences étendues, avec un objectif principal : renforcer la préparation de l'UE face aux drogues (EU preparedness on drugs).
Le rapport souligne que l'EUDA est désormais mieux équipée pour soutenir l'UE et ses États membres face aux défis émergents en matière de santé et de sécurité posés par les drogues illicites. L'Agence s'est engagée à renforcer sa position en tant que courtier de connaissances sur les drogues au sein de l'UE et au-delà, tout en poursuivant l'excellence opérationnelle.


La création de nouveaux outils

Pour concrétiser ce mandat élargi, l'EUDA a lancé ou significativement développé les mécanismes suivants en 2024 :

Le Système européen d'alerte aux drogues (EDAS)

L'EUDA a développé l'EDAS (European Drug Alert System) dans le but d'émettre des alertes lorsque des risques graves liés aux drogues (SDRRs) apparaissent sur le marché. Les principaux objectifs de l'EDAS sont :
  • D'alerter les parties prenantes des risques graves liés aux drogues (SDRRs) de pertinence européenne.
  • De renforcer la veille situationnelle, la préparation et les activités de réponse.
  • D'améliorer la résilience aux SDRRs au niveau national et européen.
En 2024, des progrès significatifs ont été réalisés, notamment la rédaction du document sur les concepts clés de l'EDAS en collaboration avec le réseau Reitox des points focaux nationaux (PFN). Des points de contact nationaux EDAS provisoires ont été nommés et une réunion préparatoire en septembre a rassemblé environ 80 correspondants du Système d'alerte précoce (EWS) pour définir le fonctionnement du système.

Le Réseau européen de laboratoires de criminalistique et de toxicologie 

Ce réseau est une initiative phare du nouveau mandat de l'EUDA. Il a été lancé pour renforcer l'échange d'informations sur les nouvelles tendances en matière de drogues et pour former les experts nationaux en criminalistique et en toxicologie.
Le réseau joue un rôle crucial dans le renforcement de la capacité de l'UE à détecter et à répondre aux menaces émergentes liées aux drogues. En novembre 2024, l'EUDA a réuni sa première rencontre inaugurale. Au total, 63 laboratoires des 27 États membres de l'UE, de la Norvège et de la Turquie ont été officiellement désignés pour faire partie de ce réseau par l'intermédiaire de leurs représentants au sein du Conseil de gestion de l'EUDA. L'objectif était de poser les bases d'une collaboration future pour améliorer les capacités analytiques en Europe. 

Le Système européen d'évaluation des menaces (ETAS)

L'ETAS a été créé pour améliorer la veille situationnelle, la préparation et les activités de réponse au niveau de l'UE. Ses objectifs clés sont de détecter et d'évaluer les menaces liées aux drogues (à la fois pour la santé et la sécurité) et de fournir des évaluations en temps opportun, ainsi que des recommandations concrètes pour atténuer les risques. L'ETAS complète l'EWS, l'EDAS et le réseau de laboratoires.
En 2024, un projet pilote d'évaluation des menaces pour la santé et la sécurité a été lancé, axé sur les nouveaux opioïdes synthétiques (NSOs) dans les États baltes. Ce travail a pour but d'informer les décideurs de l'UE et d'atténuer l'augmentation des décès observée dans cette région.


Les premières évaluations formelles de précurseurs par l'EUDA

La fabrication de drogues de synthèse illicites en Europe existe depuis plus de 50 ans et, à l'échelle mondiale, une part importante de cette production se déroule aujourd'hui sur le territoire de l'UE. 
Afin de limiter l'accès aux produits chimiques nécessaires à la fabrication de ces drogues, la Commission européenne a demandé à l'EUDA d'évaluer les risques transfrontaliers pour la santé et la sécurité publiques que représentent neuf précurseurs de drogues utilisés pour la fabrication de cathinones de synthèse (huit précurseurs) et d'amphétamine (un précurseur).
Ces demandes ont été formulées à l'initiative de la Pologne, suite à l'apparition dans le pays de laboratoires clandestins de cathinones de synthèse à grande échelle et aux inquiétudes liées à la production d'amphétamine par des voies de synthèse alternatives.

Compte tenu du caractère novateur de cette démarche au niveau de l'UE, l'EUDA a rapidement élaboré, en concertation avec la Commission européenne, un cadre transitoire pour l'évaluation des précurseurs de drogues. Ce cadre comprenait des définitions et des schémas de processus, un état des lieux des lacunes en matière de connaissances et des sources de données existantes.

Fin janvier 2025, l'EUDA a remis à la Commission européenne le dernier des neuf rapports d'évaluation des précurseurs, pour examen par les États membres. 
Ces rapports analysent les données disponibles sur les substances et évaluent leur utilisation licite dans l'UE ainsi que l'ampleur de leur utilisation dans la production de drogues illicites. 
Il est important de noter que ces rapports mettent également en lumière les impacts et les conséquences potentiels du classement de ces substances chimiques, afin d'éclairer la prise de décision. 
Ces rapports font partie du nouveau service relatif aux précurseurs de médicaments mis en place par l'EUDA dans le cadre de la nouvelle réglementation.


Appui aux réponses politiques et opérationnelles face aux défis liés à la sécurité des drogues

Les analyses de l'EUDA ont également été présentées à de nombreuses autres occasions, notamment lors des réunions du Groupe de haut niveau sur la drogue (HDG), du COSI, du Conseil du Centre d'analyse et d'opérations maritimes – Stupéfiants (MAOC-N), du Conseil du programme Drogues d'Europol, d'EMPACT, du Groupe européen d'experts sur les précurseurs, de la Conférence d'Europol sur les drogues, de Lisbon Addictions et de la Semaine européenne de lutte contre la criminalité à Bruxelles, organisée par la Commission européenne en juin. 
Toutefois, l'événement le plus important organisé par l'EUDA dans ce domaine a été la première Conférence européenne sur la violence liée à la drogue, qui s'est tenue les 26 et 27 novembre à Bruxelles.
L'EUDA a en outre apporté son soutien à diverses réunions techniques et politiques, notamment celles d'importants groupes de travail de la Commission, tels que le Forum Internet de l'UE et la Coalition mondiale contre la menace des drogues de synthèse.


La contribution de l’agence au projet de coopération policière EMPACT

L’Agence a continué de contribuer aux principaux documents et initiatives politiques de l’UE, tels que la stratégie et le plan d’action de l’UE en matière de drogues 2021-2025 et les plans d’action opérationnels (PAO) EMPACT du cycle politique de l’UE sur la criminalité organisée et la grande criminalité internationale. 
Dans la limite des ressources disponibles, l’Agence a mené à bien toutes ses missions au titre du PAO EMPACT 2024 sur le cannabis, la cocaïne et l’héroïne, et du PAO sur les drogues de synthèse et les NPS. L'Agence a également contribué à la planification et à la rédaction des plans d'action opérationnels (PAO) pour 2025. 
Parmi ses contributions majeures aux PAO EMPACT figurent les modules récemment publiés sur l'héroïne et les autres opioïdes, les facteurs déclencheurs et facilitateurs, les nouvelles substances psychoactives (NPS) et les principaux enseignements pour les politiques et les pratiques de la quatrième édition de l'analyse approfondie conjointe OEDT-Europol sur les marchés de la drogue dans l'UE.


Un partenariat étroit EUDA-Collège européen de police


Par ailleurs, l'EUDA, en collaboration avec son partenaire, l'Agence de l'Union européenne pour la formation des services répressifs (CEPOL), a continué d'organiser et de dispenser des formations aux professionnels des forces de l'ordre. Malheureusement, la CEPOL a été victime d'une cyberattaque durant l'été, ce qui a entraîné l'annulation de nombreuses activités prévues pour le second semestre. Malgré ce revers, 1 462 agents de l’UE et de pays tiers ont participé à des formations (cours, webinaires, modules d’e-leçon) au cours du premier semestre 2024.
Par ailleurs, 40 agents de pays tiers, financés par des projets d’assistance technique mis en œuvre par l’EUDA, ont suivi des formations CEPOL et EUDA sur la lutte contre la drogue.


Une participation au partenariat public-privé « Alliance des ports européens »

L’EUDA a contribué, selon les besoins, à la mise en œuvre des actions pertinentes de la feuille de route de l’UE, conçue pour intensifier la lutte contre le trafic de stupéfiants et les réseaux criminels, et adoptée par la Commission européenne en octobre 2023. Cette feuille de route définit 17 actions ciblées réparties dans quatre domaines prioritaires. La Commission a travaillé en étroite collaboration avec les États membres et ses partenaires pour atteindre les objectifs fixés.
Parmi les initiatives phares de cette feuille de route figure le lancement, par la Commission européenne et la présidence belge du Conseil de l’UE, du partenariat public-privé « Alliance des ports européens » à Anvers le 24 janvier. L'alliance rassemble les acteurs publics et privés concernés par la lutte contre le trafic de drogue et l'infiltration criminelle des plateformes logistiques. Les ports européens sont particulièrement vulnérables au trafic de drogue et à l'exploitation par des réseaux criminels à haut risque. Cette initiative a été lancée en coopération avec les États membres de l'UE, les autorités portuaires, les associations européennes, les agences de l'UE (Europol, EUDA) et des représentants des douanes et des forces de l'ordre.


Une agence à portée internationale

L’EUDA a fourni une expertise technique et des conseils à ses principaux partenaires, notamment la Commission européenne. 
Cela a inclus l’élaboration de notes d’information sur des sujets tels que la situation et les marchés des drogues en Colombie, en Équateur, au Brésil, au Sénégal et au Mexique ; la surveillance du darknet dans l’UE, en envisageant des actions préparatoires et des actions futures ; les ports maritimes : surveillance des points d’entrée des drogues illicites dans l’UE (afin d’appuyer le suivi et l’évaluation des actions mises en œuvre dans le cadre de cette Alliance des ports de l’UE pour lutter contre le trafic de drogue et la criminalité organisée).

Pour mener à bien ses missions et atteindre ses objectifs, l'EUDA s'appuie sur ses autres partenaires européens et internationaux. Au cours de l'année, l'Agence a activement contribué aux travaux du réseau des agences de la Justice et des Affaires intérieures (JAI) et à plusieurs sous-réseaux du Réseau des agences de l'UE (EUAN), dont elle est membre. 
Concernant la coopération avec les pays tiers, l’Agence a poursuivi sa collaboration avec les pays candidats et candidats potentiels à l’adhésion à l’UE, ainsi qu’avec les pays partenaires de la Politique européenne de voisinage (PEV), dans le cadre des projets IPA8 (Instrument de coopération technique en matière d’assistance de préadhésion) et EU4MD II (Surveillance des drogues II). Pour la première fois, l’EUDA a publié des fiches d’information spécifiques pour chacun des partenaires des Balkans occidentaux dans le cadre du projet IPA8.


Une extension de l’activité de l’agence au monde entier et à la société civile


L’Agence a entamé sa troisième année de collaboration avec le Programme de coopération entre l’Amérique latine, les Caraïbes et l’Union européenne sur les politiques en matière de drogues (COPOLAD III), avec une série de sessions de formation et d’événements organisés avec les pays d’Amérique latine et des Caraïbes.
En 2024, l’EUDA a poursuivi le renforcement de sa coopération bilatérale avec des pays tiers clés par la négociation et la signature d’accords de travail. Quatre nouveaux accords ont été signés avec la Colombie, l’Équateur, le Chili et le Monténégro, tandis qu’un accord modifié a été signé avec l’Ukraine.

Le règlement de l’EUDA mentionne expressément les organisations de la société civile (OSC) parmi les parties prenantes concernées avec lesquelles l’Agence devrait coopérer à l’avenir dans l’accomplissement de ses missions. 
À cette fin, en 2024, l’EUDA a intensifié son dialogue avec les représentants des OSC afin d’identifier des domaines concrets et de développer des méthodes appropriées pour une future collaboration. 
Dans ce cadre, l’EUDA a participé à une réunion du Forum de la société civile sur les drogues (CSFD) et a organisé des consultations dédiées aux OSC afin d’engager des discussions sur la mise en place d’un cadre de collaboration systématique et structuré.


L’alliance des points focaux nationaux

Pour accomplir ses missions, l'Agence s'appuie sur de nombreux partenaires, notamment le réseau Reitox des points focaux nationaux, qui joue un rôle essentiel dans le maintien du système de surveillance de base de l'UE. 
Reconnaissant l'importance du réseau Reitox, le règlement de l'EUDA renforce également le rôle des points focaux nationaux. En 2024, les point focal belge, néerlandais et italien ont obtenu la certification Reitox, rejoignant ainsi plusieurs autres points focaux nationaux certifiés.
En 2024, les points focaux nationaux ont poursuivi la mise en œuvre de la deuxième feuille de route du cadre de développement Reitox (2021-2025). 
Les travaux ont progressé en vue de la définition d'une nouvelle Alliance Reitox, un document stratégique qui remplacera le cadre opérationnel précédent du système Reitox (2003) à compter de 2025 et orientera le réseau en tant que principal partenaire de l'EUDA dans les États membres pour les années à venir. 


Surveillance du marché des stupéfiants et identification des nouvelles tendances


Afin d’appuyer l’effort d’analyse global mené dans le domaine de la sécurité, les travaux se sont poursuivis en 2024 pour améliorer la qualité et la disponibilité des données essentielles sur l’approvisionnement, en étroite collaboration avec les programmes nationaux de lutte contre la drogue Reitox et le partenaire européen de l’Agence, Europol.
Cette surveillance de base a été complétée par de nouvelles sources de données et des approches de surveillance innovantes, telles que les informations en sources ouvertes (OSI) et la surveillance du darknet, qui ont pris une importance croissante ces dernières années. Des rapports réguliers de surveillance OSI ont été produits pour alimenter l’analyse de l’EUDA. 
Par ailleurs, les données relatives aux marchés du darknet ont été analysées et intégrées aux rapports réguliers de l’EUDA, tandis que des tableaux de bord nationaux sur les stupéfiants du darknet, basés sur les données de Darkcloud, ont continué d’être élaborés et transmis aux États membres participant au projet.
L’année 2024 a toutefois été marquée par le début, le 2 juillet, du nouveau mandat de l’EUDA, qui a engendré des tâches supplémentaires. 
La plus importante dans ce domaine est la collecte et l’analyse par l’Agence des « informations et données sur les précurseurs de drogues et sur le détournement et le trafic de précurseurs de drogues » (article 6 du règlement EUDA).


Surveillance des précurseurs de drogues

Dès le début de son nouveau mandat, l'EUDA s'est fortement impliquée dans le domaine des précurseurs de drogues. En très peu de temps, l'Agence a mis en place une expertise interne en la matière, couvrant à la fois les précurseurs de drogues illicites contrôlées et ceux des NPS (nouvelles substances psychoactives). Des compétences analytiques spécialisées ont été recrutées et les travaux de définition des procédures opérationnelles requises ont été lancés.
Parallèlement, l'EUDA a participé activement à l'échange d'informations et à la collaboration avec ses partenaires (notamment Europol, la Commission européenne, l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) et le Groupe Pompidou du Conseil de l'Europe) sur les précurseurs de drogues et les substances apparentées.
À la demande de la Commission européenne, l'EUDA a réalisé les premières évaluations de précurseurs, portant sur neuf substances.

 

synthèse et traduction par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr


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dimanche 2 novembre 2025

Protection civile : l’UE se dote d’une Plateforme de Coordination de Crise



Le mécanisme de protection civile de l'Union (MPCU) est en cours de révision et pour ce faire, une proposition de règlement est présentée. La principale nouveauté du règlement proposé est la mise en place d’une couche de préparation transsectorielle ainsi que l’intégration d’un financement pour la préparation et la réaction aux situations d’urgence sanitaire. L’autre grande nouveauté est la Plateforme de Coordination de Crise destinée à devenir la capacité centrale de l’UE en matière de préparation aux risques transsectoriels et de gestion opérationnelle des crises, notamment en ce qui concerne la constitution de stocks.



De quoi parle-t-on ?

Le règlement proposé introduit un cadre pour la protection civile et le financement de la préparation et de la réaction aux situations d’urgence sanitaire en vue d’exploiter les synergies et de soutenir une meilleure coordination entre les secteurs. 
L’objectif est d’améliorer l’efficacité globale du soutien à la prévention, à la préparation et à la réaction aux dangers naturels et d’origine humaine, y compris les menaces transfrontières graves pour la santé, en tenant compte de la nature de plus en plus complexe et interconnectée des risques et des menaces auxquels l’Union est confrontée, comme le soulignent les conclusions du Conseil européen de 2023 et 2024.


Pourquoi cette proposition ?

Ces dernières années, l’Europe est en butte à une sérieuse aggravation du paysage des risques et des menaces, engendrée par un faisceau de plus en plus imprévisible de défis en matière de sécurité, de santé, de changement climatique et d’environnement.
En outre, la nature multidimensionnelle des crises transsectorielles telles que la pandémie de COVID 19 et la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine exige une approche plus globale et intégrée de la gestion des crises, nécessitant une coopération étroite et efficace entre l’Union et ses États membres afin de relever efficacement les défis qu’elles posent. Le contexte géopolitique actuel nécessite de renforcer la préparation civile et militaire de l’Europe, comme le préconisent la stratégie européenne pour une union de la préparation et le livre blanc conjoint intitulé «Préparation de la défense européenne à l’horizon 2030» .

Dans les grandes lignes, quelles sont les avancées prévues dans dans la proposition de règlement ?
Le mécanisme de protection civile de l'Union (MPCU) a toujours couvert les catastrophes naturelles ou d'origine humaine. Cependant, la proposition de 2025 introduit une intégration transsectorielle bien plus poussée, en particulier concernant la santé :

  • Intégration Sanitaire : la proposition de Règlement introduit un cadre pour la protection civile et le financement de la préparation et de la réaction aux situations d’urgence sanitaire. L'intégration de ces mesures est considérée comme la principale nouveauté. L'objectif est de renforcer les capacités de prévention, de préparation et de réaction aux menaces transfrontières graves pour la santé.
  • Risques complexes : la proposition tient compte de la nature de plus en plus complexe, interconnectée et systémique des risques et des menaces, y compris les crises transsectorielles et prolongées, telles que la pandémie de COVID-19 et la guerre en Ukraine.
  • Approche «Préparation dès la conception» : le Règlement promeut le principe de la «préparation dès la conception» (preparedness by design), qui consiste à intégrer systématiquement les mesures préventives et les considérations de résilience dans l'ensemble de la législation et des politiques de l'Union.



Une nouveauté : la Plateforme de Coordination de Crise

L'institution de la Plateforme de coordination de crise représente une nouveauté majeure dans le cadre proposé, visant à doter l'Union d'une capacité centrale pour la gestion des menaces qui dépassent le champ traditionnel de la protection civile.
La Plateforme est explicitement conçue pour combler les lacunes qualitatives et quantitatives du cadre juridique actuel, en particulier face aux crises transfrontières complexes et prolongées. Elle est destinée à devenir la capacité centrale de l’UE en matière de préparation aux risques transsectoriels et de gestion opérationnelle des crises, notamment en ce qui concerne la constitution de stocks.
La Plateforme aura des fonctions essentielles de préparation et de coordination :

  • Appréciation de la situation et Prospective : Elle doit faciliter l’appréciation de la situation, la préparation et la coordination opérationnelles transsectorielles. Elle anticipe et surveille les risques liés aux crises transsectorielles, notamment en élaborant régulièrement des séances d’information sur les perspectives opérationnelles relatives aux dangers transsectoriels et tous risques.
  • Soutien à l'ERCC : La Plateforme s'appuiera sur la structure et les capacités existantes du Centre de coordination de la réaction d’urgence (ERCC), y compris ses capacités analytiques et scientifiques. Elle complétera la fonction de l'ERCC, qui, lui, continuera d'assurer le point central de coordination opérationnelle 24h/24, 7j/7 pour la poursuite des objectifs du mécanisme de l’Union.
  • Coordination intersectorielle : Elle assure une coordination avec les autorités nationales compétentes, les services de la Commission, et les institutions de l'Union, notamment dans des situations déclenchant une réaction politique intégrée (IPCR) ou l’activation de la clause de solidarité, ou en cas d’urgence de santé publique de portée internationale (déclaration de l'OMS).
  • Liaison Externe et Interne : Elle coopère étroitement avec le centre de réaction aux crises du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) pour la dimension extérieure des crises transsectorielles. Elle assurera également la cohérence avec l'architecture de sécurité intérieure de la Commission (y compris le futur Centre intégré d’opérations de sécurité - ISOC).


Renforcement et développement des capacités rescUE

Pour mémoire, rescEU est la réserve de capacités de réaction au niveau de l’Union. Contrairement à la Réserve européenne de protection civile (ECPP, l'ancien EERC, constitué de capacités volontairement engagées par les États membres), rescEU est destiné à compléter ces capacités et à répondre efficacement et rapidement aux demandes d’assistance.
Le rôle de rescEU est confirmé et renforcé dans la proposition de règlement. Le renforcement de rescEU implique :

  • Le financement du maintien des capacités existantes.
  • L'augmentation et la création de nouvelles capacités.
  • L'acquisition de capacités par divers moyens, tels que l'achat, la location, le crédit-bail, y compris pour les contre-mesures médicales. L'accent est mis sur l'utilisation de solutions développées ou produites dans l'Union pour renforcer l'autonomie stratégique.


Incendies de forêt : vers la mise en place progressive de la flotte aérienne permanente rescEU

La prolongation de la période transitoire pour le financement des moyens aériens nationaux de lutte contre les incendies de forêt jusqu'en 2034 est une mesure essentielle pour faire face à la fréquence et à l'intensité croissantes des feux de forêt.
Cette disposition vise à assurer une transition sans heurts vers la mise en place progressive de la flotte aérienne permanente rescEU de lutte contre les incendies de forêt, dont les nouveaux moyens devraient être disponibles à partir de 2028.
Pendant cette période transitoire (jusqu'en 2034), même si ces moyens sont désignés comme capacités de rescEU, la décision finale de les déployer est prise par l'État membre qui les a mis à disposition.


Des précisions sur l’utilisation et le déploiement de rescUE


Les capacités de rescEU peuvent être déployées lorsque l'Union a un intérêt à réagir à l’urgence ou lorsqu'une crise est susceptible d’avoir une incidence significative sur l’Union ou ses États membres. Cela inclut les cas où la crise menace les citoyens de l'Union, nécessite une intervention urgente et a été notifiée via d'autres mécanismes internationaux.

En outre, les capacités de rescEU dans les domaines des transports et de la logistique peuvent être sollicitées pour fournir un soutien à l’assistance consulaire aux citoyens de l'Union dans des pays tiers, notamment pour des rapatriements, des évacuations ou des départs assistés.
Il est important de noter que les capacités de rescEU ne peuvent être utilisées à des fins nationales (y compris les capacités à double usage) que lorsqu’elles ne sont pas utilisées ou nécessaires à la réaction de l’Union. 
La décision de déploiement des capacités de rescEU est prise par la Commission (par l'intermédiaire de l'ERCC), en coordination étroite avec l’État membre demandeur et l’État membre hôte de la capacité


Comment fonctionne la gestion de risque envisagée dans la proposition de règlement ?

Le processus d’élaboration des politiques prévu par la présente proposition de règlement révisé comprend plusieurs éléments et rapports clés, qui sont alignés sur les cycles de déclaration et séquencés afin de garantir une approche cyclique et efficace de la gestion des risques de catastrophes.

Le processus commence au niveau national, où les États membres sont chargés d’élaborer et de rendre publiques les évaluations des risques au niveau national ou infranational. 
Ces évaluations des risques servent de base à l’élaboration d’une planification de la gestion des risques de catastrophes, y compris les risques pour la sécurité et les menaces hybrides, qui tient compte de la collaboration transfrontière et des risques ayant des effets transfrontières. Ces évaluations et plans devraient être cohérents et coordonnés avec d’autres processus nationaux pertinents. En outre, et en tant que condition préalable aux évaluations éclairées des risques, les États membres devraient améliorer leur collecte de données sur les pertes dues aux catastrophes.

Au moins une fois tous les cinq ans, les États membres présentent à la Commission des résumés de leurs évaluations des risques, de leurs capacités de réaction et de leurs activités à l’appui des objectifs de l’Union en matière de résilience face aux catastrophes. La Commission poursuit l’élaboration des lignes directrices pour la présentation de ces résumés, en veillant à ce que le processus soit normalisé et efficace.
 

Une action de l’Union prenant le relai de celle des Etats membres

Au niveau de l’Union, la transmission des informations demandées et des autres données disponibles permet à la Commission de cartographier les capacités de gestion des risques aux niveaux européen, national et infranational afin de faciliter l’échange de bonnes pratiques et le renforcement des capacités connexes. 

Sur la base de l’évaluation des risques établie, la Commission réexamine régulièrement les scénarios de catastrophes à l’échelle de l’Union en matière de prévention des catastrophes et de préparation et de réaction à celles-ci, qui contribuent ensuite à la poursuite de l’élaboration des objectifs de l’Union en matière de résilience face aux catastrophes, en tant qu’hypothèses de planification convenues concernant les capacités de gestion des risques de catastrophes à mettre en place. 

Grâce à ces indicateurs convenus, la Commission établit des rapports réguliers sur les risques naturels et d’origine humaine auxquels l’Union est confrontée, sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des actions de gestion des risques et des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes, ainsi que sur les capacités de réaction nécessaires au niveau de l’Union pour soutenir les actions nationales visant à faire face à l’évolution du paysage des risques et des menaces. Ces rapports devraient être cohérents et coordonnés avec d’autres processus pertinents au niveau de l’UE.


Une couche « évaluations et la planification »

Ce séquençage garantit que les évaluations et la planification des risques au niveau national sont intégrées dans un processus d’évaluation et de définition d’objectifs au niveau de l’Union, qui alimente à son tour les actions nationales et le renforcement des capacités, avec des mécanismes réguliers de réexamen et de mise à jour afin de garantir que les politiques restent efficaces et pertinentes.
La Commission peut demander des informations complémentaires aux États membres concernant des mesures spécifiques de prévention et de préparation. La Commission peut également proposer le déploiement d’experts ou formuler des recommandations pour renforcer les niveaux de prévention et de préparation.


Qu’en est-il de la « couche prévention et préparation » ?


La forte augmentation du nombre d’activations du mécanisme de l’Union indique que les systèmes nationaux continueront probablement de demander un soutien accru pour réagir aux catastrophes et aux crises. 
Par conséquent, le mécanisme de coordination au niveau de l’Union doit être suffisamment équipé pour agir de manière plus efficiente et plus efficace afin d’offrir ce soutien, notamment en renforçant la prévention et la préparation.

La nouvelle couche de préparation vise à combler les lacunes quantitatives et qualitatives du cadre juridique actuel. 
Elle s’appuie sur les enseignements tirés de la pandémie de COVID 19, de la récente flambée de mpox et des récentes opérations du MPCU, en particulier en ce qui concerne les crises transfrontières complexes et la réponse aux besoins liés à la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. 
Elle reflète la recherche et la prospective sur l’évolution du paysage des risques et des menaces en Europe, en soulignant la nature de plus en plus systémique des risques et l’incidence croissante des effets en cascade dans tous les secteurs. 
Elle envisage en outre des réflexions prospectives avec les États membres sur la nécessité de préserver le fonctionnement des systèmes de protection civile existants en Europe dans des scénarios d’urgence et de crise de plus en plus complexes.

En ce qui concerne les lacunes quantitatives, cette nouvelle couche devrait permettre de faire face aux crises transsectorielles à forte incidence dans le cadre d’une approche plus globale et intégrée coordonnant plus efficacement les dispositifs de préparation et de réaction dans les secteurs touchés. 
En ce qui concerne les lacunes qualitatives, elle permet de faire face aux risques et aux menaces pour lesquels il n’existe encore aucun instrument. 
Cela permettra de réduire la fragmentation des structures de gestion des crises au niveau de l’UE, de simplifier les procédures et d’utiliser plus efficacement les ressources pour faire face, en particulier, aux risques émergents pour la sécurité liés aux menaces hybrides et aux perturbations des infrastructures critiques ayant une incidence intersectorielle. 


Qu’en est-il de la « couche préparation et de réaction » ?

L’intégration des mesures de préparation et de réaction aux situations d’urgence sanitaire dans la présente proposition offre un niveau supplémentaire de protection des citoyens de l’UE, ce qui, à terme, est de nature à renforcer la résilience et à protéger la population contre les menaces graves pour la santé. 
Les urgences sanitaires peuvent avoir des répercussions étendues au-delà du secteur de la santé, affectant la stabilité sociale, l’équilibre environnemental ou les infrastructures critiques. Les actions de préparation et de réaction aux situations d’urgence sanitaire continueront d’être coordonnées au sein des structures actuelles, dont le comité de sécurité sanitaire et le conseil de l’HERA. 

Le volet relatif à la préparation et réaction en cas d’urgence sanitaire de la proposition de règlement améliorera le financement de la surveillance, de la détection et de la compréhension des menaces sanitaires émergentes et imminentes, et établira un lien entre ces informations et les contre-mesures médicales. 
En étroite coordination avec les États membres, il améliorera l’accès aux capacités de production pendant les crises et soutiendra la passation de marchés, la constitution de stocks et le déploiement de contre-mesures médicales dans le cadre des efforts de préparation et de réaction. 
Il soutiendra également le développement des connaissances et la capacité des États membres de l’UE à prévenir les menaces transfrontières graves pour la santé, à s’y préparer et à y réagir.

Dans cette couche, quel est le rôle de l’ERCC et des capacités de l’UE en matière de gestion des crises ?
L’ERCC devrait jouer un rôle clé grâce à une nouvelle capacité élargie d’une plateforme centrale de coordination de crise de l’UE. 
Son principal domaine d’activité vise à mettre l’accent sur une meilleure compréhension des crises en facilitant des dispositifs de préparation et de réaction plus proactifs, une coordination intersectorielle sans prendre la main ni faire double emploi avec l’expertise sectorielle et un meilleur suivi tout en tenant les États membres et les décideurs informés, en ce qui concerne les compétences et les responsabilités.

Compte tenu de la compétence de soutien dans ce domaine d’action et des sensibilités nationales liées au développement des capacités de l’UE en matière de gestion des crises, le recours opérationnel aux dispositifs de réaction au titre de cette couche de préparation supplémentaire devrait être lié à un mécanisme de déclenchement à activer par le Conseil et lié aux procédures existantes telles que l’activation du dispositif IPCR ou la clause de solidarité (au titre de l’article 222 du TFUE).

Des mécanismes de financement plus souples

Sur la base des enseignements tirés, les taux de cofinancement et les règles opérationnelles énoncés dans la décision nº 1313/2013 et dans le cadre du programme «L’UE pour la santé» (EU4Health) seront simplifiés afin de permettre une mise en œuvre plus efficace et plus souple en cas de crise à évolution rapide. 
La proposition de règlement vise donc à clarifier les règles relatives à la mise en œuvre de nombreuses actions de réaction, telles que la mise en place de plateformes logistiques et de plateformes d’évacuation sanitaire, les évacuations sanitaires proprement dites, ainsi que le prépositionnement des capacités de réaction et des équipes d’intervention. 
Elle intégrera également plus clairement les dons du secteur privé dans le cadre du MPCU, mis en place avec succès au cours d’opérations visant à répondre aux besoins en Ukraine.

Le rôle central du réseau européen de connaissances en matière de protection civile


En outre, la proposition de règlement définira mieux le soutien apporté aux États membres au titre du MPCU dans leurs cycles de préparation nationaux. Cela concerne notamment des règles spécifiques encourageant les examens par les pairs et les évaluations volontaires des systèmes nationaux de préparation. 
Le rôle du réseau européen de connaissances en matière de protection civile en tant que pilier du renforcement des capacités sera encore consolidé en tant que plateforme d’échange d’expertise, d’enseignements tirés et de pratiques innovantes en matière de gestion des risques de catastrophes, avec en outre l’ajout de règles relatives à la préparation de la population et à la coopération avec les principales parties prenantes (secteur militaire et privé) dans le cadre de formations et d’exercices.


synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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dimanche 26 octobre 2025

Sécurité & technologies : une stratégie européenne pour d’avantage d’IA en matière de défense et de sécurité intérieure




La stratégie transectorielle dite « Apply AI » a fait beaucoup parler d’elle. Il faut dire qu’elle a un impact direct en matière de sécurité. L’objectif ? Accélérer la mise en oeuvre de l’IA dans le monde des entreprises et des administrations. Le but est que l’UE et ses Etats membres n’aient pas de train de retard. La défense et la sécurité intérieure ne sont pas en reste. Des mesures concrètes sont prévues. Outre le fameux « mur anti-drones » européen largement évoqués dans les médias, il est possible de mentionner par exemple, le développement d’outils de la détection des vulnérabilités en matière de cybersécurité ou des architectures de surveillance des menaces notamment celles contre les cables.

De quoi parle-t-on ?

La stratégie Apply AI vise à aider les entreprises (secteur de la sécurité inclus) et le secteur public à mieux comprendre le potentiel de l'IA, ses domaines d'efficacité et son potentiel d'avantage concurrentiel. Elle encourage les organisations à accorder une plus grande place à l'IA dans leurs efforts de résolution de problèmes. 
En proposant des actions politiques transversales et sectorielles, la stratégie fournit un modèle pour soutenir le déploiement et la mise à l'échelle de solutions d'IA pertinentes. En établissant un mécanisme de gouvernance unique, la stratégie encourage le dialogue entre les décideurs politiques et les différentes communautés sectorielles. En connectant et en renforçant les instruments liés à l'IA, elle sert de modèle pour l'adoption et l'intégration complètes de l'IA dans les secteurs stratégiques de l'UE.

S'appuyant sur le plan d'action pour l'IA sur le continent et sur l'engagement de l' UE à promouvoir une IA centrée sur l'humain et digne de confiance, conformément à l'AI Act, la stratégie se concentre sur l'exploitation du potentiel de transformation de l'IA, servant de catalyseur à une intégration verticale accrue. 
Elle vise à stimuler l'utilisation de l'IA, en particulier parmi les PME et les petites et moyennes entreprises, et à faciliter l'intégration de l'IA afin de renforcer la compétitivité des industries européennes, notamment les plus stratégiques. Elle vise à libérer les avantages sociétaux plus larges de l'IA, depuis la possibilité de diagnostics de santé plus précoces et plus précis jusqu'à l'amélioration de l'efficacité et de l'accessibilité des services publics,. En outre, elle vise à renforcer les capacités de l'UE et à atteindre l'excellence dans l'IA de pointe.

L’IA en matière de défense et de sécurité

Comme annoncé dans le Livre blanc, la feuille de route pour la transformation de la défense européenne sera présentée d'ici fin 2025 afin de favoriser une intégration plus rapide des technologies disruptives essentielles, dont l'IA, dans les capacités de défense, afin d'atteindre la préparation de la défense européenne d'ici 2030, conformément aux intérêts et objectifs économiques et de sécurité de l'Union.
En outre, la Commission cofinance avec les États membres les capacités de calcul, notamment en synergie avec la défense. Les États membres, par le biais de leurs plans nationaux, peuvent également bénéficier du programme « Action de sécurité pour l'Europe » (SAFE) pour investir dans des domaines clés de la défense, notamment les équipements basés sur l'IA et la cybersécurité.

Pour soutenir la politique de l’IA en priorité dans le secteur de la défense et de l’espace, la Commission entend accélérer le développement et le déploiement de capacités européennes de connaissance de la situation et de C2 (commandement et contrôle) basées sur l' IA par l' intermédiaire du Fonds européen de défense (FED), tout en encourageant les solutions d'architecture ouverte à double usage pour la sécurité des frontières et la protection des infrastructures critiques, en garantissant l'interopérabilité à l'appui des fleurons de la défense, notamment Eastern Flank Watch et le Drone Wall, en particulier pour l'intégration de fonctionnalités autonomes dans différentes solutions.

La Commission et le SEAE mettront en corrélation les actions prioritaires en matière de défense avec les engagements, initiatives et actions coordonnés pris par les États membres dans le cadre du processus de feuille de route de préparation à la défense, ainsi qu'avec le cadre et les initiatives pertinents visant à accélérer l'adoption de l'IA dans la défense, notamment en tirant parti du FED et du Hub for EU Defence Innovation (HEDI) de l'Agence européenne de défense.

L’IA en matière de sécurité intérieure

Comme le souligne ProtectEU – la stratégie de sécurité intérieure de l'UE, l'IA devient également un outil essentiel pour garantir la sécurité intérieure et la cybersécurité, alors que les États et les citoyens sont confrontés à des menaces numériques de plus en plus complexes et en constante évolution. Les organisations terroristes et criminelles organisées utilisent de plus en plus les technologies basées sur l'IA pour accélérer, intensifier et élargir la portée de leurs activités illicites. La cybercriminalité, le sabotage et le terrorisme se combinent pour donner lieu à des attaques hybrides, où l'IA est souvent exploitée par des acteurs malveillants. Il convient donc garantir la mise en place rapide de solutions basées sur l'IA pour la sécurité intérieure et la cybersécurité. 
Cela soutiendra le travail des autorités dans l'exécution de tâches de sécurité complexes, contribuera à la lutte contre l'utilisation malveillante de l'IA, détectera les anomalies, analysera et répondra aux incidents plus efficacement. Cela permettra une identification plus rapide des attaques, une meilleure prise de décision et une utilisation plus efficace des ressources. 

Pour soutenir la politique de l’IA en matière de sécurité intérieure, y compris dans le secteur de la cybersécurité, la Commission :
  • favoriser le développement et l’adoption de solutions d’IA à des fins de sécurité intérieure, notamment en soutenant la recherche appliquée et l’innovation et en stimulant la mise sur le marché de solutions d’IA adaptées à une utilisation dans le domaine de la sécurité intérieure.
  • financer des projets visant à développer et à déployer des outils, des technologies et des services de cybersécurité s'appuyant sur l'IA et traitant de la détection des menaces, de la détection des vulnérabilités, de l'atténuation des menaces, de la reprise après incident par auto-réparation, de l'analyse des données et du partage des données.
  • soutenir l'interopérabilité et l'intégration fiable de l'IA dans les architectures de cybersécurité, les infrastructures et la surveillance des menaces, y compris les Cyber Hubs et les futurs Cable Security Hubs, ainsi que pour les environnements numériques à double usage et pertinents pour la défense.

Assurer une meilleure régulation de l’IA, dans le prolongement de l’IA act

Dans le plan d'action pour l'IA sur le continent, la Commission s'est engagée à une mise en œuvre claire, simple et propice à l'innovation du règlement sur l’IA. Les interdictions de pratiques présentant des risques inacceptables et les obligations liées aux modèles d'IA à usage général sont déjà applicables. 
Des initiatives telles que le code de bonnes pratiques pour l'IA à usage général, les lignes directrices de la Commission et le pacte sur l'IA apportent des précisions sur les règles applicables et soutiennent leur application. Cependant, les retours des parties prenantes montrent que l'incertitude et le manque d'orientations constituent les principaux obstacles à la mise en œuvre du règlement sur l’IA, ralentissant l'adoption de l'IA. Dans le cadre de la stratégie Apply AI, la Commission intensifiera ses efforts pour garantir le respect du règlement sur l’IA. 

Premièrement, comme annoncé dans le Plan d'action pour l'IA sur le continent, la Commission a mis en place le Service Desk du règlement sur l’IA, une plateforme permettant d'accéder à toutes les informations pertinentes sur le règlement sur l’IA, de parcourir son contenu, de comprendre son application et d'obtenir des réponses personnalisées à toute question relative à sa mise en œuvre. 
Il comprend une plateforme d' information unique dotée d'outils interactifs, notamment un outil de vérification de la conformité pour aider les parties prenantes à déterminer si elles sont soumises à des obligations légales et à comprendre les étapes à suivre pour s'y conformer. 

Deuxièmement, la Commission élaborera de nouvelles lignes directrices sur l'application pratique du règlement sur l’IA. Elle travaillera notamment en priorité sur :
  • lignes directrices sur la classification des systèmes d’IA à haut risque.
  • lignes directrices sur l'interaction du règlement sur l’IA avec d'autres législations de l'Union, couvrant la législation sectorielle pertinente (par exemple, les transports, les machines, les équipements radio).

Établir un mécanisme de gouvernance unique


La stratégie Apply AI n'est pas une initiative descendante, mais un effort inclusif. Afin de structurer un dialogue continu sur l'IA et de permettre aux acteurs du secteur de participer activement à l'élaboration des politiques en la matière, la Commission entend transformer l'Alliance IA existante en un forum de coordination pour les parties prenantes d'Apply AI et les décideurs politiques. En rejoignant l' Alliance IA, les parties prenantes pourront exprimer publiquement leur intérêt à participer aux processus sectoriels et accéder directement aux décideurs politiques pour discuter de l'impact, des obstacles et des opportunités de solutions d'IA sectorielles spécifiques. Servant de point d'entrée, l'Alliance travaillera en étroite collaboration et en complémentarité avec les autres initiatives consultatives sur l'IA (notamment sectorielles, réglementaires et de recherche et innovation), connectant les parties prenantes aux discussions pertinentes. Elle permettra le réseautage entre pairs et entre fournisseurs et utilisateurs de solutions d'IA, par exemple en mettant en relation un développeur d'outils de conformité avec des adoptants potentiels. Ouvert à tous les secteurs, aux universitaires concernés et aux organisations de la société civile, le Bureau de l'IA organisera des réunions annuelles pour discuter des politiques d'innovation en IA et établira des conseils sectoriels pour discuter et suivre la mise en œuvre de la stratégie. La coopération continue entre l'Alliance IA, le Conseil de l'IA et RAISE facilitera également la transposition de recherches précieuses au développement et l'accès au marché européen. 

La Commission entend aussi créer un Observatoire de l'IA afin de fournir des indicateurs fiables pour évaluer l'impact de l'IA dans les secteurs actuels et futurs, et de suivre les évolutions et les tendances ainsi que les changements qu'elle pourrait apporter au marché du travail. Sur la base de ces activités de suivi, la Commission proposera, dans le cadre de la Décennie numérique, un objectif d'investissement public et privé dans l'IA. L'Observatoire soutiendra également l'organisation de discussions sectorielles. Il servira à l'analyse politique et à la prise de décision, ainsi qu'à informer la communauté de l'IA et le grand public des évolutions récentes dans ce domaine.

Le comité de l'IA, institué en vertu du règlement sur l’IA, restera le principal forum de discussion sur l'IA avec les États membres et sera régulièrement informé des activités menées dans le cadre de l'Alliance Apply AI. Grâce à la sous-configuration du comité de l'IA sur l'innovation, les efforts se poursuivront pour suivre les stratégies nationales en matière d'IA et faciliter l'échange de bonnes pratiques entre les États membres, y compris pour le secteur public. Dans ce contexte, la Commission appelle les États membres à aligner leurs stratégies nationales en matière d'IA sur l'approche sectorielle présentée dans la présente communication.

 


synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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