C’est écrit noir sur blanc : dans ses récentes conclusions sur la lutte contre la Criminalité environnementale. Le Conseil de l’UE invite les autres Etats membres à tenir compte des bonnes pratiques existantes, telles que le commandement pour l'environnement et la santé (CESAN) de la Gendarmerie.
Ace sujet, un constat doit être tiré : si la criminalité environnementale constitue l'une des priorités de l'UE pour la lutte contre la grande criminalité organisée, elle ne fait pas l'objet du même niveau de mobilisation de la part de toutes les parties prenantes que d'autres domaines prioritaires de la criminalité.
Ces conclusions listent donc un ensemble de mesures à prendre. Les ministres sont lucides à ce sujet : il est peu probable que l'ampleur de la menace diminue à moyen terme, en particulier aussi longtemps que les criminels pourront continuer d'accéder à un marché vulnérable et profiter d'occasions de s'enrichir facilement.
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D’ou vient-on ?
Le 8 décembre 2016, le Conseil a adopté des conclusions sur la lutte contre la criminalité environnementale.
Dans la stratégie de l'UE pour l'union de la sécurité qu'elle a présentée en juillet 2020, la Commission a qualifié la criminalité environnementale d'activité illégale générant des profits croissants et exploitée par des réseaux criminels, qui nécessite de nouvelles actions,
En avril 2021, la stratégie de l'UE visant à lutter contre la criminalité organisée (2021-2025) a mis l'accent sur les effets néfastes de la criminalité environnementale sur la biodiversité, la santé et la cohésion sociale au sein de l'UE et dans les pays tiers, et a préconisé un renforcement de la capacité répressive à l'échelle nationale et de l'UE.
En mai 2021, le Conseil a adopté des conclusions fixant les priorités de l'UE pour la lutte contre la grande criminalité organisée pour l'EMPACT 2022-2025. L'une de ces priorités consiste à déstabiliser les réseaux criminels impliqués dans toutes les formes de criminalité environnementale.
Le 9 novembre 2022, la Commission a adopté le plan d'action révisé de l'UE contre le trafic des espèces sauvages, qui expose des mesures concrètes visant à lutter contre cette forme de criminalité.
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Quel est le bilan de l’action menée ?
La nouvelle directive relative à la criminalité environnementale, entrée en vigueur en mai 2024, adopte une approche globale rigoureuse et détaillée de la criminalité environnementale. Elle élargit la liste des infractions à ériger en infractions pénales dans le droit national et comprend des dispositions sur les sanctions à l'encontre des personnes physiques et morales et sur le renforcement de la chaîne répressive, y compris les mécanismes de coopération au sein des États membres et entre ceux-ci.
Une nouvelle convention du Conseil de l'Europe sur la protection de l'environnement par le droit pénal devrait être finalisée au quatrième trimestre de 2024 et ouverte à la signature au premier trimestre de 2025.
Le nouveau règlement sur les transferts de déchets contient de nouvelles dispositions importantes en matière de transferts illicites de déchets, y compris en ce qui concerne les inspections, les sanctions et la coopération.
Une action purement européenne ?
La dimension transnationale de la criminalité environnementale commise par les réseaux criminels nécessite le renforcement de la coopération des institutions de l'UE et des États membres, ainsi que des pays tiers, des organisations internationales et d'autres partenaires publics et privés.
Divers réseaux européens ont mené des travaux dans le domaine de la lutte contre la criminalité environnementale en les assortissant d'objectifs stratégiques ou opérationnels, notamment:
- le réseau européen de lutte contre la criminalité environnementale (EnviCrimeNet),
- le réseau européen des procureurs pour l'environnement (REPE),
- le réseau de l'Union européenne pour la mise en œuvre de la législation communautaire environnementale et pour le contrôle de son application (IMPEL)
- le forum des juges de l'Union européenne pour l'environnement (UEFJE).
Il faut également mentionner des réseaux régionaux et internationaux comme le réseau des procureurs pour les délits environnementaux dans la région de la mer Baltique (ENPRO) et le réseau JAGUAR, qui est également important en tant que plateforme de coopération policière entre les pays d'Amérique latine et les États membres de l'UE.
Un exemple de difficulté rencontrée
Les enquêtes relatives aux crimes environnementaux nécessitent parfois d'être menées de façon approfondie en recourant à des méthodes scientifiques, ainsi qu'à l'échantillonnage et l'analyse de substances (par exemple, des produits chimiques ou des liquides colorés) afin d'obtenir des preuves contre les auteurs de tels crimes; il s'agit là d'un domaine extrêmement important et spécialisé.
Des scientifiques et des experts techniques spécialisés sont nécessaires pour recueillir ces preuves.
Or. les États membres n'ont pas toujours accès à des moyens d'enquête spéciaux tels que la surveillance et les outils d'enquête discrets (renseignement humain) aux fins de la lutte contre la criminalité environnementale grave ou organisée, et ne disposent dans une large mesure que de moyens d'enquête standard.
Cette situation a pour effet de limiter l'efficacité de la lutte contre les réseaux criminels et d'entraver la coopération transfrontière, par exemple lorsque la surveillance ordonnée dans un État membre ne peut être poursuivie ou complétée dans un autre État membre concerné.
Premier axe d’action : favoriser la détection et la collecte de données
Le Conseil invite les États membres à:
- s'efforcer d'adopter rapidement des stratégies nationales et de mettre en place des mécanismes nationaux efficaces de coordination et de partage des données, dotés des capacités, principalement en matière de collecte de renseignement et de statistiques;
- encourager le développement et l'adoption d'outils numériques et innovants pour permettre aux services d'enquête de travailler plus rapidement et efficacement.
Dans ce contexte, les autorités des États membres sont encouragées à prendre note des projets de recherche PERIVALLON et EMERITUS en cours, qui sont financés par l'UE au titre d'Horizon Europe et visent à mettre au point des outils permettant de dresser un tableau du renseignement complet et de meilleure qualité en matière de criminalité environnementale organisée et à concevoir des technologies de détection fondées sur le renseignement géospatial, la télédétection, la surveillance en ligne, l'analyse, l'évaluation des risques et les technologies d'analyse prédictive à l'appui des capacités d'enquête pour la lutte contre la criminalité environnementale.
Deuxième axe d’action : promouvoir la formation et la spécialisation
Le Conseil invite les États membres à
- promouvoir la spécialisation volontaire et favoriser l'efficacité des enquêtes sur les infractions dans ce domaine, envisager de mettre en place des procédures appropriées afin de mettre ces capacités spécialisées à disposition en temps utile pour aider les autorités répressives et judiciaires.
- faciliter le renforcement des capacités et la spécialisation du personnel concerné des organismes intervenant dans ces mécanismes, y compris en intégrant la formation sur la criminalité environnementale dans les programmes nationaux des académies et écoles de formation concernées.
Le Conseil invite aussi le collège européen de police (CEPOL) à continuer de soutenir la communauté des services répressifs de l'UE en s'appuyant sur les priorités stratégiques en matière de formation définies dans le cadre de l'évaluation 2022-2025 des besoins stratégiques de formation dans l'UE (EU-STNA), ainsi que sur les résultats de l'évaluation des besoins de formation opérationnelle (OTNA) concernant la criminalité environnementale.
Troisième axe d’action : renforcer Eurojust et le Réseau judiciaire européen (RJE)
Le Conseil invite les États membres à:
- œuvrer, pour que les possibilités offertes par les équipes communes d'enquête organisées avec le concours d'Eurojust et par le Réseau judiciaire européen (RJE) soient pleinement mises à profit;
- recourir à l'aide d'Eurojust pour faciliter et accélérer l'échange transfrontière d'informations et la coopération au niveau judiciaire, pour élaborer des stratégies communes en matière d'enquêtes et de poursuites.
Quatrième axe d’action : privilégier la plateforme pluridisciplinaire européenne contre les menaces criminelles (EMPACT)
Il convient de saluer les initiatives prises ces dernières années pour faciliter la coopération transfrontière en matière de lutte contre la criminalité environnementale. La criminalité environnementale étant devenue une priorité de l'EMPACT (2018-2021; 2022-2025), Europol a mis en place un projet d'analyse consacré à cette question et a soutenu les États membres dans leurs enquêtes pénales concernant tous les phénomènes de criminalité environnementale. Europol est également co-chef de file des plans d'action opérationnels en la matière de l'EMPACT et produit des rapports sur la criminalité environnementale.
Dans ce cadre de l'EMPACT, le Conseil invite les États membres à dialoguer et œuvrer, chaque fois qu'il y a lieu, avec les États membres et les partenaires non membres de l'UE dans le cadre d'une coopération internationale en matière répressive à caractère véritablement opérationnel.
Cinquième axe d’action : développer une action multi-acteurs
Le Conseil invite les États membres à:
- dans le cadre de la lutte contre la criminalité environnementale transfrontière, favoriser une coopération efficace entre les autorités douanières, qui jouent un rôle crucial dans la détection des envois enfreignant les règles environnementales, et les autorités environnementales en cas de soupçon, pour mettre au jour les activités illicites, enquêter sur les flux;
- cartographier les menaces et identifier les menaces prioritaires sur la base d'un tableau crédible, complet et actualisé de la situation, ce qui exige un large partage d'informations et des travaux d'analyse appropriés entre les États membres et avec Europol, l'OLAF et d'autres organismes tels qu'Interpol, l'Organisation mondiale des douanes (OMD), les secrétariats de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) et des conventions de Bâle, de Rotterdam et de Stockholm.
Le Conseil invite Europol à renforcer ses liens avec les groupes de travail actifs et la task force du comité d'Interpol sur la criminalité environnementale, en particulier dans le domaine de la lutte contre les exportations et les importations illégales de déchets, le trafic d'espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, la falsification de documents utilisés dans le cadre du commerce légal des marchandises concernées et avec les travaux de l'OMD.
Sixième axe d’action : s’attaquer encore davantage à l’argent du crime
Le Conseil invite les États membres à:
- systématiser les enquêtes financières pour identifier les circuits empruntés par les fonds illicites et envisager la possibilité d'utiliser les avoirs confisqués, lorsque cela est possible et approprié, à des fins d'intérêt public ou à des fins sociales, de manière par exemple à contribuer aux mesures de conservation;
- intégrer des spécialistes des enquêtes numériques aux unités répressives spécialisées consacrées à la lutte contre la criminalité environnementale, le cas échéant.
Septième axe d’action : s’appuyer sur la société civile
Des synergies doivent également être développées avec les associations environnementales concernées, qui sont souvent en première ligne en ce qui concerne les dommages environnementaux, et avec la société civile. Le grand public devrait être davantage sensibilisé à son rôle et à son potentiel dans la lutte contre la criminalité environnementale et encouragé à signaler les crimes contre l'environnement aux autorités compétentes.
Le Conseil invite les États membres à déployer des efforts pour mettre en place, en partenariat avec la société civile et le secteur privé, des campagnes d'information ciblées visant à sensibiliser le public, à encourager les citoyens à signaler les activités illégales auxquelles ils sont confrontés et à apprendre aux enfants à donner la priorité à la sécurité de leur environnement afin de le protéger.
Huitième axe d’action : dynamiser les réseaux
Le Conseil invite la Commission européenne à:
- promouvoir les bonnes pratiques en matière de coordination nationale et favoriser l'utilisation des plateformes existantes d'Interpol, des quatre réseaux (IMPEL, REPE, EUFJE, EnviCrimeNet) et notamment de la plateforme d'experts Europol ainsi qu'Eurojust au niveau des parquets afin de renforcer l'échange de ces bonnes pratiques.
- poursuivre et renforcer encore sa coopération avec les réseaux existants de professionnels de l'application des lois environnementale, tels que IMPEL (inspecteurs), REPE (procureurs), EUFJE (juges) et EnviCrimeNet (police et autres services répressifs), et promouvoir les résultats de leurs travaux.
Le Conseil invite EnviCrimeNet à:
- Assurer le suivi des projets, des initiatives de l'UE et de la recherche dans le domaine de la lutte contre la criminalité environnementale, en coordination avec les activités développées dans le cadre des plans d'action opérationnels de l'EMPACT.
- Mettre davantage l'accent sur le rôle des activités en ligne et sur les aspects liés aux enquêtes financières.
Le Conseil invite le réseau Jaguar à soutenir le Conseil dans la mise en œuvre de ses conclusions sur les relations entre l'UE et l'Amérique latine et les Caraïbes adoptées le 21 novembre 2023 dans le domaine de la lutte contre la criminalité environnementale.
synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr
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