Désormais, il ne sera plus nécessaire d’aller au consulat pour déposer une demande de visa enfin d’entrer dans l’Union. C'est ce qui ressort d'une nouvelle proposition de règlement. Les ressortissants de la liste des pays soumis à visas pourront le faire via une procédure numérisée. L’idée ? Créer une plate-forme numérique commune à tous les Etats membres. Le but? Assurer un gain de confort, en réduisant les coûts et la charge administrative pour les Etats membres, tout en renforçant la sécurité de l’espace Schengen.
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Pourquoi cette réforme ?
Les ressortissants de 102 pays tiers sont actuellement tenus de détenir un visa valide pour franchir les frontières extérieures de l’Union. Les visas sont délivrés par les États membres par l’intermédiaire d’un réseau de consulats dans les pays tiers
Depuis l’entrée en vigueur du code des visas en 2010 et la mise en service du système d’information sur les visas (VIS) en 2011, l’environnement dans lequel s’applique la politique des visas a radicalement changé :
- d’une part, les défis en matière de migration et de sécurité se sont accrus ces dernières années;
- d’autre part, les évolutions technologiques importantes offrent de nouvelles possibilités de rendre la procédure de demande de visa Schengen plus fluide, tant pour les voyageurs que pour les consulats.
Quel est l’enjeu ?
Alors que le traitement des visas est déjà partiellement numérisé, les demandes et les décisions étant enregistrées dans le VIS, deux étapes importantes continuent de se faire sur papier: la procédure de demande de visa et la vignette-visa.
Ces deux étapes constituent une charge pour toutes les parties intéressées, des autorités publiques nationales centrales, c’est-à-dire les ministères de l’intérieur et des affaires étrangères, aux consulats et aux demandeurs. Les États membres en sont conscients et un certain nombre d’entre eux ont partiellement numérisé leur procédure de demande de visa pour la rendre plus efficace et plus simple d’utilisation.
- Lire sur securiteinterieure.fr : Le "pacte des migrations et d’asile" : combler des faiblesses structurelles majeures et apporter des solutions durables
La pandémie de COVID-19, qui a entraîné le ralentissement des opérations de délivrance de visas Schengen dans le monde entier, notamment en raison de la difficulté à accueillir les demandeurs de visa dans les consulats et les centres de dépôt des demandes, a incité les États membres à demander à la Commission d’accélérer les travaux de numérisation des procédures de visa.
D’où vient-on ?
Au niveau de l’Union, en 2017, la présidence estonienne du Conseil a ouvert la discussion au sein du groupe «Visas» du Conseil sur les options permettant d’améliorer la procédure de visa actuelle avec une demande de visa en ligne et un visa numérique . Cet élan politique, ainsi que les modifications actuelles et futures de la législation, à savoir :
- le code des visas révisé,
- la révision du VIS,
- le système d’entrée/de sortie (EES)
- le système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages (ETIAS) ,
Cet élan politique ainsi que ces modifications actuelles et futures de la législation ont conduit la Commission à publier, le 14 mars 2018, une communication 10 sur l’adaptation de la politique commune de visas aux nouveaux défis et à lancer une réflexion sur l’opportunité de s’orienter vers une numérisation des visas.
La communication de la Commission de mars 2018 sur la politique des visas a repris l’idée des «visas numériques».
Et où va-ton ?
Comme annoncé dans cette communication de la Commission, une étude de faisabilité sur la numérisation des procédures de visa a été réalisée en 2019. En outre, un projet visant à développer un prototype de plateforme de l’UE a également été mené par l’Agence de l’Union européenne eu-LISA» en 2020-2021, en étroite coordination avec la Commission et les États membres.
Le nouveau pacte sur la migration et l’asile proposé par la Commission le 23 septembre 2020 a fixé l’objectif de la numérisation intégrale de la procédure de délivrance des visas d’ici à 2025, avec un visa numérique et la possibilité d’introduire les demandes de visa en ligne.
La nécessité d’une approche commune
En instaurant la possibilité pour les demandeurs de visa de signer par voie électronique les formulaires de demande, le code des visas modifié a créé la possibilité d’une soumission et d’un traitement numériques des demandes de visa; cependant, la plupart des États membres n’ont numérisé que certaines parties de la procédure de demande de visa de court séjour et s’appuient encore largement sur des procédures sur support papier. Par conséquent, le degré de numérisation ainsi que la procédure de demande de visa diffèrent selon les États membres.
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La fragmentation actuelle des pratiques nationales de gestion de la procédure de demande a une incidence négative sur le fonctionnement de la politique des visas de l’Union et sur la perception de l’Union européenne comme une entité géographique unifiée, et rend la procédure de demande de visa pesante pour les demandeurs de visa.
Lors de la révision du code des visas de l’Union en 2019, le Parlement européen et le Conseil ont explicitement indiqué qu’ils souhaitaient mettre au point, dans le futur, une solution commune afin de permettre l’introduction en ligne des demandes de visa Schengen, en tirant pleinement parti des évolutions récentes sur le plan juridique et technologique.
Le projet : une Plateforme de l’UE pour les demandes de visa
Le projet prévoit le développement obligatoire d’une plateforme de l’UE pour les demandes de visa numérique pour les visas de court séjour et rend obligatoire l’utilisation du visa numérique.
Il s’agit de renforcer la sécurité de l’espace Schengen. En outre, la numérisation des procédures de visa est conforme aux évolutions récentes de la législation relative au paysage informatique de la gestion des frontières, ce qui contribue à renforcer la sécurité de l’espace Schengen.
Une période de transition serait prévue pour permettre aux États membres qui utilisent ou développent leurs propres plateformes nationales de demande de visa d’abandonner progressivement leurs solutions nationales et de rejoindre la plateforme de l’UE pour les demandes de visa, réduisant ainsi au minimum les éventuels coûts d’investissement passés.
En outre, la plateforme de l’UE pour les demandes de visa reposerait sur un stockage décentralisé des demandes dans les systèmes nationaux des États membres. Par conséquent, tous les États membres qui ont déjà partiellement numérisé leur système de demande (par exemple, le formulaire électronique) devraient pouvoir réutiliser l’interface utilisée pour transmettre les données du formulaire électronique au système national de délivrance des visas utilisé aux fins du traitement des demandes.
Quel est le coût ?
Le coût de la mise en place de la plateforme de l’UE pour les demandes de visa se situera entre 33,8 millions d’euros et 41,2 millions d’euros (comprenant les coûts du service géré et les adaptations nécessaires au VIS). Dès la création de ce service géré, les frais d’exploitation et de maintenance correspondront à un coût annuel compris entre 10,5 millions d’euros et 12,8 millions d’euros, y compris 10 membres du personnel pour l’eu-LISA.
En ce qui concerne l’incidence sur les États membres, l’analyse d’impact estime ce coût à un montant variant entre 270 000 euros et 330 000 euros pour chacun d’eux. Quant à l’investissement nécessaire, il est estimé entre 2,5 millions et 3 millions d’euros pur chacun d’eux.
Les principales raisons à l’idée d’une plate-forme numérique
- Première raison : étant donné que les règles actuelles relatives aux visas de court séjour au niveau de l’Union ne prévoient aucune obligation de numérisation pour les États membres, les procédures sur support papier actuelles génèrent des coûts de gestion élevés pour les États membres liés au traitement des demandes sur papier.
- Deuxième raison : la vignette-visa physique est sujette à la falsification et à la fraude (par exemple, le faux et la contrefaçon) et peut être volée, ce qui constitue un risque pour la sécurité. La vignette-visa a été introduite en 1995 et a été régulièrement mise à jour pour améliorer ses caractéristiques de sécurité depuis lors.
L’innovation la plus récente est l’ajout d’un code-barres 2D signé sur la vignette-visa, qui entrera en vigueur le 1er mai 2022. Néanmoins, la vignette-visa restera probablement vulnérable à la contrefaçon ou à la falsification. - Troisième raison : un autre risque constaté par rapport à la situation actuelle est le risque de «visa shopping» par les demandeurs.
L’hétérogénéité des procédures de demande de visa peut potentiellement inciter les demandeurs de visa à choisir d’introduire une demande auprès d’un État membre dont la procédure de demande est davantage numérisée, qui ne serait pas le même que l’État membre normalement compétent pour l’examen de la demande de visa.
L’importance pour l’UE rester compétitive
Quatrième raison : les pays tiers qui sont en concurrence directe avec l’Union pour attirer des visiteurs de pays tiers, tels que l’Australie et la Nouvelle-Zélande, ont déjà mis en place des procédures entièrement numérisées pour tous les ressortissants étrangers soumis à l’obligation de visa. D’autres pays (par exemple, le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada, la Russie, l’Inde) ont numérisé leur procédure pour permettre aux ressortissants de pays tiers soumis à l’obligation de visa de certains pays clés d’obtenir rapidement et facilement une autorisation de voyage électronique au lieu d’un visa pour les voyages ayant certaines finalités.
Or, la procédure de demande de visa pour se rendre dans l’Union européenne est assez complexe et lourde. La tendance mondiale à la numérisation, ainsi que les demandes de la part des voyageurs de procédures de plus en plus rapides, modernes et simples pourraient laisser l’Union à la traîne et provoquer des désavantages économiques pour celle-ci, notamment pour l’industrie européenne, car les voyages internationaux contribuent positivement au PIB de l’Union, en particulier à l’industrie du tourisme.
Et du point de vue les demandeurs ?
La procédure actuelle est également complexe et lourde pour les demandeurs de visa.
- Les demandeurs de visa doivent se rendre dans le consulat ou le centre de dépôt des demandes le plus proche pour chaque demande et y laisser leur document de voyage, ce qui peut les gêner pour s’identifier et voyager à l’étranger pendant la procédure de demande.
- Les voyageurs fréquents doivent répéter la même longue procédure pour chaque demande, qui peut varier selon l’État membre de destination.
- Les demandeurs paient également des frais supplémentaires lorsqu’ils font appel à un prestataire de services extérieur.
Comment cela marche-t-il pour eux ?
Les ressortissants de pays tiers qui demandent un visa de court séjour en ligne le font via la plateforme de demande. Toutefois, devraient toujours se présenter au consulat les personnes demandant un visa pour la première fois, :
- les demandeurs déposant une demande tous les 5 ans,
- les demandeurs voyageant avec des enfants (pour protéger l’intérêt de l’enfant),
- les demandeurs voyageant avec un document de voyage différent de celui utilisé pour les demandes de visa précédentes.
Les demandeurs de visa devraient pouvoir demander un visa en ligne via une plateforme de l’UE unique, quel que soit l’État membre de destination. Cet outil devrait déterminer automatiquement l’État membre compétent pour examiner une demande, en particulier lorsque le demandeur envisage de visiter plusieurs États membres.
La plateforme de l’UE pour les demandes de visa en ligne devrait fournir au demandeur :
- des informations à jour sur les visas Schengen de court séjour,
- un outil d’orientation grâce auquel le demandeur peut trouver toutes les informations nécessaires concernant les exigences et les procédures,
- le montant des droits de visa;
- l’État membre compétent pour traiter la demande;
- les pièces justificatives requises;
- la nécessité d’un rendez-vous pour le recueil des données biométriques ou la possibilité d’introduire une demande en ligne sans rendez-vous.
Les demandeurs de visa devraient être en mesure, via la plateforme de l’UE pour les demandes de visa :
- de soumettre leur demande,
- de fournir les données requises dans le formulaire de demande,
- de fournir une copie numérisée du document de voyage,
- de fournir les pièces justificatives et l’assurance maladie en voyage au format numérique.
synthèse par Pierre Berthelet, alias securiteinterieure.fr
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