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vendredi 28 juin 2024

Protection civile : face aux menaces, un rapport préconise de renforcer la capacité de l’UE pour faire face aux crises

 


Le mécanisme de protection civile de l’Union (MPCU)  et sa réserve européenne rescEU connaissent un grand succès. C’est ce que souligne un rapport d’évaluation de ce mécanisme. Pour autant, la combinaison des risques et leur accroissement impliquent pour l’Union de renforcer ses capacité en matière de sécurité civile. Plusieurs préconisations sont faites, parmi lesquelles le passage du Centre centre de coordination de la réaction d'urgence (ERCC), qui coordonne actuellement l’acheminement de l’aide aux pays frappés par une catastrophe, au rang de plateforme transsectorielle de crise.


Le succès du mécanisme de protection civile

Lorsqu’une crise dépasse les capacités d’un seul pays, le mécanisme de protection civile fait office d’ossature opérationnelle, facilitant la réaction collective de l’Europe, tant dans l’Union que par-delà ses frontières.

Activé plus de 500 fois au cours de la période évaluée (2017-2022), le mécanisme de protection civile a été appelé en intervention à plus de 320 reprises rien que sur la période 2020-2022, soit en moyenne cinq fois plus qu’au cours de la décennie précédente. Pour mémoire, les 27 États membres de l’UE et 10 pays tiers (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Islande, Macédoine du Nord, Moldavie, Monténégro, Norvège, Serbie, Turquie et Ukraine) participent au mécanisme de protection civile de l’Union.

nombre et types d’activations du MPCU:

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L’efficacité des instruments du mécanisme de protection civile

L’évaluation a souligné le fait que la grande majorité des parties prenantes louaient la flexibilité du mécanisme de protection civile et, mieux encore, sa capacité à s’adapter promptement à des situations nouvelles et à y faire face. Selon le rapport, l’introduction de la réserve rescEU, qui s’inscrit en complément de la décision récente, prise rapidement, de renforcer la flotte aérienne de rescEU, a été annoncée comme une démonstration de la flexibilité et des capacités d’innovation dont fait preuve le mécanisme de protection civile pour conserver toute sa pertinence. L’adaptabilité caractérisant le programme de formation du mécanisme de protection civile et EU MODEX a également été saluée et est considérée comme la preuve de la flexibilité du mécanisme de protection civile.


La France, bénéficiaire du retour d’expérience du mécanisme de protection civile


Les résultats de l’évaluation ont montré que le prépositionnement de pompiers en 2021 avait eu un effet positif sur le partage des connaissances entre pompiers des régions concernées par les incendies de forêt. Ainsi, en 2021, des pompiers ont été prépositionnés en Grèce afin d’apporter leur soutien lors de la saison estivale des incendies de forêt. À la suite des réactions positives des États membres et des États participants, cette initiative a été renouvelée et 11 États membres se sont engagés à envoyer près de 450 pompiers vers la France, la Grèce et le Portugal en préparation de la prochaine saison des incendies de forêt.


Un exemple d’un soutien de grande ampleur : l’aide à l’Ukraine

Le 15 février 2022, l’Ukraine a activé le mécanisme de protection civile dans le cadre de la préparation à une situation d’urgence à grande échelle, avant d’actualiser sa demande d’origine par la suite. Les demandes ont notamment porté sur la livraison de fournitures médicales, de nourriture, d’abris, de dispositifs de lutte contre l’incendie, de matériel informatique et de communication, d’appareils de protection du patrimoine culturel, de contre-mesures CBRN et de fournitures agricoles.

L’ERCC a aidé la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie à mettre en place des plateformes logistiques du mécanisme de protection civile au sein desquelles l’aide offerte a été réceptionnée, consolidée, puis expédiée vers l’Ukraine.
De plus, afin de faire face au nombre considérable de demandes émanant de sociétés privées à la suite de la campagne de la Commission appelant à soutenir l’Ukraine («Stand for Ukraine»), un projet pilote a été élaboré en Belgique pour acheminer les dons du secteur privé dans le cadre de rescEU.

Face à la demande croissante de traitements médicaux, la Commission européenne (DG ECHO et DG SANTE) a mis au point un mode opératoire normalisé pour l’évacuation médicale (MEDEVAC) de personnes déplacées depuis l’Ukraine. La Pologne, la Moldavie, la Slovaquie et l’Ukraine ont appelé à l’aide pour des opérations d’évacuation médicale depuis leur territoire vers d’autres pays européens disposant de capacités hospitalières.


La prééminence grandissante du paradigme de l’approche « tous risques »

L’évaluation a montré que l’évolution des risques et du profil des menaces a mis à rude épreuve le mécanisme de protection civile. Cette vision est partagée par le Conseil européen, qui prône un système européen de gestion des crises élargi.
De manière générale, l’accent est mis sur le renforcement de la résilience européenne dans des domaines stratégiques dans le cadre d’une approche «tous risques» de la préparation et de la réaction recourant aux mécanismes pertinents, dont le mécanisme de protection civile. De plus, la capacité à préserver les fonctions sociétales repose sur la volonté des États membres d’intégrer systématiquement l’approche «tous risques» dans l’ensemble des politiques concernées, ce qui garantit une résilience dès la conception («resilience by design»).


Un impératif : la révision des systèmes d’alerte précoce


Le groupe de réflexion composé de scientifiques contribuant à l’évaluation du mécanisme de protection civile a inventorié des domaines pouvant faire l’objet d’une amélioration afin de renforcer la capacité des systèmes d’alerte précoce à accroître la préparation à l’échelle nationale et à celle de l’UE. Les systèmes d’alerte précoce pourraient notamment être révisés, afin:

  • de faire en sorte de réduire la fragmentation de l’information entre les systèmes d’alerte précoce de l’UE et les systèmes nationaux: il est en effet difficile de gérer une grande quantité d’informations provenant de différents systèmes et, partant, de mener rapidement à bien des évaluations d’experts lors des grands événements. De plus, les systèmes d’alerte précoce au niveau de l’UE pourraient influencer plus systématiquement les systèmes nationaux.
  • de couvrir plus de risques: les risques bénéficiant de la couverture la plus efficace de la part des systèmes d’alerte précoce et de surveillance étant les incendies de forêt, les inondations et les sécheresses, grâce à un suivi quasi instantané. Toutefois, le suivi des crues, des urgences sanitaires et d’autres catastrophes d’origine humaine ou anthropique pourrait être amélioré et rendu plus efficace.



Perspectives – Tirer les leçons du passé pour renforcer la capacité de l’UE à faire face aux crises

En Europe, le paysage des risques est en pleine mutation. De nos jours, l’UE fait face simultanément à une multitude de menaces et de défis caractérisés par leur diversité et leur complexité croissante. Selon le rapport, l’augmentation constante du nombre d’activations du mécanisme de protection civile ces dernières années donne à penser que cette tendance est là pour durer. Il estime que cela passe nécessairement par un mécanisme de protection civile renforcé à même de s’adapter à un paysage des risques en constante évolution. Pour ce faire, plusieurs recommandations stratégiques ont été élaborés.


Recommandation nº 1: développer les capacités du mécanisme de protection civile en matière de réponse opérationnelle


La réussite du mécanisme de protection civile repose essentiellement sur les capacités des États membres. Il convient de consolider encore ce socle, tout en promouvant l’approfondissement de la coopération au sein de la réserve européenne de protection civile et de rescEU. Selon le rapport, il est fondamental de doter la réserve européenne de protection civile et rescEU de moyens leur permettant de faire face efficacement aux risques transfrontières de grande ampleur à venir.


Recommandation nº 2: renforcer le centre de coordination de la réaction d’urgence

L’ERCC a fait la preuve qu’il était capable de travailler en étroite concertation avec différents services lors de situations d’urgence et de crises complexes (notamment dans des domaines tels que les menaces CBRN, les opérations civilo-militaires, les cyberattaques, les menaces hybrides et sanitaires, le soutien logistique aux opérations d’assistance consulaire, et le changement climatique). Selon le rapport, le fait d’élever l’ERCC au rang de plateforme transsectorielle de crise de la Commission aurait pour effet de réunir l’expertise sectorielle de divers domaines d’action et de garantir une cohérence et une efficacité opérationnelles globales dans le cadre d’un système de réaction en cas de crise de l’UE mieux intégré.


Recommandation nº 3: améliorer la coordination avec la défense et avec le secteur privé

Il importe par conséquent de veiller à ce que l’ensemble des processus de l’UE et des processus nationaux soient alignés  de manière à garantir une résilience dès la conception. Le pilier «prévention» du mécanisme de protection civile demande à être mieux articulé avec d’autres politiques et programmes de l’UE susceptibles d’influer sur la résilience sociétale.
De plus, le fait de réagir à des catastrophes civiles avec des moyens relevant de la sécurité ou de la défense nécessite une coordination systématique entre autorités civiles, de la sécurité et de la défense. L’ERCC devrait à ce titre intensifier sa coopération avec l’OTAN, le SEAE et les Nations unies (OCHA).
En outre, des efforts supplémentaires devraient être consentis pour renforcer la participation du secteur privé au niveau de l’UE dans des missions de protection civile spécialisées liées à la prévention, à la préparation et à la réaction. Il préconise de passer des accords de coopération stratégique avec les entités privées compétentes dans un cadre bien défini.


Recommandation nº 4: rationaliser le partage des connaissances


Les catastrophes à l’échelle de l’Union, doivent faire davantage l’objet d’évaluations des risques au niveau européen et au plan national. Le rapport préconise pour ce faire :
 une analyse plus approfondie des facteurs sous-jacents de risques et de menaces émergentes,
une mobilisation des ressources existantes dans les différents secteurs, tant au niveau de l’UE qu’au niveau national.
En outre, les autorités nationales de la protection civile devraient partager davantage leurs connaissances, en particulier l’expertise hautement spécialisée concernant les catastrophes à faible probabilité d’occurrence mais à fort impact. Le rapport préconise donc de renforcer le partage d’informations et l’interopérabilité des systèmes d’alerte précoce entre les États membres, en suivant une approche «tous risques». Selon lui, le couple MPCU/ERCC est bien positionné pour coordonner ces efforts. Il indiqu en outre aue le mécanisme de protection civile devrait être renforcé davantage pour relier les institutions scientifiques et les États membres et mettre ainsi des connaissances scientifiques à la disposition de l’ensemble des parties prenantes.



synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr

 

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