La Commission vient de publier il y quelques jours un mémo dans lequel elle comptabilise plus de 276.000 entrées clandestines en Europe en 2014, soit une hausse de 155% par rapport à 2013 (à lire sur securiteinterieure.fr: D'après Frontex, le nombre de détection de migrants augmente aux frontières extérieures (rapport ARA 2014) et Les 28 ministres européens veulent une stratégie opérationnelle pour répondre de manière structurelle à la pression migratoire).
Cette publication intervient alors que Frontex a lancé l'opération Triton (dont le coût mensuel est estimé à 3 millions d'euros) et a présenté auparavant son rapport annuel d'activité (et pour le rapport précédent, lire sur securiteinterieure.fr Des temps de vache maigre, même pour Frontex).
L'agence indique que son budget final pour l’année 2013 a été de 94 millions d’euros, suite à un ajout de 8,2 millions d’euros en novembre en raison d’une intensification des activités de l’agence en Méditerranée. 66% du budget total a été utilisé pour les activités opérationnelles, tandis que 75% du budget opérationnel a été employé pour mener des opérations conjointes.
En termes de recrutement, 39 personnels ont intégré Frontex en 2013, ce qui porte le nombre total du personnel à 302.
(cliquez pour agrandir cette carte publiée dans le Mémo 2015 de la Commission)
L’activité opérationnelle de Frontex
Frontex a renforcé ses actions et son soutien à l’Italie et à la Grèce en raison d’une forte pression migratoire en mer Méditerranée.
Les opérations conjointes avec ces deux pays ont donc été plus fréquentes, notamment après la tragédie de Lampedusa du 3 octobre qui a entraîné la mort d’un nombre important de migrants.
Frontex a également accru la surveillance des frontières et ses capacités de recherche et de sauvetage dans la région, grâce à un apport budgétaire supplémentaire en provenance de la Commission.
Au total, 683 opérations de recherche et de sauvetage ont eu lieu, et plus de 37000 personnes ont été secourues. En outre, des activités de trafic ont été détectées, menant à l’arrestation de 458 personnes et la saisie de 50 tonnes de drogue, d’une valeur de plus de 115 millions d’euros.
Par ailleurs, Frontex a mené 39 opérations conjointes de retour, le même nombre qu’en 2012, mais a vu le nombre de migrants renvoyés légèrement augmenter, passant de 2110 en 2012 à 2152 en 2013. L’agence a d’ailleurs adopté un Code de conduite pour les opérations de retour conjointes, mettant l’accent sur le respect des droits des individus. Par exemple, du personnel médical doit être présent à bord de tous les vols de retour.
Il est à noter qu’un nombre croissant de migrants tente de pénétrer sur le territoire de l’UE par la Grèce et la Hongrie, en provenance des Balkans. Frontex a donc renforcé son action en Hongrie. Cinq nouveaux Points Focaux ont été établis en 2013, en majorité dans les Balkans, et six Points de Coordination ont été activés, ce qui double leur nombre par rapport à 2012.
Du 4 avril au 3 juillet 2013, l’opération conjointe Flexi Force a été mise en œuvre, impliquant le déploiement dans 26 aéroports de 62 officiers chargés de lutter contre les fraudes concernant les documents d’identité et le contrôle des frontières extérieures.
Un géo-portail d’analyse de risque a été établi, ce qui a permis d’importants progrès en termes d’analyse géospatiale.
Par ailleurs, l’agence s’est adaptée dans la réponse apportée à l’intensification des flux migratoires en provenance de la Syrie à travers la frontière bulgaro-turque. En effet, le nombre de réfugiés syriens a triplé entre 2012 et 2013 : 25500 personnes, passant majoritairement par la frontière bulgaro-turque, correspond à un quart de toutes les personnes détectées par Frontex.
Cela explique le redéploiement de 60% de ressources opérationnelles de la mission JO Poseidon-Land à la frontière terrestre entre la Bulgarie et la Turquie et le déménagement du Centre Internationale de Coordination d’Athènes à Sofia.
En vue globale, les statistiques montrent un accroissement de 72 500 à 107 000 migrants clandestins. Ceci correspond au niveau atteint lors des années 2009 et 2010, mais reste en dessous du nombre de 141000 en 2011, lors du printemps arabe. Aussi, la dernière tendance est la baisse importante des réfugiés interceptés en Grèce (moins 41%) et en Italie (moins 22%). Ceci est moins lié à la dissuasion des gardes frontières qu’à la libéralisation de la politique des accords de VISA entre la Turquie et des pays africains, le Gabon ou le Sénégal par exemple.
Renforcement des capacités
En 2013, Frontex a organisé 205 formations auxquelles 3253 personnes ont participé. Ces formations avaient pour but de familiariser les gardes-frontières aux standards européens en matière de gestion des frontières. Frontex continue, en outre, d’apporter son soutien au développement du Schéma Européen de Formation à l’Application de la Loi.
L’agence a également lancé le Cadre Européen de Qualifications Sectorielles pour le contrôle des frontières, qui permet de lier les besoins opérationnels à la formation des gardes-frontières. Frontex continue la mise en œuvre de son programme d’échange à destination des formateurs et des gardes-frontières en formation.
Le master en Gestion Stratégique des Frontières a été lancé. L’Application de Gestion des Ressources Opérationnelles a été intégrée à Frontex en mai 2013, afin de faciliter la gestion de l’Equipe des Gardes-Frontières Européens. Elle permet aux Etats-membres de mettre en œuvre une meilleure allocation des ressources en temps réel.
L’exercice d’Intervention Rapide 2013 a eu lieu en juillet et août aux frontières serbo-hongroises et serbo-romaines. Enfin, pour la première fois, système de drone destiné à la surveillance des frontières a été présenté à Frontex et a été testé en Grèce, et en Espagne.
Dans un contexte budgétaire contraint, les recherches sur le concept des Smart Borders ont stagné. Ce concept englobe deux initiatives, le Entry-Exit System (EES) et le Registered Traveller Programme. Le premier prévoit l’enregistrement des données des voyageurs entrant et sortants de l’UE, le deuxième est destiné à l’accélération de voyageurs réguliers.
Frontex s’efforce de développer les systèmes de contrôle automatisés de Frontières. Si les progrès restent moins importants que prévus, certains développements sont à noter, comme l’emploi de la machine AVATAR.
Développée par l’Université d’Arizona, cette machine mène des entretiens avec les voyageurs et détecte des signaux, notamment à travers le mouvement des pupilles.
Par ailleurs, le système OPERA sert désormais à la gestion des 2500 équipes des gardes frontières européennes (comparé au nombre de 1700 en 2012) ; aussi, la toute première présentation avec des drones de surveillance a eu lieu en Grèce et Espagne.
Dernièrement, le Concept of Operations a été introduit pour rechercher des nouvelles technologies pour plus facilement détecter des navires de petite taille. D’autres progrès n’ont pas eu lieu à cause du retard des négociations au parlement européen, nécessaires pour la continuation du programme. Cependant, le Smart Border concept est loin d’être remis en question, malgré le fait de la flexibilité des tactiques de franchissement de la frontière.
Droits fondamentaux
Au regard des droits fondamentaux, le rapport met en avant le travail du Frontex Fundamental Rights Officer (FRO). Le FRO a commencé à établir un système de suivi, qui enregistre et met à jour les violations des droits de l’Homme dans le cadre des activités de Frontex.
Il a aussi participé à la réalisation d’un manuel de formation aux droits fondamentaux destiné aux gardes frontières et à la mise en place entrainement sensibilisant au respect de ces droits.
L’année 2013 est aussi celle du Forum Consultatif, actif pour la première fois en 2013. Frontex a intégré certaines de ses recommandations dans son programme de travail 2014.
Au printemps 2013, une formation pilote sur les droits fondamentaux a eu lieu, à laquelle ont participé vingt volontaires et qui a été suivie de trois sessions supplémentaires.
Le but de cette formation était d’inculquer la prise en compte des droits de l’homme dans le travail quotidien du personnel et d’insister sur leur pertinence dans l’ensemble des tâches menées par Frontex.
Résumé du rapport annuel fait sous la supervision de securiteinterieure.fr par les étudiants du Master Sécurité, Intelligence et Gestion des risques (SIGR) de Sciences Po Lille dans le cadre du cours "Sécurité intérieure et menaces transnationales".
A lire aussi :
- Le dernier rapport d'analyse trimestriel de risques (FRAN Q2)
- Premier rapport annuel du Forum consultatif sur les droits fondamentaux
- Programme de travail 2015 de Frontex
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