Pages

dimanche 9 novembre 2025

EUDA 2025 : la nouvelle agence européenne des drogues commence ses travaux...en fanfare !

 


L’agence européenne des drogues a publié son rapport d’activité et force est de constater une évolution significative par rapport à l’ancien observatoire européen des drogues. Le rapport constate en effet le début d'une transformation organisationnelle et culturelle significative, faisant de l'EUDA une agence capable non seulement de surveiller mais aussi de mettre en œuvre des mesures proactives pour anticiper et répondre aux menaces liées aux drogues. Quant aux points clés à retenir concernant le domaine de la sécurité, il s’agit de :

  • la mise en place d'une nouvelle capacité de surveillance et d'analyse des précurseurs de drogues,
  • son investissement dans la coopération policière et plus particulièrement dans des plans d'action opérationnels (OAPs) de la Plateforme multidisciplinaire européenne contre les menaces criminelles (EMPACT), concernant le cannabis, la cocaïne, l'héroïne, les drogues synthétiques et les nouvelles drogues de synth‘se (NPS',
  • sa participation au lancement du Partenariat public-privé de l'Alliance européenne des ports (European Ports Alliance), une initiative phare visant à lutter contre la contrebande de drogue et l'infiltration criminelle dans les pôles logistiques maritimes.
  • une analyse approfondie des marchés de la drogue, puisque l'EUDA a poursuivi sa collaboration étroite avec Europol pour la quatrième édition de la publication conjointe EU Drug Markets: In-depth analysis.



L’élément clé : la naissance de l’«agence européenne des drogues»

L’année 2024 a vu l'entrée en vigueur, le 2 juillet, du nouveau règlement de l'Agence européenne des drogues (EUDA). À compter de cette date, ce règlement abroge et remplace le règlement fondateur (refonte) (CE) n° 1920/2006 de l'OEDT, faisant de l'OEDT l'agence nouvellement créée dotée d'un mandat renforcé.
Cette transformation confère à l'EUDA un mandat plus fort et des compétences étendues, avec un objectif principal : renforcer la préparation de l'UE face aux drogues (EU preparedness on drugs).
Le rapport souligne que l'EUDA est désormais mieux équipée pour soutenir l'UE et ses États membres face aux défis émergents en matière de santé et de sécurité posés par les drogues illicites. L'Agence s'est engagée à renforcer sa position en tant que courtier de connaissances sur les drogues au sein de l'UE et au-delà, tout en poursuivant l'excellence opérationnelle.


La création de nouveaux outils

Pour concrétiser ce mandat élargi, l'EUDA a lancé ou significativement développé les mécanismes suivants en 2024 :

Le Système européen d'alerte aux drogues (EDAS)

L'EUDA a développé l'EDAS (European Drug Alert System) dans le but d'émettre des alertes lorsque des risques graves liés aux drogues (SDRRs) apparaissent sur le marché. Les principaux objectifs de l'EDAS sont :
  • D'alerter les parties prenantes des risques graves liés aux drogues (SDRRs) de pertinence européenne.
  • De renforcer la veille situationnelle, la préparation et les activités de réponse.
  • D'améliorer la résilience aux SDRRs au niveau national et européen.
En 2024, des progrès significatifs ont été réalisés, notamment la rédaction du document sur les concepts clés de l'EDAS en collaboration avec le réseau Reitox des points focaux nationaux (PFN). Des points de contact nationaux EDAS provisoires ont été nommés et une réunion préparatoire en septembre a rassemblé environ 80 correspondants du Système d'alerte précoce (EWS) pour définir le fonctionnement du système.

Le Réseau européen de laboratoires de criminalistique et de toxicologie 

Ce réseau est une initiative phare du nouveau mandat de l'EUDA. Il a été lancé pour renforcer l'échange d'informations sur les nouvelles tendances en matière de drogues et pour former les experts nationaux en criminalistique et en toxicologie.
Le réseau joue un rôle crucial dans le renforcement de la capacité de l'UE à détecter et à répondre aux menaces émergentes liées aux drogues. En novembre 2024, l'EUDA a réuni sa première rencontre inaugurale. Au total, 63 laboratoires des 27 États membres de l'UE, de la Norvège et de la Turquie ont été officiellement désignés pour faire partie de ce réseau par l'intermédiaire de leurs représentants au sein du Conseil de gestion de l'EUDA. L'objectif était de poser les bases d'une collaboration future pour améliorer les capacités analytiques en Europe. 

Le Système européen d'évaluation des menaces (ETAS)

L'ETAS a été créé pour améliorer la veille situationnelle, la préparation et les activités de réponse au niveau de l'UE. Ses objectifs clés sont de détecter et d'évaluer les menaces liées aux drogues (à la fois pour la santé et la sécurité) et de fournir des évaluations en temps opportun, ainsi que des recommandations concrètes pour atténuer les risques. L'ETAS complète l'EWS, l'EDAS et le réseau de laboratoires.
En 2024, un projet pilote d'évaluation des menaces pour la santé et la sécurité a été lancé, axé sur les nouveaux opioïdes synthétiques (NSOs) dans les États baltes. Ce travail a pour but d'informer les décideurs de l'UE et d'atténuer l'augmentation des décès observée dans cette région.


Les premières évaluations formelles de précurseurs par l'EUDA

La fabrication de drogues de synthèse illicites en Europe existe depuis plus de 50 ans et, à l'échelle mondiale, une part importante de cette production se déroule aujourd'hui sur le territoire de l'UE. 
Afin de limiter l'accès aux produits chimiques nécessaires à la fabrication de ces drogues, la Commission européenne a demandé à l'EUDA d'évaluer les risques transfrontaliers pour la santé et la sécurité publiques que représentent neuf précurseurs de drogues utilisés pour la fabrication de cathinones de synthèse (huit précurseurs) et d'amphétamine (un précurseur).
Ces demandes ont été formulées à l'initiative de la Pologne, suite à l'apparition dans le pays de laboratoires clandestins de cathinones de synthèse à grande échelle et aux inquiétudes liées à la production d'amphétamine par des voies de synthèse alternatives.

Compte tenu du caractère novateur de cette démarche au niveau de l'UE, l'EUDA a rapidement élaboré, en concertation avec la Commission européenne, un cadre transitoire pour l'évaluation des précurseurs de drogues. Ce cadre comprenait des définitions et des schémas de processus, un état des lieux des lacunes en matière de connaissances et des sources de données existantes.

Fin janvier 2025, l'EUDA a remis à la Commission européenne le dernier des neuf rapports d'évaluation des précurseurs, pour examen par les États membres. 
Ces rapports analysent les données disponibles sur les substances et évaluent leur utilisation licite dans l'UE ainsi que l'ampleur de leur utilisation dans la production de drogues illicites. 
Il est important de noter que ces rapports mettent également en lumière les impacts et les conséquences potentiels du classement de ces substances chimiques, afin d'éclairer la prise de décision. 
Ces rapports font partie du nouveau service relatif aux précurseurs de médicaments mis en place par l'EUDA dans le cadre de la nouvelle réglementation.


Appui aux réponses politiques et opérationnelles face aux défis liés à la sécurité des drogues

Les analyses de l'EUDA ont également été présentées à de nombreuses autres occasions, notamment lors des réunions du Groupe de haut niveau sur la drogue (HDG), du COSI, du Conseil du Centre d'analyse et d'opérations maritimes – Stupéfiants (MAOC-N), du Conseil du programme Drogues d'Europol, d'EMPACT, du Groupe européen d'experts sur les précurseurs, de la Conférence d'Europol sur les drogues, de Lisbon Addictions et de la Semaine européenne de lutte contre la criminalité à Bruxelles, organisée par la Commission européenne en juin. 
Toutefois, l'événement le plus important organisé par l'EUDA dans ce domaine a été la première Conférence européenne sur la violence liée à la drogue, qui s'est tenue les 26 et 27 novembre à Bruxelles.
L'EUDA a en outre apporté son soutien à diverses réunions techniques et politiques, notamment celles d'importants groupes de travail de la Commission, tels que le Forum Internet de l'UE et la Coalition mondiale contre la menace des drogues de synthèse.


La contribution de l’agence au projet de coopération policière EMPACT

L’Agence a continué de contribuer aux principaux documents et initiatives politiques de l’UE, tels que la stratégie et le plan d’action de l’UE en matière de drogues 2021-2025 et les plans d’action opérationnels (PAO) EMPACT du cycle politique de l’UE sur la criminalité organisée et la grande criminalité internationale. 
Dans la limite des ressources disponibles, l’Agence a mené à bien toutes ses missions au titre du PAO EMPACT 2024 sur le cannabis, la cocaïne et l’héroïne, et du PAO sur les drogues de synthèse et les NPS. L'Agence a également contribué à la planification et à la rédaction des plans d'action opérationnels (PAO) pour 2025. 
Parmi ses contributions majeures aux PAO EMPACT figurent les modules récemment publiés sur l'héroïne et les autres opioïdes, les facteurs déclencheurs et facilitateurs, les nouvelles substances psychoactives (NPS) et les principaux enseignements pour les politiques et les pratiques de la quatrième édition de l'analyse approfondie conjointe OEDT-Europol sur les marchés de la drogue dans l'UE.


Un partenariat étroit EUDA-Collège européen de police


Par ailleurs, l'EUDA, en collaboration avec son partenaire, l'Agence de l'Union européenne pour la formation des services répressifs (CEPOL), a continué d'organiser et de dispenser des formations aux professionnels des forces de l'ordre. Malheureusement, la CEPOL a été victime d'une cyberattaque durant l'été, ce qui a entraîné l'annulation de nombreuses activités prévues pour le second semestre. Malgré ce revers, 1 462 agents de l’UE et de pays tiers ont participé à des formations (cours, webinaires, modules d’e-leçon) au cours du premier semestre 2024.
Par ailleurs, 40 agents de pays tiers, financés par des projets d’assistance technique mis en œuvre par l’EUDA, ont suivi des formations CEPOL et EUDA sur la lutte contre la drogue.


Une participation au partenariat public-privé « Alliance des ports européens »

L’EUDA a contribué, selon les besoins, à la mise en œuvre des actions pertinentes de la feuille de route de l’UE, conçue pour intensifier la lutte contre le trafic de stupéfiants et les réseaux criminels, et adoptée par la Commission européenne en octobre 2023. Cette feuille de route définit 17 actions ciblées réparties dans quatre domaines prioritaires. La Commission a travaillé en étroite collaboration avec les États membres et ses partenaires pour atteindre les objectifs fixés.
Parmi les initiatives phares de cette feuille de route figure le lancement, par la Commission européenne et la présidence belge du Conseil de l’UE, du partenariat public-privé « Alliance des ports européens » à Anvers le 24 janvier. L'alliance rassemble les acteurs publics et privés concernés par la lutte contre le trafic de drogue et l'infiltration criminelle des plateformes logistiques. Les ports européens sont particulièrement vulnérables au trafic de drogue et à l'exploitation par des réseaux criminels à haut risque. Cette initiative a été lancée en coopération avec les États membres de l'UE, les autorités portuaires, les associations européennes, les agences de l'UE (Europol, EUDA) et des représentants des douanes et des forces de l'ordre.


Une agence à portée internationale

L’EUDA a fourni une expertise technique et des conseils à ses principaux partenaires, notamment la Commission européenne. 
Cela a inclus l’élaboration de notes d’information sur des sujets tels que la situation et les marchés des drogues en Colombie, en Équateur, au Brésil, au Sénégal et au Mexique ; la surveillance du darknet dans l’UE, en envisageant des actions préparatoires et des actions futures ; les ports maritimes : surveillance des points d’entrée des drogues illicites dans l’UE (afin d’appuyer le suivi et l’évaluation des actions mises en œuvre dans le cadre de cette Alliance des ports de l’UE pour lutter contre le trafic de drogue et la criminalité organisée).

Pour mener à bien ses missions et atteindre ses objectifs, l'EUDA s'appuie sur ses autres partenaires européens et internationaux. Au cours de l'année, l'Agence a activement contribué aux travaux du réseau des agences de la Justice et des Affaires intérieures (JAI) et à plusieurs sous-réseaux du Réseau des agences de l'UE (EUAN), dont elle est membre. 
Concernant la coopération avec les pays tiers, l’Agence a poursuivi sa collaboration avec les pays candidats et candidats potentiels à l’adhésion à l’UE, ainsi qu’avec les pays partenaires de la Politique européenne de voisinage (PEV), dans le cadre des projets IPA8 (Instrument de coopération technique en matière d’assistance de préadhésion) et EU4MD II (Surveillance des drogues II). Pour la première fois, l’EUDA a publié des fiches d’information spécifiques pour chacun des partenaires des Balkans occidentaux dans le cadre du projet IPA8.


Une extension de l’activité de l’agence au monde entier et à la société civile


L’Agence a entamé sa troisième année de collaboration avec le Programme de coopération entre l’Amérique latine, les Caraïbes et l’Union européenne sur les politiques en matière de drogues (COPOLAD III), avec une série de sessions de formation et d’événements organisés avec les pays d’Amérique latine et des Caraïbes.
En 2024, l’EUDA a poursuivi le renforcement de sa coopération bilatérale avec des pays tiers clés par la négociation et la signature d’accords de travail. Quatre nouveaux accords ont été signés avec la Colombie, l’Équateur, le Chili et le Monténégro, tandis qu’un accord modifié a été signé avec l’Ukraine.

Le règlement de l’EUDA mentionne expressément les organisations de la société civile (OSC) parmi les parties prenantes concernées avec lesquelles l’Agence devrait coopérer à l’avenir dans l’accomplissement de ses missions. 
À cette fin, en 2024, l’EUDA a intensifié son dialogue avec les représentants des OSC afin d’identifier des domaines concrets et de développer des méthodes appropriées pour une future collaboration. 
Dans ce cadre, l’EUDA a participé à une réunion du Forum de la société civile sur les drogues (CSFD) et a organisé des consultations dédiées aux OSC afin d’engager des discussions sur la mise en place d’un cadre de collaboration systématique et structuré.


L’alliance des points focaux nationaux

Pour accomplir ses missions, l'Agence s'appuie sur de nombreux partenaires, notamment le réseau Reitox des points focaux nationaux, qui joue un rôle essentiel dans le maintien du système de surveillance de base de l'UE. 
Reconnaissant l'importance du réseau Reitox, le règlement de l'EUDA renforce également le rôle des points focaux nationaux. En 2024, les point focal belge, néerlandais et italien ont obtenu la certification Reitox, rejoignant ainsi plusieurs autres points focaux nationaux certifiés.
En 2024, les points focaux nationaux ont poursuivi la mise en œuvre de la deuxième feuille de route du cadre de développement Reitox (2021-2025). 
Les travaux ont progressé en vue de la définition d'une nouvelle Alliance Reitox, un document stratégique qui remplacera le cadre opérationnel précédent du système Reitox (2003) à compter de 2025 et orientera le réseau en tant que principal partenaire de l'EUDA dans les États membres pour les années à venir. 


Surveillance du marché des stupéfiants et identification des nouvelles tendances


Afin d’appuyer l’effort d’analyse global mené dans le domaine de la sécurité, les travaux se sont poursuivis en 2024 pour améliorer la qualité et la disponibilité des données essentielles sur l’approvisionnement, en étroite collaboration avec les programmes nationaux de lutte contre la drogue Reitox et le partenaire européen de l’Agence, Europol.
Cette surveillance de base a été complétée par de nouvelles sources de données et des approches de surveillance innovantes, telles que les informations en sources ouvertes (OSI) et la surveillance du darknet, qui ont pris une importance croissante ces dernières années. Des rapports réguliers de surveillance OSI ont été produits pour alimenter l’analyse de l’EUDA. 
Par ailleurs, les données relatives aux marchés du darknet ont été analysées et intégrées aux rapports réguliers de l’EUDA, tandis que des tableaux de bord nationaux sur les stupéfiants du darknet, basés sur les données de Darkcloud, ont continué d’être élaborés et transmis aux États membres participant au projet.
L’année 2024 a toutefois été marquée par le début, le 2 juillet, du nouveau mandat de l’EUDA, qui a engendré des tâches supplémentaires. 
La plus importante dans ce domaine est la collecte et l’analyse par l’Agence des « informations et données sur les précurseurs de drogues et sur le détournement et le trafic de précurseurs de drogues » (article 6 du règlement EUDA).


Surveillance des précurseurs de drogues

Dès le début de son nouveau mandat, l'EUDA s'est fortement impliquée dans le domaine des précurseurs de drogues. En très peu de temps, l'Agence a mis en place une expertise interne en la matière, couvrant à la fois les précurseurs de drogues illicites contrôlées et ceux des NPS (nouvelles substances psychoactives). Des compétences analytiques spécialisées ont été recrutées et les travaux de définition des procédures opérationnelles requises ont été lancés.
Parallèlement, l'EUDA a participé activement à l'échange d'informations et à la collaboration avec ses partenaires (notamment Europol, la Commission européenne, l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) et le Groupe Pompidou du Conseil de l'Europe) sur les précurseurs de drogues et les substances apparentées.
À la demande de la Commission européenne, l'EUDA a réalisé les premières évaluations de précurseurs, portant sur neuf substances.

 

synthèse et traduction par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr


A lire aussi sur securiteinterieure.fr :


 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

remarques et suggestions à formuler à securiteinterieure [à] securiteinterieure.fr

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.