La situation n’est guère reluisante d’après le bilan tiré du plan d’action sur le retour. La marge de progression des Etats membres est notable.
Pourtant, les défis sont importants, puisque les États membres pourraient avoir à renvoyer plus d’un million de demandeurs d’asile déboutés, tandis que le taux d’expulsion est seulement de 27 %.
Un plan d’action renouvelé en matière de retour est donc présenté par la Commission européenne et il devrait permettre d'augmenter sensiblement le taux de retour. Dans le même temps, il adressera, selon elle, un message clair aux migrants qui n’ont pas le droit de séjourner dans l’Union européenne: ils ne devraient pas entreprendre un voyage périlleux pour rejoindre illégalement l’Europe.
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De quoi parle-t-on ?
Le 9 septembre 2015, la Commission européenne a adopté le plan d’action de l’UE en matière de retour. Ce plan prévoyait 36 actions concrètes destinées à améliorer l’efficacité du système de retour de l’UE. La plupart de ces actions sont en cours ou ont été mises en œuvre.
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Quel est l’enjeu actuel ?
Les taux de retour au niveau de l’Union européenne n’ont pas progressé. Alors que le taux de retour total est passé de 41,8 % à 42,5 % de 2014 à 2015, le taux de retour effectif dans les pays hors UE a reculé de 36,6 % à 36,4 %. De surcroît, si l’on ne tient pas compte des retours vers les Balkans occidentaux, le taux de retour de l’Union européenne tombe à 27 %.
Par ailleurs, compte tenu des 2,6 millions de demandes d’asile introduites pour la seule période 2015/2016, et du fait que le taux d’acceptation en première instance est de 57 % pour les 3 premiers trimestres de 2016, les États membres pourraient avoir à renvoyer plus d’un million de personnes après traitement des demandes d’asile.
1er axe : exploiter les possibilités de la « directive retour »
La Commission a adopté aujourd’hui une recommandation visant à rendre les retours plus effectifs dans le cadre de la mise en œuvre de la directive sur le retour.
- les États membres devraient donc prendre des mesures immédiates conformément à cette recommandation de la Commission ;
- la Commission mettra à jour le manuel sur le retour pour la mi-2017, en tenant compte également de la recommandation ;
- la Commission, conjointement avec les États membres, continuera à contrôler l’application et le respect de la directive sur le retour, notamment au moyen de l’évaluation de Schengen en matière de retour ;
- forts du soutien de la Commission, les États membres devraient recenser en 2017 les bonnes pratiques permettant de décourager le séjour irrégulier de ressortissants de pays tiers sur leur territoire.
2e axe : remédier à l’utilisation abusive des procédures d’asile
Certains migrants utilisent les demandes d’asile comme un moyen de prolonger leur présence en Europe et d’empêcher leur retour. Bien souvent, des demandes d’asile manifestement non fondées sont déposées au cours des dernières étapes des procédures de retour, y compris quelques jours ou quelques heures avant le départ.
Les États membres devraient :
- rationaliser les procédures d’asile conformément à la législation en vigueur de l’Union européenne afin de réduire les formes d’utilisation abusive du système d’asile visant à empêcher le retour ;
- recourir à des procédures d’asile accélérées et à des procédures d’irrecevabilité. Ils ne devraient pas accorder d’effet suspensif automatique aux recours en cas de demandes d’asile manifestement non fondées.
3e axe : optimiser le fonctionnement de l’application de gestion intégrée des retours (IRMA)
L’application de gestion intégrée des retours est un système restreint d’échange d’informations destiné aux experts des États membres.
Cette application facilite déjà la planification, l’organisation et la mise en œuvre des activités de retour et de réadmission menées par les États membres avec l’objectif de continuer à accroître les taux de retour.
Elle offre également des informations sur les aspects suivants: bonnes pratiques et orientations par pays tiers, législation, programmes de retour, données sur les opérations de retour et statistiques.
Le système a été déployé dans tous les États membres ainsi qu’en Norvège et en Suisse.
Les informations qu'il fournit permettent également à l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes d'assumer un rôle plus proactif dans la planification des opérations de retour conjointes et de mieux préparer les opérations de retour.
- les États membres devraient chaque mois fournir les données demandées relatives aux retours destinées à l’application de gestion intégrée des retours ;
- la Commission :
- mettra à disposition, d’une part, un système informatique autonome destiné à traiter les dossiers de retour au niveau national et, d'autre part, son interface commune correspondante dans l'application de gestion intégrée des retours ;
- développera une interface informatique unique pour la gestion des dossiers de réadmission, destinée à la plateforme de l'application de gestion intégrée des retours ;
- soutiendra la poursuite du développement, à l'appui de l’architecture informatique de l’application de gestion intégrée des retours, des capacités de coordination des États membres dans le domaine des retours.
4e axe : améliorer l’échange d’informations aux fins de l’exécution des retours
L’identification et le suivi des migrants en situation irrégulière sont indispensables à une politique efficace en matière de retour. Celle-ci requiert un échange systématique d’informations. Or, une grande partie des informations nécessaires fait toujours défaut.
Par conséquent, à l’aide de l’application de gestion intégrée des retours (IRMA), les États membres devraient recueillir des informations complètes en temps réel à l’échelle nationale afin de conserver une vue d’ensemble claire et précise de la situation en matière de migration irrégulière.
Ils sont également tenus d’introduire dans le SIS, à des fins de saisie, tous les documents invalidés, tels que les titres de séjour.
La Commission invite instamment les États membres à faire en sorte que cette obligation soit systématiquement respectée.
- la Commission :
- lancera une analyse d’impact sur la faisabilité et les implications de la conservation d’une copie du document de voyage des demandeurs de visa dans le système d’information sur les visas (VIS), afin de faciliter l’identification des migrants en situation irrégulière (ce système ne contenant pas de copie des passeports, il est extrêmement laborieux, voire impossible, d’en obtenir une auprès de l’ambassade qui a délivré un visa Schengen) ;
- examinera la faisabilité technique d’un registre de titres de séjour de l’UE d’ici septembre 2017 ;
- les États membres devraient :
- saisir immédiatement dans le SIS l’ensemble des titres de séjour ayant été retirés ou invalidés ou étant périmés ;
- tenir compte des condamnations antérieures pour infractions pénales graves dans l’Union européenne lorsqu’ils prennent des décisions en matière de retour.
5e axe : encourager le retour et aider à la réintégration
Les pays d’origine sont de plus en plus confrontés à des situations dans lesquelles leurs ressortissants de retour, auparavant migrants en situation irrégulière.
Ils ont reçu différents niveaux d’aides à la réintégration (espèces ou contributions en nature) en fonction de l’État membre qui a procédé à leur retour.
Cela risque d’amener les pays d’origine à privilégier les seuls retours au départ des États membres offrant des aides à la réintégration plus généreuses.
Cela peut provoquer, dans l’UE, un phénomène de «return shopping» pour ce qui est de l’aide au retour volontaire de la part des migrants en situation irrégulière.
Soutenus par la Commission, les États membres devraient donc assurer une approche cohérente de l’aide à la réintégration et des pratiques générales d’incitation au retour.
6e axe : assurer une meilleure coopération en matière de retour
Les États membres peuvent recourir à leurs programmes nationaux relevant du Fonds «Asile, migration et intégration» qui permettent de financer le renforcement des capacités.
Il s’agit d’améliorer la planification, la coordination et le suivi entre services répressifs et d’immigration respectifs, les actions coordonnées avec les autorités judiciaires, les autorités de rétention, les systèmes de tutelle et les services médico-sociaux
- la Commission et les États membres devraient encore intensifier la coordination dans le cadre de l’approche de gestion intégrée des retours ;
- la Commission créera en 2017 un réseau de points de contact des États membres sur le retrait des titres de séjour.
7e axe : Utiliser davantage l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes
Une fois que l’agence aura achevé la cartographie des capacités et le recensement des besoins des États membres, elle devrait élaborer des plans d’intervention spécifiques sur mesure.
Ces plans indiqueront clairement le type d’expertise dont chaque État membre a besoin et comment l’agence peut apporter son concours à des projets pilotes et en lancer.
Il conviendrait également de recourir plus largement aux «opérations de retour par collecte» : les autorités des pays hors UE procèdent au retour de leurs propres ressortissants depuis l’UE.
Ces opérations sont susceptibles d'accroître encore plus la capacité de retour de l’Europe de manière peu coûteuse.
L’agence devrait donc soutenir davantage la capacité des pays tiers à participer à de telles opérations, y compris par l’organisation de formations spécialisées.
Enfin, l’agence doit instaurer un mécanisme destiné à assister les États membres dans l’exécution des retours par vols commerciaux. De plus, elle devrait négocier des accords-cadres avec des compagnies aériennes pour :
- fixer les conditions générales d’utilisation de vols commerciaux (par exemple, nombre de personnes à bord soumises à une décision de retour, nombre d’escortes) ;
- faire en sorte qu’un nombre de sièges puisse être rapidement mis à disposition à bord de vols vers des destinations de retour clés.
8e axe : financement par l’Union européenne des retours et réadmissions
Les États membres ont alloué 806 millions d’euros aux activités liées au retour et à la réintégration par l’intermédiaire de leurs programmes nationaux relevant du Fonds «Asile, migration et intégration» (AMIF), pour la période 2014-2020.
En outre, une aide d’urgence de 6,2 millions d’euros au total a été allouée depuis 2014 pour répondre à des besoins urgents liés au retour, tels que l'aide au retour volontaire.
En 2017, la Commission:
- mettra 200 millions d’euros supplémentaires en faveur d’actions liées au retour à la disposition des États membres, par l’intermédiaire de leurs programmes nationaux relevant du Fonds «Asile, migration et intégration» ;
- procédera à une nouvelle augmentation budgétaire afin de renforcer la coopération entre l’UE et ses pays partenaires dans le domaine de la réadmission dans le cadre du mécanisme de renforcement des capacités de réadmission.
9e et dernier axe : surmonter les difficultés en matière de réadmission
Les travaux intensifs consacrés à la mise en œuvre des 17 accords de réadmission existants ont contribué à la fois à la levée de certains des obstacles à la réadmission.
En outre, la Commission a avancé sur les négociations de nouveaux accords de réadmission. Celles :
- avec la Biélorussie sont désormais presque achevées tandis que de nouvelles ont été engagées avec le Nigeria, la Tunisie et la Jordanie parallèlement aux négociations sur l’assouplissement du régime de visas ;
- avec le Maroc, qui ont débuté 2003 en, sont bloquées ;
- avec l’Algérie n’ont pas été ouvertes malgré l’existence d’un mandat de négociation remontant à 2002.
Pour ce qui est des pays avec lesquels elle n'a pas pu obtenir un accord de réadmission formel, la Commission a fait porter ses efforts sur l’amélioration de la coopération pratique au moyen d’outils et d’instruments opérationnels tels que les procédures opérationnelles standards.
En outre, et malgré les efforts menés, beaucoup de pays d’origine des migrants ne coopèrent toujours pas de manière satisfaisante.
Les États membres font spécialement état des difficultés qu’ils rencontrent pour obtenir auprès des pays tiers des documents de voyage d’urgence ou pour, sinon, utiliser le document de voyage européen, même lorsque l’identité et la nationalité de l’intéressé sont bien établies.
La Commission entend:
- suivre et résoudre les problèmes que pose actuellement la mise en œuvre des accords de réadmission;
- œuvrer à la conclusion rapide des négociations des accords de réadmission avec le Nigeria, la Tunisie et la Jordanie tout en s’efforçant de dialoguer avec le Maroc et l’Algérie;
- conjointement avec les États membres, redoubler d’efforts pour améliorer la coopération pratique, en convenant avec les pays tiers de procédures de réadmission, de voies de communication et de l’organisation des tâche
synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr
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