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mardi 29 avril 2025

ProtectEU: la Commission européenne veut faire muer Europol en "agence de police véritablement opérationnelle"

 



Le projet est ambitieux mais il s’inscrit dans le contexte d’une volonté politique forte. La stratégie de sécurité intérieure 2025-2030 prévoit une extension des prérogatives de l’office de police. A regarder les choses de plus près, c’est tout l’écosystème européen de sécurité qui se voit modifié. En effet, le renforcement d’Europol s’inscrit dans un cadre plus vaste de développement des capacités de sécurité de l'UE, par exemple à travers l’instauration d’un système européen de communication critique. D’autres mesures sont également prévues par ProtectEU. Il s’agit notamment de muscler la Plateforme multidisciplinaire européenne contre les menaces criminelles (EMPACT), de permettre l'extension du dispositif de surveillance des passagers (PNR) aux jets privés, de favoriser une utilisation accrue des systèmes de reconnaissance automatique des plaques d'immatriculation (ANPR) en synergie avec le Système d’information Schengen (SIS), et de présenter des feuilles de routes, une permettant un accès légal par la police aux données, une autre sur les technologies de chiffrement et une autre encore sur la conservation des données par les opérateurs télécoms.

A lire sur securiteinterieure.fr, les 2 autres volets de ProtectEU:


Axe 1 : améliorer la connaissance intégrée de la situation et analyse des menaces

La sécurité commence par une anticipation efficace. Les renseignements exploitables, que les États membres sont encouragés à renforcer davantage grâce à la Capacité unique d'analyse du renseignement (SIAC), en tant que point d'entrée unique pour les renseignements des États membres, sont essentiels pour évaluer et contrer les menaces. Les Etats membres sont donc tenus d’améliorer le partage de renseignements avec le SIAC.
En outre, la Commission préparera des analyses régulières des menaces pour la sécurité intérieure de l'UE afin d'identifier les principaux défis en matière de sécurité, en vue d’éclairer les priorités politiques.
Afin d'assurer sa propre sécurité opérationnelle et sa connaissance de la situation, la Commission révisera son cadre de gouvernance de la sécurité interne et créera un Centre intégré des opérations de sécurité (ISOC) pour protéger les personnes, les biens matériels et les opérations sur tous ses sites. Elle renforcera également ses capacités opérationnelles et analytiques pour identifier et atténuer les menaces hybrides.


Axe 2. Assurer le renforcement d’Europol

Actuellement, plusieurs facteurs empêchent Europol d'atteindre pleinement son potentiel opérationnel en matière de soutien aux activités d'enquête et opérationnelles de lutte contre la criminalité transfrontalière : ils vont d'un niveau de ressources insuffisant au fait que son mandat actuel ne couvre pas les nouvelles menaces pour la sécurité, telles que le sabotage, les menaces hybrides ou la manipulation d'informations. C'est pourquoi la Commission proposera une refonte du mandat d'Europol, afin d'en faire une agence de police véritablement opérationnelle, soutenant mieux les États membres.
L'objectif est de renforcer l'expertise technologique d'Europol et sa capacité à soutenir les services répressifs nationaux, d'améliorer la coordination avec d'autres agences et organismes et avec les États membres, de consolider les partenariats stratégiques avec les pays partenaires et le secteur privé, et d'assurer une surveillance renforcée d'Europol.

Améliorer l'efficacité d'Europol nécessite de renforcer le répertoire d'outils Europol (RTE), lui permettant d'identifier, de développer, d'acquérir conjointement et d'appliquer des technologies avancées de manière opérationnelle. En outre, la Commission créera un campus de recherche et d'innovation en matière de sécurité au sein de son Centre commun de recherche, réunissant des chercheurs afin de raccourcir le cycle allant des résultats de la recherche à l'innovation, au développement et à la mise en œuvre.


Axe 3. Développer les capacités de sécurité de l'UE

Le mandat d'Eurojust sera évalué et renforcé afin d'améliorer l'efficacité de la coopération judiciaire et la complémentarité avec Europol. Il s'agira notamment d'améliorer l'efficacité d'Eurojust ainsi que sa capacité à fournir un soutien et des analyses proactifs aux autorités judiciaires des États membres.

En outre, compte tenu de la compétence unique du Parquet européen pour enquêter et poursuivre les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union, la Commission examinera la meilleure façon d'améliorer sa capacité à protéger les fonds de l'Union. Cela comprendra le renforcement de la coopération entre le Parquet européen et Europol.

L'ENISA joue un rôle central dans la mise en œuvre de la législation européenne en matière de cybersécurité. Lors de la prochaine révision de la loi sur la cybersécurité, la Commission évaluera son mandat et proposera de le moderniser afin de renforcer sa valeur ajoutée européenne.
La coopération entre les douanes et les autres autorités répressives sera renforcée par la création proposée de l’Autorité douanière de l'UE et de la plateforme de données douanières de l'UE dans le cadre du paquet de réforme douanière de l'UE. Les informations provenant de la future plateforme et les données connexes d'Europol, d'Eurojust, du Parquet européen, de l'OLAF, de l'Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (ALBC ou AMLA en anglais) et de Frontex, dans le cadre de leurs compétences respectives, amélioreront l'analyse conjointe et contribueront à une plus grande cohérence des activités opérationnelles, notamment aux frontières extérieures.


Axe 4 : Elaborer un système européen de communication critique (EUCCS)

Aujourd'hui, les systèmes de communication critiques fonctionnent, dans la plupart des cas, de manière isolée au niveau national. Cela signifie que les premiers intervenants ne peuvent souvent pas communiquer avec leurs homologues lorsqu'ils franchissent la frontière vers d'autres États membres.
Afin d'améliorer la capacité de l'UE à réagir aux crises, la Commission proposera une législation visant à créer un système européen de communication critique (EUCCS) afin de relier les systèmes de communication critiques de nouvelle génération des États membres au sein de l'UE. L'initiative EUCCS étendra également la couverture du système grâce au futur système multiorbital IRIS 2. Les projets financés par l'UE renforceront les capacités techniques de l'EUCCS, en s'appuyant principalement sur des fournisseurs de technologies européens, afin de favoriser l’autonomie stratégique de l'UE dans ce secteur sensible.  


Axe 5 : Assurer un accès légal aux données

Environ 85 % des enquêtes criminelles reposent désormais sur la capacité des forces de l'ordre à accéder aux informations numériques. Or, le Groupe de haut niveau sur l'accès aux données pour une application efficace de la loi a souligné dans son rapport final que les forces de l'ordre et le pouvoir judiciaire avaient perdu du terrain face aux criminels au cours de la dernière décennie,
Pour donner suite aux recommandations du groupe de haut niveau, la Commission présentera au premier semestre 2025 une feuille de route définissant les mesures juridiques et pratiques qu'elle propose de prendre pour garantir un accès légal et effectif aux données. Dans le cadre du suivi de cette feuille de route, une priorité sera accordée à l'élaboration d’une feuille de route sur les technologies de chiffrement.    
En complément, la Commission va préparer une analyse d'impact en 2025 en vue de mettre à jour les règles relatives à la conservation des données au niveau de l'UE.


Axe 6 : S’appuyer davantage sur le projet EMPACT

Principal cadre d'action commun de l'UE contre la criminalité grave et organisée, la Plateforme multidisciplinaire européenne contre les menaces criminelles (EMPACT) a obtenu des résultats opérationnels substantiels. Le prochain cycle EMPACT (2026-2029) offre l'occasion de renforcer encore ce cadre. À cette fin, la Commission collaborera avec les présidences du Conseil et les États membres afin d’optimiser le potentiel d'EMPACT. Parmi ces domaines prioritaires, il est nécessaire de disposer de renseignements sur les réseaux criminels les plus menaçants, de mener des enquêtes conjointes et des groupes de travail opérationnels, ainsi que d'apporter une réponse judiciaire forte, notamment une approche de suivi de l'argent.


Axe 7 : Stimuler la coopération opérationnelle


Aujourd'hui, les agents des forces de l'ordre sont toujours confrontés à des difficultés lorsqu'ils surveillent ou effectuent des interventions urgentes au-delà des frontières, et la lutte contre les menaces hybrides nécessite également une coopération transfrontalière renforcée. Un groupe de haut niveau sur l'avenir de la coopération opérationnelle en matière répressive devrait être créé afin d’élaborer une vision stratégique commune.
Le Système d'information Schengen (SIS) devrait être amélioré en 2026 afin de permettre aux États membres de saisir des signalements concernant des ressortissants de pays tiers impliqués dans le terrorisme, y compris les combattants terroristes étrangers, et dans d'autres infractions graves, sur la base des données partagées par les pays tiers avec Europol.  
Enfin, est prévu de créer un Campus de Recherche et d'Innovation en Sécurité au sein de son Centre Commun de Recherche en 2026.


Axe 8 : Mieux protéger les frontières extérieures

La Commission étudiera les moyens de renforcer la sécurité des documents de voyage et de séjour délivrés aux citoyens de l'UE et aux ressortissants de pays tiers. En outre, la Commission évaluera comment les portefeuilles d'identité numérique de l'UE, qui seront introduits dans le cadre européen pour l'identité numérique d'ici fin 2026, peuvent contribuer à renforcer la sécurité des documents de voyage et à améliorer la vérification de l'identité.
En outre, bien qu'il existe un cadre européen pour les informations sur les voyages aériens commerciaux, le traitement des données provenant d'autres modes de transport à des fins répressives est fragmenté. La Commission collaborera avec les États membres et le secteur des transports pour renforcer le cadre d'information sur les voyages en explorant un système européen obligeant les exploitants de vols privés à collecter et à transférer les données des passagers. Pour le transport routier, la Commission évaluera une utilisation accrue des systèmes de reconnaissance automatique des plaques d'immatriculation (ANPR) et augmentera les possibilités de synergies avec le SIS.


synthèse du texte
par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr 



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