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mardi 14 octobre 2025

Frontières, migration et criminalité : les Etats-Unis veulent les données biométriques des Européens... et l’Europe veut un accord

 


Pour aller aux États-Unis pas besoin de visa. Néanmoins l’administration américaine a introduit une nouvelle exigence pour participer au programme américain dit « d’exemption de visa ». Cette nouvelle exigence ? Conclure un «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) avec le ministère américain de la sécurité intérieure. Parmi les conditions requises pour ce partenariat : transférer des informations, notamment des données biométriques, aux autorités américaines, sur les voyageurs en partance pour un vol outre-atlantique. Certes, il existe déjà des accords UE-Etats-Unis, par exemple l’accord PNR (passenger Name Record) ou des accords d’entraide judiciaire. Cependant, ces partenariats renforcés destinés à être conclus vont un cran plus loin. Comme ils touchent les compétences de l’UE, un projet de recommendation est sur la table visant à donner un mandat à la Commission de négocier un accord européen. L’idée ? Conclure un accord-cadre UE-USA sur l’échange d’informations en vue du filtrage à des fins de sécurité et des vérifications d’identité concernant les voyageurs arrivant aux frontières.



De quoi parle-t-on ?

Dans le cadre des «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF), les États-Unis ont l’intention de mettre en place un échange d’informations sur: 

  • les voyageurs qui se rendent aux États-Unis et sont susceptibles d’avoir un lien avec le pays partenaire du programme d’exemption de visa;
  • les personnes qui demandent à bénéficier des avantages liés à l’immigration ou de la protection humanitaire aux États-Unis;
  • les personnes détectées par les services répressifs du ministère américain de la sécurité intérieure dans le cadre des contrôles frontaliers et de l’immigration aux États-Unis.
  • ces échanges concernent des informations stockées dans les bases de données nationales des États membres. Sont visées également les données biométriques.

Les accords prévus par les PRSF devraient être conclus au plus tard le 31 décembre 2026.



Qu’est-ce que ce «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) ?

En 2022, les États-Unis d’Amérique ont introduit une nouvelle exigence pour tous les pays qui ont été intégrés dans le programme américain d’exemption de visa ou qui aspirent à l’être. Ce programme permet aux citoyens des pays participants de se rendre aux États-Unis sans visa pour une durée maximale de 90 jours à des fins touristiques ou professionnelles. La nouvelle exigence implique la conclusion d’un «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) avec le ministère américain de la sécurité intérieure.

Les partenariats exigés dans le cadre du programme d’exemption de visa concernent les contrôles aux frontières et l’immigration. Un de leurs objectifs est d’établir de solides échanges bilatéraux d’informations afin de permettre aux autorités d’authentifier efficacement l’identité des voyageurs en provenance de pays partenaires et de déterminer s’ils représentent une menace pour la sécurité des États-Unis.

Dans le cadre des partenariats relevant de leur programme d’exemption de visa, les États-Unis ont conclu des accords bilatéraux avec des États membres de l’UE, tels que les accords sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité. Ces accords établissaient un échange d’informations, y compris de données biométriques, sur les personnes soupçonnées d’infractions terroristes ou de formes graves de criminalité ou condamnées pour de tels actes. 


Des partenariats renforcés pour plus de données

L’échange d’informations envisagé dans le cadre des PRSF diffère de l’échange au titre des accords déjà conclus sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité. Si l’objectif d’un échange d’informations au titre d’un accord sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité est de combattre le terrorisme et les formes graves de criminalité, l’objectif de l’échange d’informations dans le cadre des PRSF est potentiellement plus large, car il concerne également les domaines de la gestion des frontières et de la politique des visas.



Pourquoi l’UE intervient ?

La délivrance de visas et le mécanisme de détermination de la réciprocité en matière de visas relèvent de la compétence exclusive de l’Union. C’est également le cas des règles de l’Union en matière de protection des données.

Par conséquent, la conclusion, conformément aux exigences du programme américain d’exemption de visa, d’un accord-cadre avec les États-Unis sur l’échange d’informations en vue de la mise en place, par les États membres, d’un échange d’informations au titre des PRSF relève de la compétence exclusive de l’Union.

Compte tenu du lien avec cette compétence exclusive de l’Union en matière de politique commune de visas, le 12 juin 2024, les représentants permanents des États membres réunis au sein du Comité du Conseil de l’Union européenne (Coreper) a invité la Commission à présenter une proposition de mandat pour la négociation d’un tel cadre au nom de l’Union. 


Quel est l’objectif de la recommandation ?

L’objectif de la recommandation proposée est de fournir à la Commission les directives de négociation lui permettant de négocier un accord-cadre qui définira la structure juridique et les conditions de l’échange d’informations entre les autorités des États membres de l’UE et des États-Unis. Il s’agit de définir la base duquel les États membres sont habilités à conclure des accords bilatéraux pour un échange d’informations avec les États-Unis à partir de leurs systèmes informatiques nationaux. 


Quel est l’objectif de l’accord-cadre objet de la négociation?

L’un des principaux objectifs de l’accord-cadre est de garantir la réciprocité dans l’échange d’informations avec les États-Unis.

La teneur de l’échange d’informations – catégories et types de données, types de personnes et types d’infractions – sera définie au cours des négociations de manière à garantir l’équilibre et la réciprocité dudit échange. 


Quels sont les arrangements bilatéraux ?

Sur la base du cadre pour l’échange d’informations fixé dans l’accord-cadre, les États membres seraient en mesure de négocier et de conclure des arrangements bilatéraux mettant en œuvre l’échange d’informations avec les États-Unis.

Ces arrangements bilatéraux fourniraient des précisions sur l’échange d’informations avec les autorités américaines compétentes, compte tenu des exigences légales nationales, de la structure des bases de données nationales et d’autres exigences ou limitations techniques. 


Et du point de vue de l’UE ?

L’Union a élaboré une politique commune de visas pour les séjours de courte durée (90 jours maximum sur toute période de 180 jours). Actuellement, les ressortissants des États-Unis bénéficient d’un régime d’exemption de visa dans l’espace Schengen.

Le principe de réciprocité est l’un des fondements de la politique de l’UE en matière de visas à l’égard des pays tiers. La réciprocité signifie que, lorsque l’Union a accordé aux citoyens d’un pays tiers l’exemption de visa pour se rendre dans l’espace Schengen, elle attend du pays tiers qu’il fasse preuve de réciprocité en autorisant les citoyens de l’Union à se rendre sur son territoire sans qu’un visa ne soit nécessaire. La réciprocité totale a en effet été atteinte avec tous les pays tiers exemptés de l’obligation de visa, sauf les États-Unis. À l’exception de la Bulgarie, de Chypre et de la Roumanie, tous les États membres participent au programme américain d’exemption de visa. Parvenir à une réciprocité totale avec les États-Unis reste un objectif politique que l’Union cherche activement à atteindre.

Or, l’accord-cadre proposé garantirait une approche cohérente pour tous les États membres participant au programme d’exemption de visa en ce qui concerne les PRSF exigés. 


Quelles sont les lignes rouges pour parvenir à un l’accord-cadre

L’accord-cadre avec les États-Unis est nécessaire pour atteindre l’objectif de réciprocité poursuivi par la politique commune de visas et garantir l’application du cadre de l’UE relatif à la protection des données. Par conséquent, les directives de négociation, annexées à la présente recommandation en vue de l’ouverture de négociations avec les États-Unis pour la conclusion d’un accord-cadre, sont fondées sur les exigences du cadre juridique applicable de l’UE en matière de protection des données [à savoir le règlement (UE) 2016/679 et la directive (UE) 2016/680]. 

  • Les négociations devraient avoir pour objectif minimal de fixer un niveau d’échange d’informations adéquat, qui ne devrait pas dépasser celui de l’échange d’informations entre les États membres.
  • Il convient que l’accord respecte les droits fondamentaux et observe les principes consacrés par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. 
  • Il devrait être exclu de pouvoir lancer, de manière routinière et systématique, une requête concernant toutes les personnes voyageant entre l’UE et les États-Unis.  


L’accord-cadre :

  • établirait des garanties pour assurer la compatibilité avec les capacités des États membres, en s’appuyant sur la structure actuelle des bases de données nationales.
  • devrait fixer un niveau adéquat d’échange d’informations entre l’UE et les États-Unis, qui ne devrait pas dépasser celui de l’échange d’informations entre les États membres dans un contexte bilatéral ou européen, dans le respect également des principes de proportionnalité et de nécessité.
  • devrait préciser les conditions dans lesquelles une requête concernant un voyageur peut être lancée. La définition de ces conditions devrait, dans tous les cas, empêcher le lancement d’une requête concernant une personne sans suspicion préalable.



synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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mardi 7 octobre 2025

Mécanisme de protection civile de l’Union : des synergies entre la sécurité civile et la sécurité intérieure sont à prévoir

 


C’est ce qui ressort du rapport de la Commission européenne sur la résilience. Il y est indiqué que des synergies avec la stratégie de sécurité intérieure ProtectEU vont favoriser une meilleure préparation des populations aux risques et aux catastrophes. A cet égard, le rapport fait le point sur les progrès effectués dans le cadre de la gestion des risques et du renforcement de la résilience dans l’UE. L’accent est mis sur quatre domaines thématiques:  l’anticipation; la préparation des populations; l’alerte précoce; et la résilience de la protection civile. Le mécanisme de protection civile de l’Union (MPCU) est mis à l’honneur, le rapport estimant que ce dispositif a démontré sa valeur comme composante essentielle du système de protection civile de l’UE.



Quels sont les éléments à retenir ?

Ce rapport examine la gestion des risques et le renforcement de la résilience dans l’UE du point de vue du MPCU. Il examine l’évolution de la situation tant au niveau national qu’au niveau de l’UE, en mettant l’accent sur quatre domaines thématiques: l’anticipation, la préparation des populations, l’alerte précoce et la résilience de la protection civile.
Les conclusions confirment globalement la nécessité d’une approche plus proactive, plus globale et mieux intégrée de la résilience et de la préparation, comme le propose la stratégie de l’UE pour une union de la préparation.

La gestion des risques de catastrophe dans l’UE s’est considérablement améliorée ces dernières années grâce au renforcement du système de protection civile de l’UE, lequel a démontré sa capacité à s’adapter aux exigences croissantes d’un paysage des risques en évolution rapide. L’adoption des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes en 2023 a marqué une étape majeure et a permis de dégager une orientation commune dans cinq domaines clés de la protection civile: l’amélioration de l’anticipation, la préparation des populations, l’alerte précoce, les capacités de réaction et la résilience de la protection civile. Les initiatives phares spécifiques qui ont suivi ont permis de traduire ces priorités en actions concrètes, en associant les autorités nationales de protection civile et d’autres partenaires à un effort de collaboration pour accroître la résilience de l’UE.


Que penser du mécanisme de protection civile de l’Union (MPCU) ?


Selon le rapport, le MPCU a joué un rôle central dans la réaction collective de l’UE en apportant une aide d’urgence coordonnée aux pays dans le besoin. Dans le même temps, le MPCU a relevé le défi de la complexification du paysage des risques en consolidant ses capacités de réaction grâce à l’expansion de rescEU et au renforcement du centre de coordination de la réaction d’urgence (ERCC). Les efforts se sont également concentrés sur l’amélioration de la gestion des risques de catastrophe et le renforcement de la résilience, notamment par l’adoption des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes dans le domaine de la protection civile en 2023 et de la stratégie de l’UE pour une union de préparation en 2025, avec un champ d’application transsectoriel plus large.

Le rôle du MPCU se concerntre notamment sur l’alerte précoce. Dans l’UE, la responsabilité de l’alerte précoce et des alertes publiques incombe en premier lieu aux autorités nationales. Le MPCU joue un rôle complémentaire en développant des outils transnationaux, en renforçant les capacités d’appréciation de la situation de l’ERCC et en fournissant une assistance technique et financière aux capacités nationales d’alerte précoce.


Quels sont les progrès obtenus en matière d’anticipation ?


Lancé en 2023 comme une initiative phare, l’exercice d’élaboration de scénarios a produit dix scénarios de catastrophe à l’échelle de l’UE. Les scénarios couvrent 16 risques naturels et d’origine humaine, sélectionnés pour refléter l’ampleur de l’évolution du paysage des risques dans l’UE, et explorent les événements plausibles les plus défavorables ayant des incidences transfrontières et transsectorielles. Parmi les scénarios figurent un accident nucléaire grave, des conditions météorologiques hivernales extrêmes assorties d’une composante de cybermenace, une crise énergétique dans l’Union, une pandémie grave, un conflit armé et un attentat terroriste.

Le MPCU a investi dans le renforcement de la base de connaissances nécessaire à la gestion anticipative des risques, notamment par l’intermédiaire du centre de données sur les risques mis en place au sein du centre de connaissances en matière de gestion des risques de catastrophe du Centre commun de recherche.

Le centre de données sur les risques a été créé pour relever le défi de longue date que représentent la fragmentation et l’incohérence des données sur les risques au niveau de l’UE, en soutenant à la fois la gestion des risques de catastrophe et l’adaptation au changement climatique.


Quelle est la voie à suivre en matière d’anticipation ?

Dans les années à venir, la poursuite des investissements dans la science, la production de données de qualité et les capacités d’analyse sera cruciale pour générer les connaissances et les informations nécessaires à une prise de décision fondée sur la connaissance des risques. L’élaboration de scénarios de catastrophe à l’échelle de l’UE a constitué une avancée significative dans la planification de la préparation, car elle traduit des données fondées sur les risques en hypothèses de planification convenues pour le MPCU. L’évaluation globale des risques au niveau de l’UE prévue pour 2026 sera un outil essentiel pour renforcer la base factuelle en vue d’une prévention et d’une préparation transsectorielles plus larges.


Quels progrès en matière de préparation des populations

La Commission a lancé l’initiative phare preparEU. Dans ce contexte, un recensement des pratiques de communication sur les risques dans l’ensemble de l’UE, associé à la consultation des États membres et des États participants, a permis de déterminer les besoins communs et les domaines dans lesquels une action au niveau de l’UE pourrait apporter une valeur ajoutée. Ce processus a révélé un paysage de communication sur les risques riche mais fragmenté. En réponse aux besoins recensés, la Commission a élaboré un ensemble de mesures relatives au renforcement des capacités , comprenant:

  • un inventaire des bonnes pratiques et des documents d’appui sur la plateforme du réseau de connaissances en matière de protection civile de l’Union;
  • une formation de l’UE pour les professionnels de la communication sur les risques;
  • une communauté de pratique visant à mettre en relation les praticiens et à faciliter l’apprentissage collégial.


En 2024, la Commission a publié un manuel de bonnes pratiques sur la sensibilisation aux risques d’incendies de forêt, qui aborde un problème critique étant donné que 96 % des incendies de forêt sont causés par l’action humaine.


Quelle est la voie à suivre en matière de préparation des populations ?


Malgré les progrès accomplis, d’importantes lacunes subsistent en matière de sensibilisation et de préparation du public aux risques, ce qui souligne la nécessité de stratégies de communication plus efficaces et plus inclusives. Trop de citoyens se sentent insuffisamment informés ou mal préparés aux catastrophes.
Pour combler ces lacunes, une approche plus proactive, inclusive et participative s’impose, en investissant dans l’éducation, en mobilisant les communautés et les citoyens, en renforçant la confiance et en promouvant une préparation intergénérationnelle centrée sur la résilience.

Les synergies avec la stratégie de sécurité intérieure ProtectEU contribueront à renforcer la communication sur les divers risques et menaces, en garantissant la cohérence des messages publics et en favorisant une préparation plus polyvalente des populations dans l’ensemble de l’UE.

L’initiative «preparEU» jouera un rôle clé dans la concrétisation de la vision de la stratégie de l’UE pour une union de la préparation, notamment par des actions visant à promouvoir un minimum de 72 heures d’autosuffisance des populations dans les situations d’urgence et de crise. Afin de soutenir les autorités nationales dans leurs activités de communication sur les risques, l’UE élaborera des lignes directrices, lancera une formation pilote à la fin de l’année 2025 et organisera une journée annuelle de l’UE sur la préparation. D’autres actions comprendront la promotion de la préparation au moyen de programmes en faveur de l’éducation et de la jeunesse, ainsi que l’élaboration de nouveaux travaux de recherche en vue d’éclairer les politiques et les pratiques. 


Quels sont les progrès en matière d’alerte précoce ?


La Commission a mis au point un large éventail de systèmes d’alerte précoce et d’information:

  • un catalogue de 27 systèmes au niveau de l’UE couvrant différents types de dangers, accessible aux autorités nationales de protection civile pour soutenir le suivi des risques et la prise de décision.
  • le système de situation mondiale (GSS), une plateforme unique qui combine des données provenant de différents systèmes d’alerte précoce et d’information au niveau de l’UE pour renforcer la capacité de l’ERCC à suivre l’évolution des menaces et à anticiper les incidences critiques potentielles. La plateforme est également à la disposition des autorités nationales de protection civile.
  • le service Copernicus de gestion des urgences, qui fournit des services d’alerte précoce sur les inondations, les incendies de forêt et les sécheresses, en créant des cartes au service des interventions de réaction, de reprise et de prévention, et en produisant des données sur l’exposition pour aider à recenser les zones et les actifs à risque.
  • le partenariat scientifique européen sur les risques naturels, une collaboration scientifique fournissant à l’ERCC un suivi en temps réel par des experts de la situation en matière d’incendies de forêt dans toute l’Europe pendant la saison des feux de forêt. Afin de partager cet avantage avec les États membres et les États participants, l’ERCC a lancé un programme permettant aux autorités nationales de demander des évaluations précoces au partenariat scientifique européen sur les risques naturels et au partenariat scientifique européen sur les risques anthropiques en relation avec les risques radiologiques et nucléaires, en cas d’urgence imminente.



Quelles sont les avancées notables dans ce domaine ?

La Commission travaille actuellement à de nouvelles initiatives, notamment la mise au point d’un outil fondé sur l’IA dans le cadre de l’initiative «L’IA au service du bien public». Cet outil, qui sera intégré dans le système mondial d’information sur les incendies de forêt, s’appuiera sur des algorithmes d’IA pour modéliser les prévisions de risque d’incendie, détecter les événements d’incendie et prédire le comportement du feu.

Un autre progrès majeur à venir est le service d’alerte d’urgence par satellite de Galileo, qui fournira un canal d’alerte par satellite en mesure d’atteindre les populations vivant dans des zones reculées ou moins connectées, même lorsque les réseaux terrestres ne sont pas disponibles.

Enfin, l’UE a réalisé des progrès significatifs en matière d’alerte publique grâce au code des communications électroniques européen qui impose aux États membres de permettre l’envoi direct des avertissements sur les téléphones portables des particuliers dans les situations d’urgence.


Où se dirige-t-on concernant l’alerte précoce ?

Les priorités comprennent le renforcement du service Copernicus de gestion des urgences, la promotion de son utilisation et de son intégration dans les systèmes nationaux et le soutien de solutions interopérables et multirisques.

L’ERCC continuera de développer et d’affiner ses capacités d’appréciation de la situation. Si la nouvelle plateforme GSS représente une avancée majeure, il est possible d’apporter de nouvelles améliorations en intégrant un suivi sectoriel afin de fournir des informations en temps quasi réel sur les perturbations des services critiques, tels que l’énergie, les transports ou les soins de santé, et de favoriser une appréciation plus complète et anticipative de la situation.


Quels sont les progrès en matière de résilience ?

Afin d’améliorer la continuité des opérations d’urgence au sein du MPCU, la Commission a lancé une initiative phare comportant deux volets principaux: d’une part, des tests de résistance mettant à l’épreuve la continuité des activités de l’ERCC et d’autre part, un soutien apporté aux points de contact nationaux pour la réalisation de leurs propres tests sur la base du volontariat, au moyen d’un échange d’expériences.

À ce jour, dix pays et l’ERCC ont procédé à des tests de résistance et ont fait part de leurs approches et des enseignements qu’ils en ont tirés.
En 2024, l’ERCC a également mené l’exercice à grande échelle intitulé «EU Integrated Resolve 2024 – Parallel and Coordinated Exercise (EU IR24 – PACE)» afin de tester l’état de préparation de l’UE aux crises hybrides complexes.

Le rapport indique que les tests de résistance de la continuité des activités des centres d’opérations d’urgence se sont montrés prometteurs, et des exercices similaires devraient être élargis afin de recenser les domaines à améliorer et de faciliter l’apprentissage mutuel. Il sera également décisif d’investir dans la résilience des actifs physiques et des processus opérationnels pour assurer la continuité des services de protection civile.


Un exemple concret : le positionnement avancé des pompiers

Le programme de partage des enseignements tirés établi par le MPCU permet aux États membres et aux États participants de réfléchir aux expériences d’activation du MPCU, en recensant les domaines à améliorer en matière de réaction, de préparation et de prévention. Outre les réunions générales relevant de ce programme, des réunions spécifiques se concentrent sur des sujets particuliers, tels que les incendies de forêt. Ces réunions ont débouché sur des mesures telles que le positionnement avancé des pompiers et le renforcement de l’état de préparation de l’Europe en vue de lutter contre les incendies de forêt, notamment par l’augmentation des capacités aériennes de rescEU en matière de lutte contre les incendies de forêt.

Quant au programme global de formation du MPCU il a contribué à la préparation des experts et à l’amélioration des capacités de réaction aux différents types de catastrophes. Trente exercices (EU MODEX et exercices à grande échelle) ont été menés sur la base de scénarios spécifiques, notamment des tremblements de terre, des urgences médicales, des incendies de forêt, des inondations et des risques CBRN.


Une success story : le réseau européen de connaissances en matière de protection civile

Le rapport indique que depuis son lancement en 2021, le réseau européen de connaissances en matière de protection civile est devenu la plateforme de référence pour la communauté de la protection civile. Par l’intermédiaire de sa plateforme en ligne, de sa lettre d’information et de ses événements, le réseau européen de connaissances en matière de protection civile tient la communauté informée de la mise en œuvre des objectifs en matière de résilience face aux catastrophes et de sujets connexes. La bibliothèque de connaissances en ligne du réseau, lancée en 2024, fournit un répertoire de ressources sur les objectifs en matière de résilience face aux catastrophes et la gestion des risques de catastrophe, tandis que des groupes de discussion interactifs, tels que celui consacré à la communication sur les risques, permettent aux praticiens d’échanger des idées et des bonnes pratiques.


L’essor de la boîte à outils du MPCU

La Commission a élargi la boîte à outils du MPCU pour le renforcement des capacités afin de mieux soutenir les efforts de protection civile en matière de prévention des risques de catastrophe, de préparation et de développement de la résilience. La boîte à outils est alignée sur les priorités stratégiques du MPCU et les objectifs en matière de résilience face aux catastrophes, et comprend:

  • des subventions du MPCU pour la résilience face aux catastrophes: «Assistance technique en matière de gestion des risques de catastrophe» axée sur des projets ne concernant qu’un pays, et «Connaissances pour l’action en matière de prévention et de préparation», soutenant des initiatives de coopération plurinationales;
  • le mécanisme de financement de l’assistance technique, lancé en 2024 pour la mise à disposition des compétences en matière de gestion des risques de catastrophe de la Banque mondiale et du dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes et de reconstruction.


synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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mardi 30 septembre 2025

Rapport antifraude 2025: l'autorité douanière de l'UE et l'Autorité de lutte contre le blanchiment vont venir étoffer l'architecture antifraude de l'Union





Le dernier rapport sur la protection des intérêts financiers de l’Union est disponible et il faut retenir plusieurs éléments, notamment l'existence de fraudes et d'irrégularités pour près de 2 milliards d’euros. 400 infractions ayant fait l'objet d'enquêtes concernent des organisations criminelles selon le Parquet européen. Ce même parquet a diligenté des enquêtes pour un montant correspondant à 13 milliards d’euros de prejudice. De son côté, l'office européen de lute antifraude (OLAF) a ouvert près de 250 enquêtes. Enfin et surtout, l'architecture de lutte contre la fraude est en pleine revision et de nouveaux acteurs vont venir la renforcer.



Quel est le contexte ?

Le 16 juillet 2025, la Commission a adopté une communication relative à un livre blanc sur la révision de l'architecture antifraude. Cette communication a lancé un processus de réflexion visant à réexaminer l'architecture antifraude globale de l'UE afin de mieux relever les défis et de combler les lacunes existantes en matière de protection des intérêts financiers de l'UE. Ce processus de révision sera également l'occasion d'améliorer et de rationaliser la coopération entre les différents acteurs, en s'appuyant sur les résultats des évaluations en cours des cadres juridiques applicables à certains acteurs concernés par l'architecture antifraude (par exemple, Eurojust, Europol, l'OLAF et le Parquet européen). 



La révision de l'AFA complète les travaux préparatoires du prochain cadre financier pluriannuel (CFP). L'objectif est de garantir que le prochain CFP puisse bénéficier d'une architecture antifraude renforcée et plus efficace afin de protéger les intérêts financiers de l'UE en optimisant l'utilisation des ressources (notamment en ce qui concerne la complémentarité et la coordination des fonctions et activités de tous les acteurs concernés).



Le chantier actuel : la révision de l'architecture antifraude de l'UE


L'architecture antifraude de l'UE (AFA) s’articule autour de plusieurs composantes ayant des missions et des rôles spécifiques dans la prévention, la détection et la lutte contre les activités frauduleuses portant atteinte aux intérêts financiers de l'UE. Il s'agit principalement : (i) des ordonnateurs délégués des institutions, organes et organismes de l'UE ; (ii) de l'OLAF ; (iii) du Parquet européen ; (iv) d'Eurojust ; (v) d'Europol ; (vi) de la Cour des comptes européenne ; et (vii) de la nouvelle Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux (ALBC).

Au niveau des États membres, une grande variété d'autorités et d'organismes jouent un rôle important dans la protection des intérêts financiers de l'UE, en collectant les recettes, en gérant et en contrôlant les fonds, en menant des enquêtes et des poursuites en matière de fraude et en recouvrant les fonds indûment versés. Par exemple, dans le domaine fiscal, le réseau des États membres Eurofisc a été créé en 2010 pour lutter contre la fraude transfrontalière à la TVA. Son mandat couvre le traitement conjoint et l'analyse des données, la coordination des actions de suivi et l'accès aux données douanières sur les importations exonérées de TVA.

L'architecture législative et organisationnelle complexe mise en place pour protéger les intérêts financiers de l'UE est le fruit d'un processus continu s'étalant sur plus de trois décennies. Le 16 juillet 2025, la Commission a lancé un processus de réflexion en vue de la révision de l'architecture de lutte contre la fraude.


Coopération entre les principaux acteurs au niveau de l'UE

La coopération entre les principaux acteurs de l'AFA de l'UE peut prendre différentes formes, en fonction de la nature des institutions et organismes concernés. Les principales formes de coopération sont : a) l'échange de connaissances et d'expertise ; b) la coordination ; c) la coordination opérationnelle et le soutien entre les organismes d'enquête.

La coordination et la coopération en matière d'enquêtes s'effectuent par l'intermédiaire des organes opérationnels de l'AFA. Le Parquet européen, par exemple, a indiqué qu'Europol avait fourni un soutien (échange d'informations, soutien analytique, expertise) à 83 demandes et qu'à la fin de 2024, 25 dossiers étaient en cours et bénéficiaient du soutien des bureaux nationaux d'Eurojust.

En 2024, l'OLAF a transmis 74 dossiers au Parquet européen pour l'ouverture d'une enquête pénale, et le Parquet européen en a ouvert 69 sur la base des informations fournies par l'OLAF. La même année, l'OLAF a conclu 26 enquêtes complémentaires et en a ouvert 17.

Les opérations douanières conjointes (ODC) sont des actions ciblées d'une durée limitée visant à lutter contre la fraude et la contrebande de marchandises sensibles dans des zones spécifiques à risque et/ou sur des routes commerciales identifiées. En 2024, sept ODC ont été coorganisées ou soutenues par l'OLAF, couvrant un large éventail de cibles telles que les médicaments contrefaits, l'alcool illicite et le commerce illicite, entre autres. 


Du point de vue de la Commission : mise en œuvre du plan d'action accompagnant sa stratégie antifraude

Tout au long de l'année 2024, la Commission a pris de nouvelles mesures pour renforcer sa gouvernance interne en matière de lutte contre la fraude. La stratégie antifraude de la Commission (CAFS) et le plan d'action qui l'accompagne constituent la base d'une coopération et d'une coordination étroites au sein de la Commission, et l'OLAF, en tant que service chef de file, suit et coordonne sa mise en œuvre.

Un réseau dédié de correspondants antifraude de l'OLAF des services de la Commission – le réseau de prévention et de détection de la fraude (FPDNet) – se réunit régulièrement en plénière et en sous-groupe pour échanger les meilleures pratiques et coordonner la mise en œuvre des actions du CAFS.



Les nouveaux acteurs de l'architecture antifraude de l'UE


L'Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (AMLA) est une agence décentralisée de l'UE qui coordonne les autorités nationales afin de garantir l'application correcte et cohérente des règles de l'UE. L'AMLA vise à transformer la surveillance de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme dans l'UE tout en renforçant la coopération entre les cellules de renseignement financier. 
Suite à l'adoption du règlement de l'AMLA le 31 mai 2024, l'autorité a été légalement créée le 26 juin 2024 et sera pleinement opérationnelle à compter du 1er janvier 2028.

La proposition actuelle visant à créer l'Autorité douanière de l'UE vise à adopter une approche numérique plus centralisée, notamment en matière de gestion des risques et de contrôles douaniers, afin de garantir une union douanière plus efficace, renforcée et résistante à la fraude, et de jouer un rôle clé dans la lutte contre la fraude aux frontières extérieures de l'UE. L'Autorité exploitera la plateforme de données douanières de l'UE, fournissant un pool de données en temps réel sur les flux douaniers et une capacité d'analyse de données renforcée qui permettra une meilleure gestion des risques et des contrôles douaniers aux frontières extérieures, en vue de renforcer la protection des intérêts financiers de l'UE. 


Des progrès à faire au niveau national

Dans ses rapports PIF 2022 et 2023, la Commission a recommandé aux États membres de renforcer leur gouvernance antifraude en créant ou en améliorant des réseaux dédiés impliquant tous les organismes nationaux ayant pour mandat la protection des intérêts financiers de l'UE.

D'après les informations recueillies auprès des États membres, la situation est restée relativement inchangée par rapport à celle rapportée dans le rapport PIF 2023, la plupart des États membres ne signalant aucune évolution significative. Parmi ceux qui ont introduit des changements, l'accent a été mis sur le renforcement du rôle et des capacités des services de coordination antifraude des États membres (AFCOS).

Un autre élément clé de cette gouvernance est l'adoption de stratégies spécifiques pour lutter contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l'UE. Au fil des ans, la Commission a soutenu l'adoption de stratégies nationales antifraude (NAFS), élaborées par les instances nationales clés de l'AFA.

En 2024, les 27 États membres ont déclaré avoir mis en place des stratégies antifraude pour protéger les intérêts financiers de l'UE, bien que leurs approches variaient considérablement.


ARACHNE, un exemple de de mesure visant à accélérer la numérisation de la lutte contre la fraude

22 États membres intègrent le système ARACHNE actuel à leurs stratégies antifraude. Les autorités de gestion et d'audit sont parmi les principaux acteurs de sa mise en œuvre. ARACHNE est largement utilisé dans l'ensemble des fonds de l'UE à des fins de prévention et de détection, grâce à la notation des risques permettant d'identifier les fraudes et les irrégularités. Bien que le système ait été adopté, une formation et un accompagnement complets restent nécessaires à son efficacité.

De nombreux États membres signalent des améliorations des processus avec ARACHNE.

Avec l'alimentation obligatoire de l'outil unique d'exploration de données et de notation des risques (Arachne+) à des fins d'audit et de contrôle à compter du 1er janvier 2028, les données collectées par les autorités de tous les États membres concernant tous les fonds seront intégrées dans un outil unique à l'échelle de l'UE. Cela renforcera les fonctions de contrôle et d'audit dans toute l'UE et aidera les autorités nationales et les acteurs de l'AFA à prévenir, détecter, corriger et suivre la fraude, la corruption et les irrégularités, y compris les conflits d'intérêts et les doubles financements.


Des fraudes et des irrégularités pour près de 2 milliards d’euros

Au total, 13 589 irrégularités frauduleuses et non frauduleuses, d'un montant de 1,84 milliard d'euros, ont été signalées en 2024. La Commission a constaté une légère diminution du nombre d'irrégularités signalées par rapport à 2023 (- 2,6 %), tandis que les montants irréguliers correspondants ont augmenté (+19,5 %). Les irrégularités signalées en 2024 étaient supérieures de 3,6 % à la moyenne des cinq dernières années, tandis que leurs montants financiers correspondants étaient supérieurs de 12 %.

Le nombre d'irrégularités frauduleuses signalées par les autorités nationales à la Commission est resté relativement stable entre 2020 et 2023, mais a augmenté de manière significative en 2024 pour atteindre 1364 (+ 26 % par rapport à 2023). Ce nombre représente 10 % du nombre total d'irrégularités signalées. Par rapport à la moyenne des cinq dernières années, le nombre d'irrégularités frauduleuses signalées était supérieur de 19 % et les montants correspondants de 56 %.

Le nombre et l'impact financier des irrégularités non frauduleuses signalées ont suivi une tendance à la hausse de 2020 à 2023, conformément aux tendances attendues liées au cycle des programmes de dépenses. L'année 2024 a connu une stabilisation, avec 12 225 irrégularités non frauduleuses signalées (- 5 % par rapport à 2023), portant sur un montant financier de 1,29 milliard d'euros (-1,4 % par rapport à 2023). Par rapport à la moyenne des cinq dernières années, le nombre d'irrégularités non frauduleuses signalées en 2024 était supérieur de 2 %, tandis que leur valeur financière était stable. 


Les marchés publics, une activité exposée au risque de fraude

Le Parquet européen a indiqué 385 infractions ayant fait l'objet d'enquêtes concernant des organisations criminelles axées sur le PIF dans le cadre de ses enquêtes actives jusqu'à la fin de 2024.

En ce qui concerne les affaires de corruption, le Parquet européen a signalé 191 infractions ayant fait l'objet d'une enquête (101) jusqu'à la fin de 2024. De 2020 à 2024, 56 cas ont été signalés à la Commission par sept pays. Une analyse basée sur les données de 2007 à 2023 suggère un signalement insuffisant des irrégularités frauduleuses liées à la corruption. Lorsqu'elles ont été signalées, la corruption concernait principalement les marchés publics (procédures simplifiées/restreintes et procédures ouvertes), y compris les cas impliquant des gestionnaires ou des experts externes. Cela confirme que les marchés publics sont une activité exposée au risque de fraude, de sorte que les irrégularités dans ce domaine doivent faire l'objet d'une enquête en conséquence. Environ 20 % de ces cas de corruption ont fait suite à des contrôles lancés en réponse à des informations provenant d'informateurs ou à des informations publiées dans les médias.

Au cours de la même période, 418 cas liés à des conflits d'intérêts ont été signalés (92 % concernaient la cohésion, 3 % l'agriculture et 3 % la préadhésion), portant sur un montant d'environ 159 millions d'euros. 


Des enquêtes diligentées par le Parquet européen pour 13 milliards d’euros de préjudice

En 2024, le Parquet européen (EPPO) a ouvert 1 504 enquêtes correspondant à des dommages estimés à 13,07 milliards d'euros. À la fin de 2024, le Parquet européen comptait é666 enquêtes actives impliquant des dommages estimés à 24,80 milliards d'euros. Ces dernières sont réparties:
  • 488 enquêtes actives sur la fraude à la TVA,
  • 252 pour fraude douanière (dommages totaux estimés à 886,9 millions d'euros)
  • 807 dépenses (dommages totaux estimés à 9,4 milliards d’euros), dont 279 liées à la Facilité pour la reprise et la résilience (pour un dommage total estimé à 2,7 milliards d’euros).

Parmi les typologies identifiées dans ces enquêtes actives, 2 105 infractions (33,2 % du total) concernent des fraudes aux dépenses hors marchés publics, 591 (9,3 %) à des fraudes aux dépenses de marchés publics, 385 à des organisations criminelles axées sur la criminalité PIF (6 %), 480 (7,6 %) à des fraudes aux recettes hors TVA, 1 287 (20,3 %) à des fraudes aux recettes TVA, 1 91 (3 %) à la corruption, 115 (1,8 %) à des détournements de fonds, 380 (6 %) à du blanchiment d'argent et 808 (12,7 %) à des infractions inextricablement liées. 


Plus de 200 enquêtes ouvertes par l'OLAF


En 2024, l'OLAF a conclu 246 enquêtes. Il a émis 301 recommandations, dont 188 financières, pour un montant total recommandé de recouvrement de 871,5 millions d'euros et 43,5 millions d'euros ont été évités de dépenses indues. Au cours de la même période, 230 nouvelles enquêtes ont été ouvertes.

À l'issue de ses enquêtes, l'OLAF peut adresser des recommandations financières aux États membres et aux institutions, organes et organismes de l'UE. Ces recommandations précisent les montants réels des dépenses de l'UE irrégulièrement dépensées et des recettes de l'UE irrégulièrement soustraites au budget de l'UE, dont l'OLAF, sur la base des résultats de ses enquêtes, recommande le recouvrement. Si les décaissements prévus n'ont pas encore eu lieu, l'OLAF recommande de ne pas procéder aux dépenses irrégulières.

Au cours de la période 2022-2024, les enquêtes de l’OLAF ont permis de recouvrer 4,5 milliards d’euros et d’éviter plus de 800 millions d’euros de dépenses irrégulières.


Un Parlement européen satisfait du travail de l’OLAF et du Parquet européen

Chaque année, le Parlement européen adopte une proposition de résolution sur la protection des intérêts financiers de l'UE et la lutte contre la fraude, en s'appuyant sur l'analyse du dernier rapport PIF. La résolution la plus récente, fondée sur un rapport adopté par la commission du contrôle budgétaire (CONT), a été adoptée par la plénière du Parlement le 6 mai 2025. Il s'agit d'un document clé (ancré dans la procédure de décharge budgétaire) par lequel l'autorité budgétaire fournit son principal discours politique en matière de lutte contre la fraude. Dans ce rapport, le Parlement salue les résultats opérationnels obtenus par l'OLAF et le Parquet européen et estime que les deux organismes doivent renforcer leur coopération. Il souligne également l'importance de mesurer les résultats des enquêtes de l'OLAF et du Parquet européen en termes de recouvrement des sommes indûment versées et de quantification des sommes évitées.


synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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mardi 23 septembre 2025

Réserves stratégiques : l’UE se dote d’une stratégie de constitution de stocks à l’échelle de l’UE

 




Le constat est sans appel : la mobilisation des stocks pour gérer la crise est loin d’être efficace. L’absence de masques lors de la crise Covid-19 en a été l’illustration. Les raisons sont nombreuses : une approche purement nationale des constitutions des stocks et l’absence de coordination entre Etats membres, un défaut de vision tous-risques ou encore une inclusion insuffisante du secteur privé. Face à cela, une stratégie de constitution de stocks à l’échelle de l’UE a été présentée. 
Sept domaines prioritaires sont identifiés, en particulier une meilleure coopération civile-militaire et le développement de la prospective, de l’anticipation et de la planification strategique. Surtout, certaines mesures sont à noter comme la mise en place d’un réseau européen de constitution de stocks, la promotion de mécanismes d’acquisitions centralisées et/ou conjointes, le renforcement de rescEU en tant que réserve de capacités de réaction à l’échelle de l’UE, l’alignement des sites de stockage sur la mobilité militaire de l’UE, ou bien encore l’étude des possibilités d’acquisitions conjointes et d’entreposage partagé dans le monde entier. 


De quoi parle-t-on ?

Cette stratégie a pour objectif général d’améliorer l’accès aux biens essentiels en toutes circonstances. Elle permettra d’améliorer l’interopérabilité des systèmes de constitution de stocks tant au niveau national qu’au niveau de l’UE tout au long du cycle de constitution des stocks (planification, achat, gestion et déploiement des stocks). Elle vise à garantir la préparation matérielle, c’est-à-dire l’état de préparation, la disponibilité et l’accessibilité des biens essentiels dans le cadre d’une réaction efficace aux crises et aux conflits. 
Dans le même temps, elle soutient aussi l’autonomie stratégique de l’UE, en réduisant les dépendances et les vulnérabilités et en renforçant la production de biens essentiels dans l’UE. 


Pourquoi cette stratégie ?


Aujourd’hui, le paysage des risques auquel l’UE est confrontée est de plus en plus hostile et complexe, marqué par des tensions géopolitiques croissantes, des conflits, une augmentation des effets du changement climatique et la dégradation de l’environnement, ainsi que par les cybermenaces et les menaces hybrides résultant de l’activité accrue des hacktivistes, des cybercriminels et des groupes instrumentalisés par des États. 
En outre, les défis géopolitiques sont souvent liés entre eux et ont une incidence sur les relations de l’UE avec différentes parties du monde, y compris pour ce qui est des chaînes d’approvisionnement. Les répercussions potentielles des risques augmentent constamment et ont, au fil du temps, des conséquences et des effets indirects de plus en plus importants, ce qui se traduit à terme par une menace globale plus élevée pour la sécurité et la disponibilité des approvisionnements essentiels. 


Quel est le problème ?

L’approche actuelle en matière de constitution de stocks reste fragmentée et l’expérience a montré que le cadre de l’UE comporte un certain nombre de lacunes importantes et étroitement liées. 
Une compréhension commune limitée des biens essentiels nécessaires à la préparation aux crises dans un contexte d’évolution rapide du paysage des risques, qui entrave la coopération intersectorielle et transfrontière. 
Un partage d’informations et une coordination limités entre l’UE et les États membres, ainsi qu’entre les secteurs civil et militaire. En conséquence, il manque une réelle vue d’ensemble des efforts de constitution de stocks déployés par les États membres dans l’UE, ce qui se traduit par une utilisation non optimale des ressources, des capacités et de l’expertise disponibles. 
Un potentiel sous-exploité de coopération avec le secteur privé par-delà les secteurs et les frontières. 
Des cadres nationaux ou sectoriels qui ne reflètent pas suffisamment le rôle que les outils d’action extérieure et de coopération peuvent jouer dans le renforcement de la préparation matérielle au niveau national et de l’UE, par exemple en ce qui concerne la sécurité des chaînes d’approvisionnement.



D’où vient-on et où va-t-on ?

À la suite des recommandations formulées dans le rapport Niinistö, la stratégie pour une union de la préparation prévoit une stratégie de constitution de stocks à l’échelle de l’UE. Cette stratégie de constitution de stocks à l’échelle de l’UE adopte une approche globale de la constitution de stocks et porte sur l’ensemble du cycle, de l’anticipation au suivi des chaînes d’approvisionnement, en passant par des mesures visant à renforcer la sécurité de l’approvisionnement, la gestion de la constitution de stocks et le déploiement.

Ces dernières années, l’UE a adopté plusieurs initiatives, stratégies et actes législatifs pertinents pour renforcer l’autonomie stratégique, la sécurité intérieure et économique, la compétitivité, la défense et la résilience, ainsi que pour remédier aux vulnérabilités et aux dépendances de la chaîne d’approvisionnement.

Tels que : 
  • la stratégie européenne de sécurité intérieure (ProtectEU),
  • la stratégie en matière de sécurité économique,
  • le livre blanc sur l’avenir de la défense européenne, la boussole pour la compétitivité de l’UE,
  • la stratégie européenne pour la résilience dans le domaine de l’eau,
  • le plan d’action pour une économie circulaire,
  • le règlement sur les situations d’urgence dans le marché intérieur et la résilience du marché intérieur (SURMI),
  • le règlement sur les matières premières critiques,
  • le mécanisme de protection civile de l’Union (MPCU),
  • la directive sur les stocks de pétrole (qui fait actuellement l’objet d’une révision),
  • le règlement sur le stockage de gaz,
  • le futur acte législatif sur les médicaments critiques,
  • la stratégie sur les contre-mesures médicales.

Où va-t-on ?


À l’avenir, la Commission entamera avec les États membres, le SEAE, le Parlement européen et les parties prenantes un dialogue aux fins de l’examen et de la mise en œuvre des actions initiales prévues dans la présente stratégie. Le réseau de constitution de stocks de l’UE et les axes de travail de la task‑force en matière de préparation permettront d’approfondir l’analyse des lacunes et des besoins, d’orienter la mise en œuvre des mesures et de recenser les nouveaux besoins d’action. En parallèle, la stratégie de constitution de stocks de l’UE viendra compléter les initiatives sectorielles en matière de préparation. En 2026, la Commission fera le point sur la mise en œuvre de la présente stratégie.


Quelle logique sous-tend la stratégie ?

La stratégie s’inspirera des principes sous-jacents de solidarité, de transparence, de responsabilité et d’accès équitable aux ressources dans l’ensemble de l’UE, qui sont essentiels pour garantir l’égalité de tous, en particulier dans les situations de crise.

Dans le sillage de la stratégie pour une union de la préparation, la stratégie de constitution de stocks reflète un changement d’état d’esprit se traduisant par l’abandon d’une approche réactive et sectorielle de la gestion des crises au profit d’une approche proactive, souple et mieux intégrée en matière de préparation.


Quels principes sous-tendent la stratégie ? 


La présente stratégie s’appuie sur les cadres sectoriels existants de l’UE et suit les principes de la stratégie pour une union de la préparation: 
  • une approche «tous risques»,
  • une approche pangouvernementale, qui rassemble toutes les parties prenantes concernées, à tous les niveaux de gouvernance (local, régional, national et européen,
  • une approche englobant l’ensemble de la société, qui favorise une culture inclusive de la préparation matérielle associant tous les acteurs concernés à la sécurité de l’approvisionnement, en particulier le secteur privé.


Axe 1 de la stratégie : améliorer la coordination entre les Etats membres et avec l’UE


Actions clés:
  • la Commission mettra en place un réseau européen de constitution de stocks avec les États membres. Ce réseau servira d’enceinte de discussion et aura un rôle consultatif. Le réseau devrait formuler des recommandations sur des questions telles que les exigences en matière de volume, les systèmes de supervision connexes et la coordination des exigences minimales. 
  • compte tenu des systèmes sectoriels existants, la Commission étudiera la faisabilité de la mise en place d’une plateforme pour des échanges de données sécurisés et détaillés entre l’UE et les États membres sur les stocks d’urgence, en s’appuyant sur les capacités du centre de coordination de la réaction d’urgence. 
  • la Commission continuera à promouvoir des mécanismes d’acquisitions centralisées et/ou conjointes dans tous les secteurs, en s’appuyant sur des modèles tels que l’accord de passation de marchés pour les contre-mesures médicales.


Axe 2 de la stratégie : développer la prospective, l’anticipation et la planification strategique

Actions clés: 
  • la Commission recensera les mécanismes sectoriels de suivi des chaînes d’approvisionnement et intégrera les évaluations des risques pour la sécurité de l’approvisionnement et des vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement dans l’évaluation globale des risques et des menaces au niveau de l’UE (action clé dans le cadre de la stratégie pour une union de la préparation). Le futur pôle européen de coordination des crises anticipera et surveillera les risques liés aux crises transsectorielles.


Axe 3 de la stratégie : combler les lacunes grace à la constitution de stocks stratégiques a l’échelle de l’UE

Actions clés:
  • la Commission renforcera rescEU en tant que réserve de capacités de réaction à l’échelle de l’UE. RescEU sera élargi pour couvrir davantage de capacités et sur la base d’une évaluation des lacunes,
  • la Commission veillera à la reconstitution des stocks rescEU après déploiement, en adoptant une approche proactive du développement des capacités de rescEU.


Axe 4 de la stratégie : renforcer une infrastructure de transport et de logistique solide et interoperable

Actions clés: 
  • la Commission facilitera la coopération entre le réseau des points de contact nationaux pour les transports, qui a vocation à améliorer la coordination dans le secteur des transports, et le réseau de constitution de stocks de l’UE.
  • la Commission s’emploiera à promouvoir la préparation aux crises conformément au plan d’urgence de l’UE pour les transports,
  • la Commission et le Service européen pour l’action extérieure (SEAE), ainsi que les États membres, s’efforceront d’améliorer l’alignement des sites de stockage sur la mobilité militaire de l’UE.

Axe 5 de la stratégie : améliorer la cooperation civile-militaire

Actions clés:
  • en collaboration avec le SEAE, la Commission facilitera les discussions au sein du réseau de constitution de stocks de l’UE pour échanger les bonnes pratiques en matière de coopération civile‑militaire, en particulier pour examiner la manière dont les stocks civils pourraient tenir compte des besoins et des exigences militaires.
  • en collaboration avec le SEAE, la Commission étendra la coopération en matière de personnel qui existe avec l’OTAN, en particulier dans le cadre du dialogue structuré sur la résilience, aux fins de la préparation matérielle et de la constitution de stocks.

Axe 6 de la stratégie : promouvoir la coopération public-privé

Actions clés:
  • Le réseau de constitution de stocks de l’UE recensera et cartographiera les bonnes pratiques, les solutions innovantes et les mesures d’incitation qui encourageront les entreprises à contribuer au renforcement de la résilience et à l’approvisionnement en biens essentiels. 
  • Un volet de travail spécifique de la task‑force public‑privé en matière de préparation prévue dans le cadre de la stratégie pour une union de la préparation consistera à discuter des critères à utiliser pour cartographier les principales entreprises européennes participant à la production de biens essentiels.



Axe 7 de la stratégie : favoriser la coopération dans le cadre de l’action extérieure

Actions clés:
  • L’Union européenne et ses États membres devraient renforcer la collaboration en matière de préparation aux crises, par exemple dans le domaine des urgences sanitaires, avec les pays voisins, les pays partenaires qui partagent les mêmes valeurs et les organisations internationales.
  • La Commission collaborera avec les États membres en vue d’une coordination plus étroite des stocks et étudiera les possibilités d’acquisitions conjointes et d’entreposage partagé dans le monde entier, en coopération et concertation avec les autorités régionales chargées de la réaction aux catastrophes afin de faciliter l’acheminement rapide et optimal de produits humanitaires essentiels.



synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr



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