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lundi 18 janvier 2016

Stratégie et programme européens de sécurité : l’Assemblée nationale veut que l’UE aille plus loin dans la cybersécurité et la lutte antiterroriste


"Bien, mais peut mieux faire"... et notamment en matière de cybersécurité et de sécurité ferroviaire pour mieux lutter contre le terrorisme. Voici l’appréciation que les députés de l'Assemblée nationale ont émise dans une résolution européenne adoptée sur le programme européen de sécurité de 2015 ((à lire sur securiteinterieure.fr : Le nouveau "programme européen de sécurité" préconise un "espace européen de sécurité intérieure" et un "centre européen de lutte contre le terrorisme").

Le rapport d'information accompagnant cette résolution signale plusieurs points importants :
Surtout, les députés :
En revanche, ils regrettent que certains points du programme ne soient pas suffisamment précis et ils veulent aller plus loin encore pour :
  • assurer la sécurité dans les transports terrestres, notamment ferroviaire ;
  • trouver une réponse au phénomène des combattants étrangers ;
  • bâtir un dialogue avec les grands opérateurs d’internet ;
  • créer un Parquet européen aux compétences élargies.

Un rôle important à jouer pour l'UE afin de mieux protéger à la France dans un monde dangereux

D’après l’Assemblée nationale, l’Union européenne et ses États membres sont confrontés à d’importants problèmes de sécurité. L’évolution de l’environnement sécuritaire international, en particulier depuis le début des années 2000, illustre la vulnérabilité des sociétés face à des menaces nouvelles et l’interdépendance croissante des États :
  • le terrorisme et la criminalité organisée ne sont pas des menaces nouvelles pour la sécurité, leur nature et leur ampleur ont changé. Les évolutions techniques et technologiques des sociétés ont en outre permis l’émergence d’une forme nouvelle de criminalité - la cybercriminalité – qui ne connaît pas de frontières ;
  • l’afflux massifs de migrants en provenance de zones en conflit et la radicalisation est observable partout en Europe et notamment dans le départ des ressortissants de l’Union européenne pour rejoindre des groupes terroristes - phénomène dit des combattants étrangers ;
  • la criminalité organisée transfrontière et, en particulier, le trafic des êtres humains, continue de représenter une menace pour la sécurité intérieure de l’Union européenne et est, à cet égard, un défi particulièrement important.

Un rôle néanmoins subsidiaire

Selon l’Assemblée nationale, l’UE a un rôle à jouer dans l’impulsion et la coordination des actions mises en œuvre aux plans nationaux. Son intervention en matière de sécurité présente une incontestable valeur ajoutée pour la lutte contre des phénomènes ou menaces criminels étrangers à la notion de frontière.

Le caractère de plus en plus transfrontière des actes criminels et des menaces rappelle que les États membres et l’Union européenne ont une responsabilité commune en matière de sécurité et doivent agir de concert.
A cet égard, si le partage des compétences établi par les traités prévoit que la sécurité nationale et le maintien de l’ordre public incombent aux États membres, l’Union européenne dispose, en matière de sécurité, d’une compétence d’appui et a un rôle majeur à jouer dans l’impulsion ou la coordination des actions mises en œuvre au plan national.

Le bilan sécuritaire 2010-2015 : des réalisations incontestables

Sur la période couverte, l’Assemblée nationale estime que la stratégie de sécurité intérieure a été le pivot des initiatives entreprises en matière de sécurité et a permis de renforcer l’approche intersectorielle des questions de sécurité, ainsi que les capacités d’action de l’Union européenne, en particulier s’agissant du rôle de coordination du comité permanent de coopération opérationnelle en matière de sécurité intérieure (COSI) ((à lire sur securiteinterieure.fr : D’après le rapport sénatorial sur la lutte contre les filières jihadistes, la France refuse l’idée d’un "service de renseignement européen").

On peut ainsi noter, d’après les députés, l’adoption de directives ambitieuses renforçant l’harmonisation des législations nationales, s’agissant notamment de la prévention de la traite des êtres humains ; de la lutte contre les abus sexuels, l'exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie ; ou encore des attaques contre les systèmes d’information.
L’entrée en vigueur de la nouvelle législation sur la gouvernance de Schengen vise quant à elle à améliorer l’évaluation et la surveillance, à fournir le soutien nécessaire aux États membres et à combler les lacunes éventuelles pour maintenir la confiance mutuelle au sein de l’espace Schengen.

La stratégie de sécurité intérieure a permis, toujours d’après eux, d’accroître la coopération opérationnelle entre États membres, institutions et agences de l’Union européenne.
Le soutien accru d’EUROPOL et d’EUROJUST aux enquêtes, dans le cadre des équipes communes d’enquête (ECE), et les objectifs stratégiques et programmes d’actions à mener dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, déterminés par les États membres, sur la base de l’évaluation des menaces par EUROPOL (rapports SOTCA) sont ainsi d’importantes réalisations.

De nouvelles structures ou enceintes de coopération ont également été créées, à l’instar du cycle politique de l’Union européenne pour lutter contre la grande criminalité organisée, du réseau européen de sensibilisation à la radicalisation (RSR) et du Centre européen de lutte contre la cybercriminalité (EC3). Ce dernier devient une référence pour les questions de cybersécurité et compte déjà à son actif des coopérations fructueuses avec les États membres, EUROJUST et des pays tiers.

L’avenir : une approche globale, équilibrée et tournée vers l’efficacité

Le programme européen de sécurité s’inscrit dans la continuité de la Stratégie de sécurité intérieure (SSI) 2010-2014. Les évolutions du contexte sécuritaire ont toutefois conduit à un ajustement des priorités, moyens d’actions et instruments dans le programme pour 2015-2020.

Le programme pour la période 2015-2020 fixe trois priorités interdépendantes et complémentaires : la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et la cybercriminalité. De manière plus générale, les objectifs stratégiques définis dans la stratégie de sécurité intérieure 2010-2014 demeurent valables et sont maintenus.

Le programme définit une approche globale dont la réussite repose sur un triptyque associant partage des responsabilités, confiance mutuelle et coopération effective entre tous les acteurs : institutions et agences de l’Union européenne, États membres et autorités nationales, voire société civile.

Ambitieux, le programme européen de sécurité se propose d’ouvrir plusieurs chantiers d’importance, par exemple l’accent sur la prévention et la déradicalisation : les actions de prévention de la radicalisation constituent l’un des principaux axes du programme européen de sécurité et s’articulent principalement autour du contrôle des messages diffusés sur Internet, de la construction d’un contre-discours de tolérance et d’une étroite coopération avec les grands opérateurs d’Internet. L’éducation et la formation ont également un rôle important à jouer.

Aller plus loin : créer un Parquet européen aux compétences élargies et un corps de garde-frontières européen

Les députés  estiment regrettable que certains projets ou mesures ambitieux ne figurent pas dans le programme de sécurité pour 2015-2020.
Ils déplorent l’absence, d’orientations, de précisions ou de moyens dédiés significatifs dans le programme, en particulier dans le domaine de la prévention des comportements délinquants ou criminels et des aspects liés au rôle de l’éducation et de la formation.
Ils réitèrent :
  • leur volonté d’un corps de garde-frontières « européen » tout au long des frontières communes ;
  • une meilleure coordination des services et agences existant dans le domaine de la police (EUROPOL) et de la justice (EUROJUST) et ils insistent sur l’indispensable coordination et coopération des services de sécurité nationaux et des moyens existant au niveau européen.

En outre, ils déplorent qu’aucune mention ne soit faite du projet de Parquet européen dans le programme européen de sécurité.
Conformément à une position constante de notre Commission, ils rappellent leur vif soutien à ce projet ainsi que leur souhait de voir les compétences du Parquet européen élargies à la criminalité transfrontière.
Une telle avancée permettrait en effet de donner à l’Union européenne et aux États membres les moyens d’apporter une réponse commune efficace et cohérente sur l’ensemble du territoire européen en matière de sécurité.

Trouver une réponse au phénomène des combattants étrangers

Les attentats survenus à Paris le 13 novembre 2015 illustrent de façon tragique le phénomène des combattants étrangers. L’importance prise par l’augmentation du nombre de combattants étrangers, en particulier parmi les jeunes européens, rend indispensable une réflexion sur les réponses qui peuvent être apportées à ce phénomène nouveau et préoccupant.

Selon le Coordinateur européen de la lutte contre le terrorisme, près de 5 000 personnes seraient concernées, en particulier en France, au Royaume-Uni, en Espagne, en Belgique et aux Pays-Bas.
Les solutions jusque-là esquissées par les États membres pourraient faire l’objet de discussions et un consensus s’est dégagé sur le rôle que peut jouer l’Union européenne pour faciliter et promouvoir les échanges d’expériences et de bonnes pratiques ainsi que sur l’appui financier que peut apporter la Commission européenne à des initiatives locales.
Les députés saluent cette démarche et demandent à ce que l’implication de tous les acteurs s’intensifie sur ce point.

Autre critique : bâtir un dialogue avec les grands opérateurs d’internet

Les députés estiment, qu’à l’image de la démarche entreprise en France par le ministre de l’Intérieur, l’Union européenne devrait s’efforcer d’établir un dialogue et un partenariat constructifs avec les grands opérateurs d’Internet dont la coopération est essentielle au succès de la lutte contre le terrorisme.

En France, l’accent a été mis sur la nécessité de responsabiliser les acteurs du secteur. Ainsi, le recours à une réglementation a été écarté au profit d’une démarche plus souple associant davantage les opérateurs d’Internet à la mise en place d’une stratégie coopérative pour lutter contre la propagande terroriste en ligne.
Réunis le 22 avril 2015, le Ministre de l’Intérieur français et les grands opérateurs d’Internet se sont accordés sur la nécessité de mettre en place une plateforme de bonnes pratiques dans le cadre de la lutte contre la propagande terroriste sur Internet.
Cette plateforme prévoit notamment la création d’un label permettant le retrait plus rapide des contenus illicites sur Internet, le renforcement de la formation destinée aux policiers et aux gendarmes sur ces questions et la création d’un groupe de contact permanent entre le ministère et les opérateurs afin d’améliorer la réactivité opérationnelle.

Le programme européen de sécurité indique que l’Union européenne doit combler les lacunes éventuelles de la lutte contre l’incitation à la haine en ligne et propose la création d’un forum de l’Union européenne avec le secteur informatique.
À ce propos, lors d’une conférence consacrée à la radicalisation réunissant, le 19 octobre 2015, les ministres de la Justice des États de l’Union européenne, la Commission européenne s’est engagée à organiser, au mois de décembre 2015, un Forum avec le secteur informatique - fournisseurs d’accès à Internet et représentants des réseaux sociaux -, les autorités répressives et la société civile dans le cadre de la lutte contre la propagande terroriste en ligne.

Les députés invitent l’Union européenne et les États membres à poursuivre dans cette voie, en tirant utilement parti d’une coopération avec le secteur privé.
Ces engagements devraient en outre faire l’objet d’une action législative au niveau de l’Union européenne afin de créer ou, a minima, d’harmoniser les outils permettant de lutter efficacement contre la haine et la criminalité en ligne.

Dernière critique : assurer la sécurité dans les transports terrestres

La sécurité des transports terrestres, qui n’est pas abordée spécifiquement dans le programme européen de sécurité, a fait l’objet d’une attention renouvelée suite aux événements de l’été 2015.
L’attaque déjouée à bord d’un train Thalys le 21 août 2015 a donné lieu à une réunion extraordinaire d’un groupe d’experts de l’Union européenne sur la sûreté des transports terrestres (LANDSEC) le 11 septembre 2015 portant sur la sécurité des voyageurs empruntant les voies de chemins de fer.

A cette occasion, les États membres, la Commission européenne et les opérateurs se sont entendus sur la nécessité d’apporter une réponse coordonnée et proportionnée à cette question, qui ne nuise pas au bon fonctionnement, à l’accessibilité et à la rapidité des transports ferroviaires.

Les modalités d’une coopération efficace incluant des échanges d’informations et de bonnes pratiques devraient être précisées, s’agissant notamment de la formation des personnels aux questions de sûreté, de la définition des niveaux de sûreté, de la planification des mesures d’urgence et des plans de rétablissement des services pour faire face aux incidents graves.
Les députés soulignent la nécessité de ne négliger aucun mode de transports et souhaitent que cette dimension soit intégrée dans les actions et priorités de l’Union européenne.


Synthèse du rapport par securiteinterieure.fr

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