Pour aller aux États-Unis pas besoin de visa. Néanmoins l’administration américaine a introduit une nouvelle exigence pour participer au programme américain dit « d’exemption de visa ». Cette nouvelle exigence ? Conclure un «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) avec le ministère américain de la sécurité intérieure. Parmi les conditions requises pour ce partenariat : transférer des informations, notamment des données biométriques, aux autorités américaines, sur les voyageurs en partance pour un vol outre-atlantique. Certes, il existe déjà des accords UE-Etats-Unis, par exemple l’accord PNR (passenger Name Record) ou des accords d’entraide judiciaire. Cependant, ces partenariats renforcés destinés à être conclus vont un cran plus loin. Comme ils touchent les compétences de l’UE, un projet de recommendation est sur la table visant à donner un mandat à la Commission de négocier un accord européen. L’idée ? Conclure un accord-cadre UE-USA sur l’échange d’informations en vue du filtrage à des fins de sécurité et des vérifications d’identité concernant les voyageurs arrivant aux frontières.
De quoi parle-t-on ?
Dans le cadre des «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF), les États-Unis ont l’intention de mettre en place un échange d’informations sur:
- les voyageurs qui se rendent aux États-Unis et sont susceptibles d’avoir un lien avec le pays partenaire du programme d’exemption de visa;
- les personnes qui demandent à bénéficier des avantages liés à l’immigration ou de la protection humanitaire aux États-Unis;
- les personnes détectées par les services répressifs du ministère américain de la sécurité intérieure dans le cadre des contrôles frontaliers et de l’immigration aux États-Unis.
- ces échanges concernent des informations stockées dans les bases de données nationales des États membres. Sont visées également les données biométriques.
Les accords prévus par les PRSF devraient être conclus au plus tard le 31 décembre 2026.
Qu’est-ce que ce «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) ?
En 2022, les États-Unis d’Amérique ont introduit une nouvelle exigence pour tous les pays qui ont été intégrés dans le programme américain d’exemption de visa ou qui aspirent à l’être. Ce programme permet aux citoyens des pays participants de se rendre aux États-Unis sans visa pour une durée maximale de 90 jours à des fins touristiques ou professionnelles. La nouvelle exigence implique la conclusion d’un «partenariat renforcé pour la sécurité des frontières» (PRSF) avec le ministère américain de la sécurité intérieure.
Les partenariats exigés dans le cadre du programme d’exemption de visa concernent les contrôles aux frontières et l’immigration. Un de leurs objectifs est d’établir de solides échanges bilatéraux d’informations afin de permettre aux autorités d’authentifier efficacement l’identité des voyageurs en provenance de pays partenaires et de déterminer s’ils représentent une menace pour la sécurité des États-Unis.
Dans le cadre des partenariats relevant de leur programme d’exemption de visa, les États-Unis ont conclu des accords bilatéraux avec des États membres de l’UE, tels que les accords sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité. Ces accords établissaient un échange d’informations, y compris de données biométriques, sur les personnes soupçonnées d’infractions terroristes ou de formes graves de criminalité ou condamnées pour de tels actes.
Des partenariats renforcés pour plus de données
L’échange d’informations envisagé dans le cadre des PRSF diffère de l’échange au titre des accords déjà conclus sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité. Si l’objectif d’un échange d’informations au titre d’un accord sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de lutte contre la grande criminalité est de combattre le terrorisme et les formes graves de criminalité, l’objectif de l’échange d’informations dans le cadre des PRSF est potentiellement plus large, car il concerne également les domaines de la gestion des frontières et de la politique des visas.
Pourquoi l’UE intervient ?
La délivrance de visas et le mécanisme de détermination de la réciprocité en matière de visas relèvent de la compétence exclusive de l’Union. C’est également le cas des règles de l’Union en matière de protection des données.
Par conséquent, la conclusion, conformément aux exigences du programme américain d’exemption de visa, d’un accord-cadre avec les États-Unis sur l’échange d’informations en vue de la mise en place, par les États membres, d’un échange d’informations au titre des PRSF relève de la compétence exclusive de l’Union.
Compte tenu du lien avec cette compétence exclusive de l’Union en matière de politique commune de visas, le 12 juin 2024, les représentants permanents des États membres réunis au sein du Comité du Conseil de l’Union européenne (Coreper) a invité la Commission à présenter une proposition de mandat pour la négociation d’un tel cadre au nom de l’Union.
Quel est l’objectif de la recommandation ?
L’objectif de la recommandation proposée est de fournir à la Commission les directives de négociation lui permettant de négocier un accord-cadre qui définira la structure juridique et les conditions de l’échange d’informations entre les autorités des États membres de l’UE et des États-Unis. Il s’agit de définir la base duquel les États membres sont habilités à conclure des accords bilatéraux pour un échange d’informations avec les États-Unis à partir de leurs systèmes informatiques nationaux.
Quel est l’objectif de l’accord-cadre objet de la négociation?
L’un des principaux objectifs de l’accord-cadre est de garantir la réciprocité dans l’échange d’informations avec les États-Unis.
La teneur de l’échange d’informations – catégories et types de données, types de personnes et types d’infractions – sera définie au cours des négociations de manière à garantir l’équilibre et la réciprocité dudit échange.
Quels sont les arrangements bilatéraux ?
Sur la base du cadre pour l’échange d’informations fixé dans l’accord-cadre, les États membres seraient en mesure de négocier et de conclure des arrangements bilatéraux mettant en œuvre l’échange d’informations avec les États-Unis.
Ces arrangements bilatéraux fourniraient des précisions sur l’échange d’informations avec les autorités américaines compétentes, compte tenu des exigences légales nationales, de la structure des bases de données nationales et d’autres exigences ou limitations techniques.
Et du point de vue de l’UE ?
L’Union a élaboré une politique commune de visas pour les séjours de courte durée (90 jours maximum sur toute période de 180 jours). Actuellement, les ressortissants des États-Unis bénéficient d’un régime d’exemption de visa dans l’espace Schengen.
Le principe de réciprocité est l’un des fondements de la politique de l’UE en matière de visas à l’égard des pays tiers. La réciprocité signifie que, lorsque l’Union a accordé aux citoyens d’un pays tiers l’exemption de visa pour se rendre dans l’espace Schengen, elle attend du pays tiers qu’il fasse preuve de réciprocité en autorisant les citoyens de l’Union à se rendre sur son territoire sans qu’un visa ne soit nécessaire. La réciprocité totale a en effet été atteinte avec tous les pays tiers exemptés de l’obligation de visa, sauf les États-Unis. À l’exception de la Bulgarie, de Chypre et de la Roumanie, tous les États membres participent au programme américain d’exemption de visa. Parvenir à une réciprocité totale avec les États-Unis reste un objectif politique que l’Union cherche activement à atteindre.
Or, l’accord-cadre proposé garantirait une approche cohérente pour tous les États membres participant au programme d’exemption de visa en ce qui concerne les PRSF exigés.
Quelles sont les lignes rouges pour parvenir à un l’accord-cadre
L’accord-cadre avec les États-Unis est nécessaire pour atteindre l’objectif de réciprocité poursuivi par la politique commune de visas et garantir l’application du cadre de l’UE relatif à la protection des données. Par conséquent, les directives de négociation, annexées à la présente recommandation en vue de l’ouverture de négociations avec les États-Unis pour la conclusion d’un accord-cadre, sont fondées sur les exigences du cadre juridique applicable de l’UE en matière de protection des données [à savoir le règlement (UE) 2016/679 et la directive (UE) 2016/680].
- Les négociations devraient avoir pour objectif minimal de fixer un niveau d’échange d’informations adéquat, qui ne devrait pas dépasser celui de l’échange d’informations entre les États membres.
- Il convient que l’accord respecte les droits fondamentaux et observe les principes consacrés par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
- Il devrait être exclu de pouvoir lancer, de manière routinière et systématique, une requête concernant toutes les personnes voyageant entre l’UE et les États-Unis.
L’accord-cadre :
- établirait des garanties pour assurer la compatibilité avec les capacités des États membres, en s’appuyant sur la structure actuelle des bases de données nationales.
- devrait fixer un niveau adéquat d’échange d’informations entre l’UE et les États-Unis, qui ne devrait pas dépasser celui de l’échange d’informations entre les États membres dans un contexte bilatéral ou européen, dans le respect également des principes de proportionnalité et de nécessité.
- devrait préciser les conditions dans lesquelles une requête concernant un voyageur peut être lancée. La définition de ces conditions devrait, dans tous les cas, empêcher le lancement d’une requête concernant une personne sans suspicion préalable.
synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr
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