Moins connue que ses sœurs, comme Europol, l'agence Eu-LISA prépare son emménagement en France, à Strasbourg. Le Sénat a approuvé un projet de loi permettant la ratification de l'accord de siège pour que cette agence, chargée de la gestion de systèmes comme le Système d'information Schengen, puisse s'installer sur le
territoire français.
Le Sénat salue même cet emménagement comme l'engagement de la France dans l'espace de
liberté, de sécurité et de justice, permettant par ailleurs de
renforcer encore la dimension européenne de la ville de Strasbourg.
Pour mémoire, 4 autres agences européennes sont déjà implantées en France:
- l'Office communautaire des variétés végétales (Angers),
- l'Agence ferroviaire (Valenciennes),
- l'Autorité européenne des marchés financiers (Paris),
- l'Institut d'études de sécurité de l'UE (Paris).
De quoi parle-t-on ?
L'agence Eu-LISA a été instituée en 2011
pour assurer la gestion opérationnelle de 3 systèmes
d'information existant dans le domaine de la justice et des affaires
intérieures, le système d'information Schengen de deuxième
génération (SIS II), le système d'information des visas
(VIS) et le système EURODAC.
Le siège de l'agence est à Tallin, mais le
développement technique et la gestion opérationnelle des
systèmes sont réalisés à Strasbourg. C'est
là que la France a assuré la gestion technique du système
d'information Schengen depuis vingt ans.
L'accord fait du site de Strasbourg le
site technique de l'agence Eu-LISA, chargé de la gestion
opérationnelle de l'ensemble des systèmes.
Cet accord régit
le statut juridique de l'agence et définit les modalités selon
lesquelles le gouvernement met à sa disposition des locaux, d'autres
soutiens et confère à ses personnels les traditionnels
privilèges et immunités diplomatiques.
Qu'est-ce que EU-LISA ?
L'agence compte, en 2016, 138 personnes. Fondée sur un règlement de 2011, l'agence exerce ses responsabilités depuis le 1er décembre 2012. Elle a ainsi commencé à assurer depuis cette date la gestion du SIS (qui ne sera opérationnel que depuis avril 2013), du système d'information des visas
(VIS) et d'EURODAC.
Pour l'année 2015, le budget de l'agence a été abondé exclusivement par une subvention de la Commission européenne et s'est élevé à 67,6 millions d'euros. Pour 2016, le budget prévisionnel de dépense est de 82,5 millions d'euros, dont 80,3 millions d'euros au titre de la subvention de l'Union européenne et 2,24 millions d'euros au titre de la contribution financière des pays associés.
Pourquoi cet emménagement est-il prévu ?
Au cours des négociations relatives à la
création de l'agence Eu-LISA, l'Estonie et la France se sont
toutes deux portées candidates pour héberger l'agence
nouvellement créée. Suite à une divergence de ues sur l'interprétation de textes, uUne solution de compromis a finalement été
trouvée :
- le siège de l'agence est à Tallin, où sont effectuées les tâches relevant de la gouvernance, de la stratégie et de la conception des programmes,
- le développement et la gestion opérationnelle des systèmes sont effectués à Strasbourg. Par ailleurs, un site technique de sauvegarde a également été mis en place à Sankt Johann im Pongau en Autriche.
La France a cédé pour un euro symbolique le
terrain, les bâtiments et les locaux du site central du SIS à
l'agence Eu-LISA.
Conformément au règlement de 2011, des
négociations entre la France et la Commission
européenne pour fixer le contenu de l'accord de site de
Strasbourg ont été engagées à partir de mai 2012. Cet accord a été signé le 15
décembre 2013 par Manuel Manuel Valls et par le directeur de l'agence.
Vers une réforme du Système d'information Schengen géré par l'agence?
Le renforcement du SIS est naturellement, dans le contexte de
la montée du risque terroriste, une préoccupation forte de la
France. Il apparaît cependant que ses potentialités ne sont pas suffisamment exploitées :
- les informations contenues dans le SIS mériteraient d'être enrichies, en faisant mention expresse du risque terroriste associé à certains individus signalés;
- les pratiques de signalement au SIS varient beaucoup d'un Etat à l'autre. Un rapport de l'agence Eu-LISA de 2015 constate ainsi que certains Etats n'ont jamais recours au SIS pour signaler des individus recherchés;
- les postes-frontières des Etats « de première entrée » dans l'Union européenne ne sont pas tous correctement équipés. La création d'un véritable corps de garde-frontières européens pourrait permettre un meilleur contrôle via le SIS des personnes franchissant les frontières extérieures de l'Union européenne.
Vers d'extension des compétences de l'agence à de nouveaux systèmes?
Sont concernés :
- le système entrée/sortie, dit EES (entry-exit system) qui permettrait de connaître en temps réel les personnes dont la durée de séjour autorisée sur le territoire européen est expirée,
- le programme européen de surveillance du financement du terrorisme qui consisterait en un recueil des données de messagerie financière de la société SWIFT (société de droit belge en position quasi-monopolistique dans le domaine des messages financiers) dans le but d'identifier, de suivre la trace et de poursuivre en justice les terroristes et leurs réseaux en s'appuyant sur leurs circuits financiers,
- le fichier des données de passagers aériens, ou PNR (passenger name record).
Concernant le système entrée/sortie, dit
EES (entry-exit system), la gestion est possible. Un projet-pilote a été mené par
Eu-LISA de mars à septembre 2015 pour tester la
faisabilité du système et répondre aux interrogations du
Parlement européen et du Conseil concernant le coût de
construction des deux systèmes, qui dépasserait le milliard
d'euros. La Commission européenne a présenté
une nouvelle proposition tenant compte des résultats de
l'expérimentation.
Pour ce qui est du programme européen de surveillance du financement du
terrorisme, la gestion est peu probable. L'Union européenne ne dispose pas pour l'heure de
son propre système de recueil de données de messagerie
financière mais dépend des Etats-Unis pour l'accès
à ce type de données. La Commission européenne a estimé
que l'intérêt de créer un système de ce type au sein
de l'Union européenne n'était pas clairement
démontré, l'accord entre l'Union européenne et
les Etats-Unis offrant un cadre suffisant et le coût de la mise en place
d'un tel système étant élevé, mais le
projet a été récemment
réévoqué.
Enfin, à propos du PNR (passenger name record), la gestion est probable. Il est possible que l'agence Eu-LISA soit en charge de la
gestion technique du système.
Plus exactement, les
données de passagers aériens seraient collectées par les
Etats membres de manière systématique et harmonisée, puis
partagées entre les Etats. Les modalités du partage des
données PNR entre Etats membres ne sont pas encore
déterminées. Le partage pourrait s'effectuer de manière
bilatérale, ou bien de manière centralisée. Dans ce
dernier cas, la
gestion technique du système par l'Eu-LISA est envisageable.
synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr
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