C’est
un secret pour personne : les cyberattaques menacent la stabilité de
l’UE et de ses Etats membres, notamment en mettant en péril leurs
infrastructures critiques. Une proposition de règlement vient
d’être présentée pour renforcer la cybersécurité. Ce « Cybersolidarity
Act », présenté en même temps que le projet de cyberacadémie, entend
développer la solidarité au niveau de l'Union afin de mieux détecter,
préparer et répondre aux menaces et incidents de cybersécurité.
- A lire sur securiteinterieure.fr : Le projet de cyberacadémie : le monde de la sécurité intérieure est aussi concerné
Une
telle initiative législative vient étoffer un paysage institutionnel
déjà fourni. Elle entend renforcer les capacités communes de détection,
de connaissance de la situation et de réaction de l'UE, afin de
constituer progressivement une réserve de cybersécurité au niveau de
l'UE avec des services de fournisseurs privés de confiance. Elle vise à
contribuer ainsi à la souveraineté technologique européenne dans le
domaine de la cybersécurité.
L’idée ? Déployer un mécanisme de
cyberurgence en cas d’attaques brutales et à grande ampleur et mettre en
place une « réserve de l'UE pour la cybersécurité » destiné à fournir
les renforts nécessaires pour réagir efficacement.
- A lire sur securiteinterieure.fr : Cybersécurité: l'Europe densifie son architecture institutionnelle pour se doter d'un "cyberbouclier"
De quoi parle-t-on ? Le cyberbouclier européen
Le
cyberbouclier européen, ou « bouclier cybernétique européen » est une
infrastructure paneuropéenne interconnectée de centres d'opérations de
sécurité. Son but est de développer des capacités avancées permettant à
l'Union de détecter, d'analyser et de traiter les données sur les
cybermenaces et les incidents dans l'Union.
Il se compose de tous
les centres d'opérations de sécurité nationaux («SOC nationaux») et de
tous les centres d'opérations de sécurité transfrontaliers («SOC
transfrontaliers»).
Pourquoi une cyberbouclier ? Assurer une réaction urgente pour contrer un risque d’un incident majeur
L’adoption
accrue des technologies numériques augmente l'exposition aux incidents
de cybersécurité. Dans le même temps, les États membres sont confrontés à
des risques croissants en matière de cybersécurité et à un paysage
global de menaces complexes.
Le risque est une propagation rapide des cyberincidents d'un État membre à d'autres.
- A lire sur securiteinterieure.fr : La stratégie de cybersécurité de l’UE déplore un retard de l'Europe à l'heure des tensions géopolitiques croissantes et au moment où la criminalité numérique est galopante
De plus, les
cyberopérations sont de plus en plus intégrées dans des stratégies
hybrides et de guerre, avec des effets importants sur la cible.
En
particulier, l'agression militaire de la Russie contre l'Ukraine a été
précédée et s'accompagne d'une stratégie de cyber-opérations hostiles.
Ceci
change la donne pour la perception et l'évaluation de la préparation
collective de l'UE à la gestion des crises de cybersécurité.
La
menace d'un éventuel incident à grande échelle causant des perturbations
et des dommages importants aux infrastructures critiques exige une
préparation accrue à tous les niveaux de l'écosystème de cybersécurité
de l'UE.
La nécessité d’une réponse européenne face à un risque qui dépasse le cadre national
La
menace d'un incident majeur va au-delà de l'agression militaire et
comprend des cybermenaces continues d'acteurs étatiques et non
étatiques, compte tenu de la multiplicité des acteurs criminels et des
hacktivistes impliqués dans les tensions géopolitiques actuelles.
Ces dernières années, le nombre de cyberattaques a considérablement augmenté.
Cela concerne les attaques de la chaîne d'approvisionnement, le cyberespionnage et les rançongiciels.
Ainsi, en 2020, l'attaque de la chaîne d'approvisionnement de SolarWinds a touché plus de 18 000 organisations dans le monde.
Or,
les incidents de cybersécurité importants peuvent être trop
perturbateurs pour qu'un seul ou plusieurs États membres concernés
puissent les gérer seuls.
C'est pourquoi une solidarité renforcée au
niveau de l'Union est nécessaire pour mieux détecter, préparer et
réagir aux menaces et incidents de cybersécurité.
Alors que de
nombreuses menaces et incidents de cybersécurité ont une dimension
transfrontière potentielle, en raison de l'interconnexion des
infrastructures numériques, le partage d'informations pertinentes entre
les États membres reste limité.
Construire un réseau de centres
d'opérations de sécurité (SOC) transfrontaliers pour améliorer les
capacités de détection et de réponse vise à aider à résoudre ce
problème.
D’où vient-on ?
En ce qui concerne la
préparation et la réaction aux incidents de cybersécurité, le soutien
au niveau de l'Union et la solidarité entre les États membres sont
actuellement limités.
Les conclusions du Conseil d'octobre 2021 ont souligné la nécessité de combler ces lacunes.
- A lire sur securiteinterieure.fr : Cadre
européen de certification, centre de recherche, cyberdissuasion : les
nouveautés du plan européen de 2017 en matière de cybersécurité
Le
cadre de l'UE comprend plusieurs législations déjà en place ou en
cours. Ces initiatives visent à réduire les vulnérabilités, à accroître
la résilience des entités critiques face aux risques de cybersécurité et
à soutenir la gestion coordonnée des incidents à grande échelle. Il
s’agit notamment de :
- la directive relative à des mesures pour un environnement niveau de sécurité des réseaux et des systèmes d'information dans l'Union (directive SRI2),
- le Cybersecurity act,
- la directive sur les attaques contre les systèmes d'information,
- la recommandation de la Commission du 13 septembre 2017 relative à une réponse coordonnée aux incidents et crises de cybersécurité à grande échelle.
- A lire sur securiteinterieure.fr : Cadre européen de certification, centre de recherche, cyberdissuasion : les nouveautés du plan européen de 2017 en matière de cybersécurité
La
stratégie de cybersécurité de l'UE adoptée en décembre 2020 avait a
annoncé la création d' un cyberbouclier européen, renforçant les
capacités de détection des cybermenaces et de partage d'informations
dans l'Union européenne par le biais d'une mise en réseaux de centres
d'opérations de sécurité (SOC) nationaux et transfrontaliers.
Quel est l’objectif du Cybersolidarity
Act ?
L'objectif global du cyberbouclier européen, qui est
de développer des capacités avancées permettant à l'Union de détecter,
d'analyser et de traiter les données sur les cybermenaces et les
incidents dans l'Union. Il compose objectifs opérationnels spécifiques:
- renforcer la détection commune de l'UE et la connaissance de la situation des cybermenaces et des incidents;
- renforcer la préparation des entités critiques dans l'ensemble de l'UE
- développer des capacités de réaction communes contre les incidents de cybersécurité significatifs ou à grande échelle;
- examiner et évaluer les incidents significatifs ou à grande échelle, y compris en tirant les leçons de l'expérience et, le cas échéant, en formulant des recommandations.
Ces objectifs seront mis en œuvre à travers:
- Le déploiement d'une infrastructure paneuropéenne de SOC (European Cyber Shield) pour construire et améliorer des capacités communes de détection et de connaissance de la situation.
- La création d'un mécanisme d'urgence cybernétique pour aider les États membres à se préparer, à réagir et à se rétablir immédiatement après des incidents de cybersécurité importants et à grande échelle. Un soutien à la réaction aux incidents est également mis à la disposition des institutions européennes, organes, offices et agences de l'Union,
- La mise en place d'un mécanisme européen d'examen des incidents de cybersécurité pour examiner et évaluer des incidents spécifiques significatifs ou à grande échelle.
Le cœur battant du cyberbouclier : les centres d'opérations de sécurité
Le
bouclier se compose de centres d'opérations de sécurité nationaux («SOC
nationaux»). Un SOC national est désigné par chaque État membre
participant.
Celui-ci servira de point de référence et de passerelle
vers d'autres organisations publiques et privées au niveau national
pour la collecte et l'analyse d'informations sur les menaces et
incidents de cybersécurité et la contribution à un SOC transfrontalier.
- A lire sur securiteinterieure.fr : L'impulsion politique est donnée pour des schémas de certification de cybersécurité, une capacité de cyber-renseignement et des centres de surveillance des cybermenaces
Afin de participer au
cyberbouclier européen, chaque État membre désigne au moins un SOC
national. Le SOC national est un organisme public.
Il doit avoir la
capacité de servir de point de référence et de passerelle vers d'autres
organisations publiques et privées pour collecter et analyser des
informations sur les menaces et incidents de cybersécurité.
Il doit
être équipé de technologies de pointe capables de détecter, d'agréger et
d'analyser les données relatives aux menaces et aux incidents de
cybersécurité.
Des liens étroits entre les SOC et le EU-CyCLONe
Le
Cybersolidarity
Act s'appuiera et soutiendra notamment les cadres existants de
coopération opérationnelle et de gestion de crise en matière de
cybersécurité, en particulier le réseau européen des organisations de
liaison en cas de crise cybernétique (EU-CyCLONe) et le réseau des
équipes de réponse aux incidents de sécurité informatique (CSIRT).
- A lire sur securiteinterieure.fr : Directive "SRI 2" : l’Europe crée un CyCLONe pour gérer les crises cyber
Lorsque
les SOC transfrontaliers obtiennent des informations relatives à un
incident de cybersécurité à grande échelle potentiel ou en cours, ils
fournissent les informations pertinentes à EU CyCLONe, au réseau des
CSIRT et à la Commission, compte tenu de leurs rôles respectifs de
gestion de crise conformément à la directive (UE) 2022/2555.
- A lire sur securiteinterieure.fr : Infrastructures critiques : l'accent est désormais mis sur la résilience des opérateurs eux-mêmes
À la demande de la Commission, de l'EU-CyCLONe ou du réseau des CSIRT, l'ENISA devrait examiner et évaluer les menaces.
Il
doit apprécier les vulnérabilités et les mesures d'atténuation.
L'examen et l'évaluation doivent être fournis par l'ENISA sous la forme
d'un rapport d'examen d'incident au réseau des CSIRT, à l'EU-CyCLONe et à
la Commission.
Lorsque l'incident concerne un pays tiers, le rapport doit être partagé par la Commission avec le haut représentant.
Les nouveaux nés : les SOC transfrontaliers et les plates-formes transfrontalières des SOC
Le
bouclier se compose de «SOC nationaux» ainsi que de centres
d'opérations de sécurité transfrontaliers («SOC transfrontaliers»).
À
la suite d'un appel à manifestation d'intérêt, les SOC nationaux sont
sélectionnés par le Centre européen de compétences en matière de
cybersécurité («ECCC») pour participer à un marché commun d'outils et
d'infrastructures avec l'ECCC.
Les SOC transfrontaliers sont
constitués d'un consortium d'au moins trois États membres, représentés
par des SOC nationaux, qui s'engagent à travailler ensemble pour
coordonner leurs activités de cyberdétection et de surveillance des
menaces.
Les SOC nationaux participant à un SOC transfrontalier doivent partager entre eux les informations liées aux cybermenaces.
- A lire sur securiteinterieure.fr : L'impulsion politique est donnée pour des schémas de certification de cybersécurité, une capacité de cyber-renseignement et des centres de surveillance des cybermenaces
Quant aux
plates-formes transfrontalières des SOC, ils devraient constituer une
nouvelle capacité complémentaire au réseau des CSIRT :
- en mettant en commun et en partageant les données sur les menaces de cybersécurité provenant d'entités publiques et privées,
- en valorisant ces données grâce à des analyses d'experts et à des outils de pointe,
- en contribuant au développement des capacités et de la souveraineté technologique de l'Union.
La création d’un mécanisme de cyberurgence comprenant des tests concoctés par l’ENISA
Un
mécanisme de cyberurgence est instauré pour améliorer la résilience de
l'Union face aux menaces majeures en matière de cybersécurité.
Le
mécanisme prévoit des actions pour soutenir la préparation, y compris
des tests coordonnés d'entités opérant dans des secteurs hautement
critiques, une réponse et un rétablissement immédiat à la suite
d'incidents de cybersécurité importants ou à grande échelle ou pour
atténuer les cybermenaces importantes et des actions d'assistance
mutuelle.
Les actions de préparation du mécanisme d'urgence
cybernétique comprennent les tests de préparation coordonnés des entités
opérant dans des secteurs hautement critiques.
La Commission, après
consultation du groupe de coopération SRI et de l'ENISA, identifie les
secteurs à partir desquels les entités peuvent être soumises aux tests.
Le
groupe de coopération SRI, en coopération avec la Commission, l'ENISA
et le haut représentant, élabore des scénarios de risque communs et des
méthodologies pour les exercices d'essai coordonnés.
La création d’une « réserve de l'UE pour la cybersécurité »
Cette
initiative législative établit une réserve de cybersécurité de l'UE
afin d'aider les utilisateurs à réagir aux incidents de cybersécurité à
grande échelle.
Cette réserve est composée de services de réaction
aux incidents fournis par des fournisseurs de confiance. Ces
fournisseurs sont sélectionnés conformément aux critères définis dans
cette initiative.
Les utilisateurs des services de la réserve de
cybersécurité de l'UE comprennent notamment les autorités de gestion des
crises cybernétiques des États membres et les CSIRT.
Les
utilisateurs emploient les services de la réserve de cybersécurité de
l'UE pour assurer le rétablissement immédiat en cas d'incidents
significatifs ou à grande échelle affectant des entités opérant dans des
secteurs critiques ou hautement critiques.
Les utilisateurs des
services de la réserve de cybersécurité de l'UE comprennent les
autorités de gestion des crises cybernétiques des États membres et les
CSIRT ainsi que les institutions, organes et agences de l'Union.
La Commission assume la responsabilité globale de la mise en œuvre de la réserve de cybersécurité de l'UE.
Elle peut confier, en tout ou en partie, à l'ENISA le fonctionnement et l'administration de la réserve de cybersécurité de l'UE.
D’ailleurs,
afin d'aider la Commission à établir la réserve de cybersécurité de
l'UE, l'ENISA prépare une cartographie des services nécessaires.
Un mécanisme de cyberurgence subsidiaire au mécanisme européen de protection civile
Le
mécanisme d'urgence cybernétique devrait également fournir un soutien
aux actions de réponse aux incidents afin d'atténuer l'impact
d'incidents de cybersécurité significatifs. Le cas échéant, il devrait
compléter le MPCU afin d'assurer une approche globale pour répondre aux
impacts des cyberincidents sur les citoyens.
- A lire sur securiteinterieure.fr : Protection civile : un sauf qualitatif majeur est en vue
Plus généralement, le dispositif ainsi conçu complète le mécanisme de protection civile de l'Union (MPCU)
établi en décembre 2013 et complété par une nouvelle législation
adoptée en mai 2021, qui renforce les piliers de prévention, de
préparation et de réaction du MPCU et donne à l'UE des capacités
supplémentaires pour répondre aux nouvelles risques en Europe et dans le
monde et renforce la réserve rescEU.
Un mécanisme subsidiaire dispositifs intégrés de réaction aux crises politiques
Dans
les cas où des incidents de cybersécurité significatifs ou à grande
échelle ont pour origine ou entraînent des catastrophes, les dispositifs
intégrés de réaction aux crises politiques (IPCR) sont déclenchés.
L'aide fournie est alors gérée conformément aux protocoles et procédures applicables au titre de l'IPCR.
traduction et synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr
A lire sur securiteinterieure.fr :
- Le projet de cyberacadémie : le monde de la sécurité intérieure est aussi concerné
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