A regarder les choses de près, il s'agit de la pointe émergée d'un iceberg composé d'un vaste dispositif européen de la sécurité qui s'étend de la lutte contre la radicalisation terroriste, à l'interopérabilité des systèmes d’information sécurité-immigration-frontières, et aux liens entre les sécurités intérieure et extérieure, en passant par le contrôle des explosifs. Au vu du 11e rapport et du 12e rapport sur la sécurité de la Commission, les mesures consacrées à la sécurité sont particulièrement denses. Plusieurs chantiers sont en cours.
Comme ces rapports se recoupent, leur synthèse sera thématique. 3 premiers chantiers seront évoqués ici :
- la protection des espaces publics et des transports,
- la lutte contre la radicalisation,
- les efforts en faveur de systèmes d’information plus robustes et plus intelligents.
- Pour le rapport précédent, à lire sur securiteinterieure.fr : L’UE a participé à une des opérations de démantèlement les plus sophistiquées jamais réalisées contre les activités criminelles en ligne (10e rapport sur la sécurité)
Image d'illustration : le camion bélier utilisé lors des attentats de Nice du 14 juillet 2016
1er chantier : la protection des espaces publics et des transports
Protection accrue des espaces publics
Le soutien que l’UE consiste à favoriser l’échange des meilleures pratiques par-delà les frontières, y compris au moyen de financements.
Il peut s’agir, par exemple, de mesures destinées à promouvoir et à soutenir la mise au point de barrières de protection innovantes et discrètes afin d’assurer la sécurité des villes sans porter atteinte à leur caractère ouvert («protection dès la conception»).
Apportant son concours financier aux mesures prévues dans le plan d’action, la Commission a lancé aujourd’hui un appel à propositions pour un montant total de 18,5 millions d’euros au titre du volet «police» du Fonds pour la sécurité intérieure.
Ce financement à court terme sera complété, en 2018, par un financement au titre des «Actions innovatrices urbaines» (AIU) dans le cadre du Fonds européen de développement régional, pour lesquelles la sécurité constituera un thème clé et l’enveloppe totale pourra atteindre 100 millions d’euro.
Une consultation publique a été lancée le 15 septembre 2017 afin de recueillir auprès des villes des idées en matière de solutions de sécurité innovantes. Cette consultation permettra à la Commission d’élaborer les futurs appels à propositions dans ce domaine.
L’Union européenne peut favoriser la coopération avec un large éventail de parties prenantes, laquelle est considérée comme capitale pour améliorer la protection des espaces publics.
Il conviendrait de mieux structurer le partage d’expériences et la mise en commun des ressources.
La Commission créera un forum afin de dialoguer avec des opérateurs privés, tels que des centres commerciaux, des organisateurs de concerts, des installations sportives, des hôtels et des sociétés de location de voitures.
Ce dialogue facilitera une prise de conscience commune des défis actuels en matière de sécurité et favorisera les partenariats public-privé destinés à améliorer la protection.
La première réunion du Réseau de sécurité pour la protection des espaces publics à haut risque a eu lieu les 14 et 15 novembre 2017.
L’unité de la Guardia Civil espagnole chargée de la protection des lieux à haut risque a accueilli cette première conférence à son siège de Logroño, en Espagne.
La première réunion du Forum des exploitants d’espaces publics a eu lieu à Bruxelles le 20 décembre 2017, et une réunion thématique consacrée aux locations de voitures a suivi le lendemain 21 décembre 2017.
Protection accrue des transports
La Commission :
- a lancé, avec les États membres, une évaluation des risques communs dans le transport ferroviaire et elle travaille actuellement à l’élaboration de nouvelles mesures visant à améliorer la sécurité du transport ferroviaire de voyageurs ;
- poursuit ses travaux sur l’amélioration de la sûreté des transports maritimes, notamment en vue de renforcer la protection des infrastructures, y compris les ports et les installations portuaires, des navires porte-conteneurs et des navires de transport de passagers tels que les bateaux de croisière et les ferries ;
- travaille
à l’élaboration d’une boîte à outils d’orientations relatives aux
meilleures pratiques en matière de sécurité pour le secteur du transport
commercial par route, l’objectif étant d’améliorer la sécurité des
poids lourds en atténuant le risque d’intrusion non autorisée, y compris
de détournement ou de vol, dans le but de commettre un attentat
terroriste au camion-bélier.
La boîte à outils sera disponible avant la fin de l’année 2017 et fournira des orientations pour les secteurs des transports routiers nationaux.
En outre, certains États membres ont renforcé leurs mesures de sécurité afin de protéger les transports ferroviaires.
Ces mesures ont été appliquées de manière fragmentée, ce qui met en évidence la nécessité d’une meilleure coordination dans le domaine de la sécurité ferroviaire.
La Commission a donc annoncé, dans son programme de travail pour 2018, son intention d’œuvrer à l’adoption de nouvelles mesures destinées à améliorer la sécurité des passagers dans les transports ferroviaires.
En ce qui concerne la sûreté de l’aviation, la Commission européenne et d’autres services de l’Union se réunissent régulièrement avec les États membres pour convenir d’une approche intégrée visant à renforcer et hiérarchiser les efforts de renforcement des capacités dans les pays tiers. Les actions proposées concernent des formations et des exercices sur la culture de la sécurité, le contrôle des accès, les procédures de filtrage, la certification des inspecteurs, etc.
Des réunions spécifiques pour chacun des pays tiers examinés sont organisées afin de concevoir des actions adaptées à chacun de ces pays.
2e chantier : la lutte contre la radicalisation
Le Groupe d'experts de haut niveau sur la radicalisation
La Commission a institué un Groupe d'experts de haut niveau sur la radicalisation. Ce groupe, chargé d’émettre des recommandations en vue de mener plus avant les travaux dans ce domaine, abordera également les conditions-cadres nécessaires pour renforcer les capacités et le savoir-faire en matière de lutte contre la radicalisation, compte tenu de la nécessité éventuelle d’élaborer de nouvelles structures de coopération au niveau de l’UE. À cet égard, certains États membres ayant appelé de leurs vœux un centre de prévention de la radicalisation de l’UE, le groupe évaluera la nécessité et la valeur ajoutée de la création d'une telle structure. Parmi les questions prioritaires devant être discutées par ce groupe, figure la radicalisation dans les prisons. La Commission organisera une conférence des parties prenantes sur la réponse pénale à la radicalisation, le 27 février 2018, dans le but de partager les résultats des projets en cours.
Le forum de l’Union sur l’internet
Concernant la lutte contre la radicalisation en ligne, en juillet 2017, le forum de l’Union sur l’internet a mis au point un plan d'action pour lutter contre les contenus terroristes en ligne.
L’idée est de permettre au secteur de l’internet de développer les outils technologiques nécessaires pour assurer la détection rapide de contenus préjudiciables en ligne et les supprimer.
A ce propos, la 3e réunion ministérielle du forum de l’UE sur l’internet a eu lieu le 6 décembre 2017. Les progrès réalisés dans le cadre du plan d’action visant à lutter contre les contenus à caractère terroriste en ligne ont été évalués. Cette évaluation a porté sur :
- l’automatisation de la détection des contenus à caractère terroriste,
- l’amélioration des bases de données d’empreintes numériques des entreprises,
- le renforcement des signalements,
- la fourniture à la société civile des moyens d’accroître les contre-discours visant à combattre la propagande terroriste.
En ce qui concerne la détection automatisée, les entreprises se tournent davantage vers cette option qui leur permet de déployer un savoir-faire technique pour identifier les contenus terroristes au moment où ils sont mis en ligne. Certaines entreprises ont indiqué que 75 % des contenus sont désormais détectés automatiquement. Bien que ces progrès soient tangibles, la Commission a appelé toutes les entreprises :
- à accélérer le déploiement de ces outils ;
- étendre leur outil «base de données d’empreintes numériques», afin d’empêcher que le contenu terroriste ne soit remis en ligne sur d’autres plateformes.
- suivra les progrès accomplis et déterminera si des mesures supplémentaires s’imposent pour assurer la détection rapide et proactive et la suppression des contenus illicites en ligne, telles que des mesures législatives complétant le cadre réglementaire en vigueur. Ces travaux s’achèveront au plus tard en mai 2018 ;
- continue également d’apporter son soutien aux organisations de la société civile qu’elle encourage à diffuser des messages contenant des contre-discours en ligne. Le 6 octobre 2017, la Commission a lancé un appel à propositions en vue de l’octroi d’un concours financier de 6 millions d'euros à des consortiums d’acteurs de la société civile qui développent et mettent en œuvre ces campagnes.
3e chantier : des efforts en faveur de systèmes d’information plus robustes et plus intelligents
Améliorer l’interopérabilité des systèmes d’information
Pour aider les agents sur le terrain à exploiter de façon optimale les données existantes, un portail de recherche européen est en cours d’élaboration.
Destiné à procurer un «guichet unique», il permettra d’effectuer des recherches simultanées dans plusieurs systèmes d’information de l’Union (y compris les bases d’Europol et d’Interpol).
Comme elles sont fondées sur l’utilisation des données biométriques, les mesures proposées permettront aux autorités nationales de détecter les identités multiples et de lutter contre la fraude à l’identité :
- un service partagé de mise en correspondance de données biométriques permettra de rechercher et de comparer des données biométriques dans plusieurs systèmes centraux ;
- un répertoire commun de données d’identité contiendra les données d’identité biographiques et biométriques partagées des ressortissants de pays tiers présents dans les systèmes d’information de l’Union.
Les agents des services d’immigration/d’asile enregistrent, les policiers et les garde-frontières seront informés si la personne est déjà connue sous une autre identité ou si elle utilise plusieurs identités.
Pour compléter ces composantes de l’interopérabilité, la Commission propose une nouvelle approche de consultation des données en deux temps :
- un
agent des services répressifs commencerait par contrôler en parallèle
tous les systèmes stockant des données dans le répertoire commun de
données d’identité afin de savoir si des informations sur la personne
recherchée existaient dans un système.
Afin de garantir la protection des données, la seule réponse serait «concordance/non-concordance» ; - l’agent
pourrait ensuite demander un accès complet au(x) système(s)
d’information ayant donné une concordance, en formulant une demande
d’accès individuelle.
Comme c’est le cas actuellement, l’agent devrait justifier la nécessité d’accéder au système, conformément aux droits d’accès de ce système d’information et aux principes de limitation des finalités.
Garantir la mise en œuvre intégrale des systèmes d’information existants
Les travaux continuent par ailleurs en vue de la mise en œuvre intégrale des décisions de Prüm pour l’échange des données dactyloscopiques, des données ADN et des données relatives à l’immatriculation des véhicules. La Commission :
- a dû utiliser ses pouvoirs en matière d’infractions. Elle a envoyé des avis motivés à la Croatie, à l’Irlande et à l’Italie le 18 mai 2017, et à la Grèce le 5 octobre 2017 ;
- continue à aider les États membres en finançant la mise en œuvre des programmes nationaux dans le cadre du FSI-Police. Elle a mis à la disposition de ces programmes nationaux pour 2017 une enveloppe supplémentaire de 22 millions d’euros, qui pourra être utilisée pour la mise en œuvre des décisions de Prüm.
Au 15 novembre 2017, la situation était la suivatn:
7 États membres disposent déjà des capacités juridiques et techniques pour collecter et traiter les données PNR ;
- 13 États membres sont à un stade intermédiaire de mise en œuvre. Dans 4 de ces États membres, les unités nationales d’information passagers (UIP) sont en place et dotées des moyens nécessaires, mais elles ne procèdent pas à la collecte et au traitement de données PNR réelles. Dans les 9 autres États membres, la conception et la mise en place des UIP se trouvent à des stades variés;
- 7 États membres se trouvent à un stade trop peu avancé du processus de mise en œuvre et doivent encore définir l’architecture administrative de leurs UIP.
Aider à mieux utiliser les systèmes d’information existants
La Commission a commandé une étude afin d’évaluer les mesures prises par les États membres pour transposer la décision-cadre suédoise qui fournit un cadre juridique commun aux fins de l’échange d’informations entre les services répressifs des États membres.
Les résultats sont attendus au cours du premier trimestre 2018 et la Commission les examinera afin de déterminer si de nouvelles mesures sont nécessaires.
L’automatisation du processus de téléchargement des données sur le système d’information d’Europol aux fins des contrôles croisés peut nettement améliorer le partage d’informations pertinentes et actualisées avec Europol et avec d’autres États membres.
Les «chargeurs de données» sont des outils techniques permettant d’automatiser ce processus de téléchargement des données.
Europol a développé de tels chargeurs afin de permettre aux États membres d’améliorer leur efficacité en ce qui concerne le téléchargement, la mise à jour et la suppression des données dans le système d’information d’Europol.
Ces chargeurs de données sont déjà utilisés dans plusieurs États membres.
Afin de rendre les données d’Europol accessibles à un groupe beaucoup plus large de policiers, un projet pilote sur l’utilisation de QUEST, une interface système qui permet l’intégration automatique des demandes de données d’Europol émanant des systèmes d’information policière nationaux, est en cours dans cinq États membres (Espagne, Estonie, Finlande, Grèce et Pologne).
Cette interface devrait être opérationnelle au début de 2018.
Synthèse des deux textes par securiteinterieure.fr
A lire sur securiteinterieure.fr d'autres rapports:
- L’UE a participé à une des opérations de démantèlement les plus sophistiquées jamais réalisées contre les activités criminelles en ligne (10e rapport sur la sécurité)
- L'action de l'UE dans le domaine de la sécurité intérieure est efficace, mais… (9e rapport)
- 6e rapport mensuel sur les progrès accomplis dans la mise en place d’une « union de la sécurité réelle et effective
- Lutte antiterroriste : la France se fait taper sur les doigts dans sa lutte contre la fabrication d’explosifs artisanaux (5e rapport)
- La principale faille de la lutte antiterroriste : une absence de partage d'informations et d'interconnexion des fichiers de sécurité (3e et 4e rapport)
- Décembre 2016, un mois clé pour la sécurité, le renforcement des frontières de l’UE et la lutte antiterroriste (2e rapport)
- Un an après les attentats du 13 novembre à Paris, l'Europe de la sécurité prend forme (1er rapport).
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