Schengen nourrit bon nombre de fantasmes et les promesses idéologiques véhiculées lors de la campagne électorale ne contribuent pas à apaiser la situation.
Pourtant, Schengen est avant tout une collaboration concrète destinée à répondre à des défis très pragmatiques. La France se trouve au 1er rang, tant du point de vue de la conception des solutions que de leur mise en œuvre.
Le Sénat a publié il y a peu un rapport d’information qui se révèle être une mine d’information pour dresser un bilan de la place actuel de la France dans la coopération Schengen.
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La 2e partie est publiée ci-dessous.
- Pour la première partie, voir : Les autorités françaises face au défi de l’espace Schengen : que fait concrètement la France pour renforcer la sécurité ? (1ère partie)
5e axe : le couteau suisse, les centres de coopération policière et douanière (CCPD) auxquels la France prend part
Il existe actuellement 10 centres de coopération policière et douanière (CCPD), dont 4 sont situés sur le territoire national, Le Perthus (Pyrénées-Orientales), Melles-Pont-du-Roy (Haute-Garonne), Canfranc et Hendaye (Pyrénées-Atlantiques), et six à l'étranger : Tournai, Luxembourg (avec la Belgique, l'Allemagne et le Luxembourg), Kehl, Genève, Modane et Vintimille.
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Leur domaine d'action est essentiellement centré sur la petite et moyenne délinquance. Ils disposent néanmoins de missions globalement similaires :
- le recueil, l'analyse et la diffusion des informations pour le bon fonctionnement de la coopération policière et douanière dans la zone frontalière ;
- l'appui à la coopération transfrontalière : dédiés à l'échange de renseignements, les CCPD ne disposent pas de pouvoirs opérationnels. Ils facilitent néanmoins la coopération transfrontalière directe des services territoriaux ;
- la contribution à la coordination de mesures opérationnelles ou d'intervention au profit des services nationaux et locaux ;
- des missions subsidiaires de soutien à l'action des autorités centrales de leurs États, d'une part en matière d'observations transfrontalières et de poursuites transfrontalières, d'autre part, en matière d'éloignement et de réadmission de personnes.
Le centre franco-allemand de coopération policière et douanière (CCPD) de Kehl participe également à la lutte contre la fraude documentaire.
Dans ce cadre, il a un partenariat avec Frontex par le déploiement d'agents pour le contrôle des titres d'identité délivrés par la France. Sa cellule « immigration/fraude documentaire » a ainsi reçus 1 000 à 1 500 documents d'identité adressés par les Allemands pour contrôle de leur validité - dont les 3 quart étaient faux, qu'il s'agisse de falsification, de contrefaçon ou encore d'obtention indue, le plus difficile à détecter.
Les agents présents sur place ont confirmé la progression des obtentions indues de documents qu'ils soient d'identité (notamment les faux permis de conduire pour obtenir d'autres documents) ou autres (faux contrats de travail, fausse reconnaissance de paternité, etc.).
6e axe : la France face au défi crucial de l'interopérabilité des systèmes d’information
La communication de la Commission intitulée Des systèmes d'information plus robustes et plus intelligents au service des frontières et de la sécurité a identifié plusieurs scenarii correspondant chacun à une dimension de l'interopérabilité, dont la création d'une interface de recherche unique. Cette solution permet d'interroger simultanément plusieurs systèmes d'information à partir d'une plateforme unique, sans modifier les droits d'accès spécifiques à chaque autorité.
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La France dispose déjà d'une application, dénommée COVADIS (Contrôle et vérification automatique des documents d'identité sécurisés), qui permet d'interroger simultanément le Système d’information Schengen (SIS) de 2e génération, le Système d’information sur les visas (VIS), le fichier des documents de voyage volés et perdus d'Interpol (SLTD), le fichier des personnes recherchées (FPR) et la Base de données pour les visas français hors Schengen (VISABIO), à partir des informations d'identité et d'identification du document recueillies à la lecture des documents de voyage.
La police aux frontières et la Direction générale des étrangers en France (DGEF) ont également indiqué qu'un nouvel outil de contrôle de première ligne serait expérimenté d'ici l'été 2017, grâce auquel les garde-frontières dans les aubettes auront un accès étendu aux bases de données (le fichier des objets et des véhicules signalés (FOVeS) et le Fichier de contrôle de la validité des cartes d'identité et des passeports (Docverif)), pourront interroger les bases à l'aide de la lecture des puces de documents de voyage et procéder à un contrôle biométrique des empreintes digitales et de la photographie du portrait pour tous les voyageurs.
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À l'occasion de l'adoption de la feuille de route sur l'échange d'informations, le Conseil de l’UE s'est, quant à lui, clairement prononcé en faveur de la mise en œuvre prioritaire d'une interface unique de consultation et d'alimentation des systèmes d'informations nationaux et européens, même si l'interconnexion, la mise en place d'un service partagé de mise en correspondance de données biométriques et la création d'un répertoire commun de données pourraient être envisagés à moyen et long termes.
À l'instar d'autres politiques de l'Union, les initiatives en faveur d'une meilleure interopérabilité des systèmes d'information ont connu une nette accélération en 2015 et 2016.
Les propositions législatives concernant les futurs systèmes EES et ETIAS (Système d'entrée/sortie et Système européen d'information et d'autorisation de voyage (ETIAS)) intègrent ainsi clairement cette préoccupation, tandis qu'un projet pilote auquel la France participe, baptisé ADEP (Automated Data Exchange Process) et permettant une consultation automatisée des fichiers d'antécédents de police européens, pourrait constituer un embryon d'un système d'index européen des registres de police (EPRIS).
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7e axe : un projet précurseur, le dispositif PNR (Passenger Name Record) français
5ans après la publication de la proposition législative de la Commission, la directive relative à l'utilisation des données des dossiers passagers (Passenger Name Record - PNR) a été définitivement adoptée par le Parlement européen et le Conseil en avril 2016.
Compte tenu du délai de transposition de deux ans de la directive - soit au plus tard le 25 mai 2018 - et du temps nécessaire à la mise au point, sur le plan technique, de tels dispositifs - à titre indicatif, la France a mis cinq ans à développer son propre système - il n'est pas improbable que le réseau de PNR nationaux ne soit pleinement opérationnel qu'à l'horizon 2020.
La France est le cinquième pays à se doter d'un PNR après les États-Unis, le Canada, l'Australie et le Royaume-Uni.
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Un décret de 2014 a formellement porté création d'un traitement de données à caractère personnel, dénommé « système API-PNR » à titre expérimental jusqu'au 31 décembre 2017. Un autre décret de 2014 a créé l'Unité Informations Passagers (UIP), chargée de la collecte des données de réservation et d'enregistrement des passagers transmises par les transporteurs aériens.
Ce service interministériel réunit des personnels issus de quatre ministères (intérieur, finances - douanes -, défense et transports - DGAC) et rend compte à un comité d'orientation présidé par la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).
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L'expérimentation du système API-PNR, financée à hauteur de 17,8 millions d'euros par l’UE, a débuté en juin 2016. L'objectif est de raccorder 230 compagnies aériennes, soit l'équivalent de 100 millions de passagers.
- le
système API-PNR France recueille à la fois les données de réservation
(données PNR) et les données d'enregistrement et d'embarquement (données
API).
Les données API sont moins nombreuses et plus tardives, mais sont beaucoup plus fiables dans la mesure où elles sont recoupées avec les bandes MRZ des titres d'identité ; - il s'agit d'un fichier à
accès indirect, accessible uniquement aux personnels de l'UIP afin de
garantir qu'aucun service utilisateur ne puisse accéder à des données
auxquelles il n'est pas censé pouvoir accéder.
L'analyse des données est cependant effectuée par les services « historiques » compétents en la matière et non en interne par l'UIP ; - une copie partielle du
fichier des personnes recherchées (FPR) est enregistrée afin de
permettre la mise en relation des données enregistrées dans API-PNR avec
celles du FPR.
Sont également enregistrées les informations issues de la mise en relation des données API et PNR avec : - les traitements FPR,
- le système d'information Schengen de deuxième génération (SIS II),
- le fichier des objets et des véhicules signalés (FOVeS),
- le système informatisé concourant au dispositif de lutte contre les fraudes (SILCF),
- le fichier des documents de voyage volés et perdus d'Interpol (SLTD).
8e axe : la contribution (notable) de la France dans l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes
Avec l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes créé en 2016, la nature même des missions de Frontex change. Pour mettre en œuvre ses nouvelles missions, Frontex est désormais dotée de deux réserves opérationnelles.
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La police aux frontières a fourni pour ces opérations 265 experts répartis de la façon suivante :
- 19 experts aux frontières terrestres extérieures, notamment sur les frontières finno-russe, bulgaro-turque, gréco-albanaise, serbo-hongroise, gréco-turque, moldaves et bosniennes ;
- - 135 experts dans les hotspots grecs, 88 experts dans les hotspots italiens et 9 experts déployés en Espagne, dont 6 dans le cadre de l'opération INDALO et 3 dans le cadre de l'opération MINERVA ;
- 14 experts dans le cadre de différentes opérations aériennes.
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Depuis l'entrée en vigueur du nouveau règlement, Frontex peut faire appel à trois viviers différents :
- la réserve d'action rapide de 1 500 garde-frontières et garde-côtes, la France devant dans ce cadre fournir 170 agents, répartis, au terme d'un arbitrage interministériel, comme suit : 125 agents du ministère de l'intérieur, dont 23 agents de la police aux frontières, 20 agents des douanes et l'équivalent en jours-hommes de 25 agents du ministère de la défense ;
- le vivier des opérations conjointes spécifiques programmées à l'année dans le cadre des négociations bilatérales annuelles et des interventions rapides aux frontières ;
- les réserves des retours forcés, composées de 600 escorteurs, 50 contrôleurs et 40 spécialistes des questions de retour.
Bien que la contribution à ces deux derniers viviers ne soit pas obligatoire, la France devrait y participer.
9e axe : l’extension à venir du dispositif « passage automatisé rapide aux frontières extérieures » (PARAFE)
Afin de fluidifier le contrôle aux frontières et d'optimiser les moyens humains disponibles, la France a accru le recours aux systèmes automatisés de contrôle des personnes. La police aux frontières française utilise à ce sujet le dispositif « Passage automatisé rapide aux frontières extérieures » (PARAFE).
Le passager entre dans un sas automatique. Après avoir posé son doigt sur un capteur, le contrôle biométrique est effectué. Dans l'hypothèse où la consultation d'une base de données (Système d’information Schengen (SIS), base de données d'Interpol sur les documents de voyage (SLTD), Fichier des personnes recherchées (FPR)) s'est révélée positive, le dispositif émet une alerte à l'attention du superviseur et le sas se ferme automatiquement.
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Sur la période 2015-2016, une augmentation de plus de 50 % du trafic dans les sas PARAFE a été enregistrée. À l'aéroport de Roissy, les sas PARAFE traitent en moyenne 35 000 passagers par semaine.
Le parc actuel compte 44 sas PARAFE : 31 à l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, 5 à l'aéroport de Paris-Orly, 4 à celui de Marseille-Provence et 4 à la gare de Saint-Pancras, à Londres, où la police aux frontières dispose de bureaux à contrôles nationaux juxtaposés. La Direction générale des étrangers en France (DGEF) du ministère de l'intérieur a indiqué à votre commission d'enquête que 20 sas PARAFE seront installés en 2017 à l'aéroport Lyon-Saint-Exupéry.
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Concernant la police aux frontières et les douanes, si leurs effectifs supplémentaires permettent de répondre aux besoins aux frontières intérieures, ils semblent insuffisants pour faire face à l'accroissement des missions de contrôle aux frontières extérieures à moyen terme.
La politique d'automatisation et de modernisation des contrôles aux frontières - acquisition de nouveaux sas PARAFE, achat de tablettes Néo connectées, etc. - ainsi que le développement des systèmes d'information et de leur interopérabilité nécessiteront également des investissements importants de l'État à court et moyen termes.
10e et dernier axe : le futur, l’instauration d’un PARAFE de 2e génération et d’un dispositif « pré-check »
Dans le cadre du programme « Frontières intelligentes » de l'Union européenne, la police aux frontières expérimente jusqu'au mois d'avril 2017 des sas PARAFE dit « de deuxième génération » mettant en œuvre la technique biométrique de la reconnaissance faciale : la photographie prise par l'automate est comparée avec celle figurant dans la puce et sur la page du passeport. Ce nouveau dispositif devrait permettre des passages en 10 secondes. 40 % des passagers, à savoir les bénéficiaires de la libre circulation détenteurs de passeports biométriques, pourraient ainsi y être éligibles, ce qui permettrait d'absorber une hausse du trafic de 3 % par an à court terme, à effectifs constants.
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Une extension aux ressortissants hors UE, non bénéficiaires de la libre circulation, n'est en effet pas immédiatement envisageable. S'il est possible d'interfacer PARAFE avec le systèmes VIS (Système d’information sur les visas) et la Base de données pour les visas français hors Schengen (VISABIO), leur contrôle implique également une vérification des justificatifs relatifs à l'objet et aux conditions du séjour, ainsi que des moyens de subsistance, qui ne saurait être automatisée.
Par ailleurs, poursuivant le même objectif de fluidification des contrôles, Aéroport de Paris (ADP) et les services de l'État rencontrés à l'aéroport de Roissy ont mis en avant un autre projet participant de la « digitalisation » du parcours passager : le « pré-check ». Ce dispositif permettrait de scanner le passeport en amont du passage à la frontière, d'interroger les bases des données dans l'intervalle et ainsi d'accélérer le passage de la frontière lui-même.
synthèse du rapport par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr
A lire sur securiteinterieure.fr :
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A ne pas manquer, un article écrit par securiteinterieure.fr et paru sur The Conversation et sur Slate.fr :
Schengen est-il compatible avec la lutte antiterroriste ?
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