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dimanche 22 novembre 2020

Filtrer les migrants: l’UE impose une procédure commune préalable de contrôles sanitaires et sécuritaires

 


Imposer toute une batterie de contrôles aux migrants clandestins venant de pays hors UE, y compris un contrôle sanitaire et sécuritaire. Voilà ce que prévoit cette proposition de règlement harmonisant les mesures à appliquer à tout migrant fraichement débarqué d’un bateau de secours en mer, arrêté à la frontière ou interpellé sur le territoire national.
Inspiré du dispositif déployé dans les centres de gestion de crise (hotspots), l’objectif est d’assurer un pré-tri avant d’engager toute autre procédure : examen de la demande d’asile pour les candidats au refuge, transfert en vue d’une relocalisation des migrants dans le cadre du mécanisme de solidarité ou retour dans le contexte d’une procédure d’expulsion. 

 
De quoi parle-t-on ?


La présente proposition met en place un filtrage préalable à l’entrée qui devrait être applicable à tous les ressortissants de pays tiers qui se présentent aux frontières extérieures sans remplir les conditions d’entrée, ou après un débarquement faisant suite à une opération de recherche et de sauvetage La proposition introduit des règles uniformes concernant les procédures à suivre à l’étape de l’évaluation des besoins individuels des ressortissants de pays tiers avant leur entrée sur le territoire, ainsi que des règles uniformes sur la durée du processus de collecte des informations pertinentes pour l’identification des procédures à suivre à l’égard de ces personnes. 

La proposition crée également un cadre européen en mettant en place des règles uniformes pour le filtrage des migrants en situation irrégulière appréhendés sur le territoire et qui ont échappé aux contrôles aux frontières à leur entrée dans l’espace Schengen. 


Pourquoi le filtrage ?


Les données disponibles démontrent que l’arrivée de ressortissants de pays tiers ayant manifestement besoin d’une protection internationale telle qu’observée en 2015-2016 a été en partie remplacée par des arrivées mixtes. Il est donc important de développer un nouveau processus efficace permettant une meilleure gestion des flux migratoires mixtes. 

L’objectif du filtrage est de contribuer à la nouvelle approche globale de la migration et des flux migratoires mixtes en veillant à ce que l’identité des personnes, mais aussi d'éventuels risques liés à la santé et à la sécurité, soient rapidement établis, et que tous les ressortissants de pays tiers qui se présentent aux frontières extérieures sans remplir les conditions d’entrée ou après un débarquement faisant suite à une opération de recherche et de sauvetage soient rapidement renvoyés vers la procédure applicable. 


Il importe en particulier de créer un outil permettant d’identifier le plus tôt possible les personnes qui ne sont pas susceptibles de bénéficier d’une protection dans l’UE. Cet outil devrait être intégré au processus de contrôle aux frontières extérieures, avec un résultat rapide ainsi que des règles claires et équitables, et devrait permettre d’accéder à la procédure appropriée (asile ou procédure respectant la directive «retour»). Il devrait permettre de renforcer les synergies entre les contrôles aux frontières extérieures, la procédure d’asile et celle de retour.


Des motifs renforcés par la crise sanitaire ?


Le code frontières Schengen ne prévoit aucune obligation spécifique concernant des contrôles médicaux pour les ressortissants de pays tiers appréhendés dans le cadre de la surveillance des frontières. Les ressortissants de pays tiers qui se présentent aux frontières extérieures sans remplir les conditions d’entrée ou après un débarquement faisant suite à une opération de recherche et de sauvetage peuvent avoir été exposés à des menaces pour la santé (par exemple, lorsqu’ils viennent de zones de guerre ou parce qu’ils ont été exposés à des maladies transmissibles). 

Il est donc important d’identifier le plus tôt possible tous ceux qui ont besoin de soins immédiats ainsi que les mineurs et les personnes vulnérables afin de les renvoyer vers une procédure d’asile à la frontière ou accélérée, conformément aux critères applicables à ces procédures. 

La récente pandémie de COVID-19 montre également la nécessité de procéder à des contrôles sanitaires afin d’identifier les personnes nécessitant un isolement pour des raisons de santé publique. Il est donc nécessaire d’établir des règles uniformes en matière de contrôles sanitaires préliminaires qui s’appliqueraient à tous les ressortissants de pays tiers soumis au filtrage. 


Quelle est la philosophie du filtrage ?


Le filtrage proposé devrait apporter une valeur ajoutée aux procédures actuelles aux frontières extérieures, notamment:

  • en créant des règles uniformes relatives à l’identification des ressortissants de pays tiers qui ne remplissent pas les conditions d’entrée visées dans le code frontières Schengen, et en soumettant ces personnes aux contrôles sanitaires et de sécurité aux frontières extérieures, renforçant ainsi la sécurité au sein de l’espace Schengen;
  • en précisant que l’entrée n’est pas autorisée aux ressortissants de pays tiers sauf autorisation expresse après évaluation des conditions d’entrée ou lorsque l’État membre décide d’appliquer dans des cas particuliers les règles spéciales visées à l’article 6, paragraphe 5, du code frontières Schengen;
  • en créant un outil uniforme permettant de diriger vers la procédure appropriée tous les ressortissants de pays tiers qui se présentent aux frontières extérieures sans remplir les conditions d’entrée ou après un débarquement faisant suite à une opération de recherche et de sauvetage: soit une procédure conforme à la directive «retour» soit, en cas de demande de protection internationale, la procédure d’asile normale, une procédure accélérée, la procédure d’asile à la frontière ou, enfin, la relocalisation dans un autre État membre, (sans préjuger de l’issue de ces procédures, ni les remplacer);
  • en créant un cadre européen permettant également le filtrage des ressortissants de pays tiers qui sont entrés sans autorisation sur le territoire des États membres et qui sont appréhendés sur leur territoire.


En quoi consiste les 4 contrôles du filtrage ?


Le filtrage doit notamment consister en:

  • un contrôle sanitaire et un contrôle de la vulnérabilité préliminaires;
  • un contrôle d’identité par rapport aux informations contenues dans les bases de données européennes;
  • si cela n’avait pas encore été fait, l’enregistrement des données biométriques (données dactyloscopiques et images faciales) dans les bases de données correspondantes; et
  • un contrôle de sécurité par une interrogation des bases pertinentes de données nationales et de l’Union, en particulier le système d’information Schengen (SIS), afin de vérifier que la personne ne constitue pas une menace pour la sécurité intérieure. 



Qui est visé par le filtrage ? 


Le filtrage proposé devrait s’appliquer, aux frontières extérieures de l’UE:

  • à tous les ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures en dehors des points de passage frontaliers et pour lesquels les États membres sont tenus, en vertu du règlement Eurodac, de relever les empreintes digitales, y compris pour ceux qui demandent une protection internationale;
  • aux ressortissants de pays tiers qui sont débarqués après une opération de recherche et de sauvetage; et
  • aux ressortissants de pays tiers qui se présentent aux points de passage frontaliers sans remplir les conditions d’entrée et qui y demandent une protection internationale. 


Quelle articulation avec la procédure de relocalisation ? 


Le filtrage pourrait être suivi d’une relocalisation dans le cadre du mécanisme de solidarité établi par le règlement  relatif à la gestion de l’asile et de la migration. Cette opération s’effectue si
un État membre contribue à la solidarité sur une base volontaire,
si les demandeurs de protection internationale ne sont pas soumis à la procédure à la frontière dans le cadre du mécanisme visant à faire face aux situations de crise établi par le règlement sur les situations de crise.

Tous les ressortissants de pays tiers soumis au filtrage qui demandent une protection internationale au moment de leur interpellation, lors du contrôle aux frontières au point de passage frontalier ou lors du filtrage devraient être considérés comme des demandeurs de protection internationale. Toutefois, les dispositions du règlement relatif à la procédure d’asile et la directive relative aux conditions d’accueil ne devraient s’appliquer qu’après la fin du filtrage.

Dans le même esprit, les procédures établies par la directive «retour» ne devraient commencer à s’appliquer aux personnes couvertes par la présente proposition qu’après la fin du filtrage. 


Un filtrage étendu aux ressortissants de pays tiers appréhendés sur le territoire


Ces ressortissants sont soumis aux procédures de retour de la directive «retour», à moins qu’ils ne demandent une protection internationale. Dans ce dernier cas, il convient d’examiner leur demande ou de leur accorder une autorisation ou un droit de séjour dans l’État membre concerné.

Le filtrage des personnes appréhendées sur le territoire d’un État membre devrait compenser le fait que ces personnes ont vraisemblablement réussi à éviter les vérifications aux frontières à leur entrée dans l’Union européenne et l’espace Schengen.
En incluant ces cas dans le champ d’application du règlement proposé, il est garanti que ce filtrage suivra également des règles et des normes uniformes.
Dans de tels cas, le filtrage devrait être déclenché par l’absence de cachet d’entrée dans un document de voyage ou par l’absence totale de document de voyage, donc par l’incapacité de prouver de manière crédible le franchissement régulier d’une frontière extérieure.
Avec la mise en service du système d’entrée/de sortie en 2022, les cachets seront remplacés par des enregistrements plus fiables dans un système électronique également accessible aux autorités répressives, ce qui apportera une sécurité supplémentaire concernant l’entrée légale des ressortissants de pays tiers sur le territoire des États membres.

Par exception, le filtrage ne s’applique pas aux « overstayers », c’est-à-dire des personnes ayant dépassé la durée du séjour autorisé. Il s’agit des ressortissants de pays tiers ayant dépassé la durée de validité de leur visa, par exemple en restant dans les États membres plus de 90 jours sur une période de 180 jours ou en restant plus longtemps que ne le permet le titre de séjour ou le visa de long séjour dont ils sont titulaires) parce que ces personnes ont été soumises à des vérifications aux frontières à leur arrivée.


synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr 



A lire le paquet législatif :

 

A lire sur securiteinterieure.fr la synthèse du paquet législatif :

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