Pages

mardi 31 mai 2022

Identité numérique : l’Europe va édicter un socle de normes pour restreindre l’accès des mineurs aux sites pornographiques

 


La question est brûlante en France.  La cour d’appel de Paris a rejeté en appel il y a peu une demande émant d’associations de protection de l’enfance en vue d'un blocage par les opérateurs télécoms de neuf sites pornographiques accessibles aux mineurs.

Niveau UE, un nouveau tour de vis est prévu au nom de la protection de l’enfance. Une communication vient d’être publiée visant à encourager l’élaboration, d’ici à 2024, d’un code de conduite global visant à restreindre l’accès aux mineurs à certains sites et services afin de les empêcher d’être exposés à des contenus dangereux.
Il s’agit de prendre appui sur la législation actuelle sur les services numériques pour normaliser au niveau de l’UE, la vérification de l’âge en ligne. Le constat est simple : les outils de vérification de l’âge et les outils de consentement parental sont inopérants ou facilement contournés.
Des solutions sont actuellement en train d'être mises au point et l’UE travaille déjà à les rendre interopérables.
De son côté, la Commission allemande pour la protection des mineurs dans les médias a quant à elle approuvé  3  systèmes de vérification de l’âge au moyen d’une technologie d’IA.


De quoi parle-on ?

S’appuyant sur la stratégie de 2012, la nouvelle stratégie pour un internet mieux adapté aux enfants accorde une attention particulière aux possibilités et aux risques en ligne pour les enfants en situation de vulnérabilité. 

Cette nouvelle stratégie pour un internet mieux adapté aux enfants, une initiative phare de l’Année européenne de la jeunesse 2022, propose des actions visant à assurer des expériences numériques sûres pour protéger les enfants contre les contenus, les comportements, les contacts et les risques pour les consommateurs en ligne qui sont préjudiciables et illicites. Il s’agit d’améliorer leur bien-être en ligne grâce à un environnement numérique sûr et adapté à l’âge.


1er acquis de la stratégie de 2012 : le réseau de centres pour un internet plus sûr

La stratégie de 2012 avait mis en place le réseau de centres pour un internet plus sûr, qui est cofinancé par l’UE, ainsi que le portail consacré à la sécurité des enfants en ligne «betterinternetforkids.eu», qui bénéficie d’un soutien financier de l’UE.

Les centres pour un internet plus sûr viennent en aide à 30 millions de personnes chaque année.
Ils mènent des activités de sensibilisation ciblées et fournissent des ressources concernant tous les aspects de la sécurité des enfants en ligne dans les États membres, ils proposent de l’aide et détectent les menaces émergentes grâce aux lignes d’assistance téléphonique et ils contribuent au retrait de matériel d’abus sexuels sur enfants en ligne grâce aux lignes d’urgence INHOPE, présentes dans 46 pays.

Les centres pour un internet plus sûr travaillent avec un réseau d’ambassadeurs de la jeunesse et de panels de jeunes pour un internet mieux adapté aux enfant, qui conseillent et éclairent les décideurs et les praticiens, par exemple via l’initiative «Youth Pledge for a Better Internet» relative à la communication adaptée aux enfants. La «Journée pour un internet plus sûr», créée sous l’impulsion de l’UE, est désormais devenue une manifestation mondiale.


2e acquis de la stratégie de 2012 : les directive SMA et RGPD

Depuis 2012, le cadre juridique et politique de l’UE visant à renforcer la sécurité des enfants en ligne a considérablement évolué.
Par exemple, dans le cadre de la directive révisée sur les services de médias audiovisuels (directive SMA), les obligations de protéger les mineurs contre les contenus préjudiciables susceptibles de nuire à leur développement physique, mental et moral et contre les contenus illicites s’étendent désormais aux plateformes de partage de vidéos.


Le règlement général sur la protection des données (RGPD) classe les données à caractère personnel des enfants parmi les données nécessitant une protection spéciale, l’autorisation parentale étant d’ailleurs nécessaire jusqu’à un certain âge (allant de 13 à 16 ans en fonction des États membres).
En 2022, le comité européen de la protection des données publiera des lignes directrices sur le traitement des données à caractère personnel des enfants et sur les droits des enfants en tant que personnes concernées au titre du RGPD.


Les projets en cours : l’intelligence artificielle et la proposition sur les abus sexuels sur les enfants


La proposition de législation sur l’intelligence artificielle (IA) établit des règles uniformes applicables à l’IA dans l’UE et vise à créer un marché unique pour les applications d’IA dignes de confiance qui puissent être utilisées dans le plein respect des droits fondamentaux, y compris des droits de l’enfant. La proposition de cadre européen relatif à une identité numérique permettra aux mineurs, sur la base de la législation nationale applicable, d’utiliser le portefeuille d’identité numérique, par exemple pour prouver leur âge sans divulguer d’autres données à caractère personnel.

Une nouvelle proposition de règlement établissant des règles visant à prévenir et à combattre les abus sexuels sur les enfants, présentée en même temps que la stratégie pour un internet mieux adapté aux enfants, impose aux fournisseurs de services d’hébergement ou de communications interpersonnelles certaines obligations en matière de détection, de signalement et de suppression des matériels d’abus sexuels sur enfants en ligne.

La proposition prévoit également la création d’un nouveau centre européen pour prévenir et combattre les abus sexuels commis contre des enfants, qui faciliterait la détection, le signalement et la suppression des matériels d’abus sexuels sur enfants en ligne, fournirait un soutien aux victimes et constituerait un pôle de connaissances, d’expertise et de recherche sur les questions liées à la prévention contre les abus sexuels sur enfants en ligne et à la lutte dans ce domaine.

Les changements actuels qui incitent à une révision de la stratégie

Depuis 2012, l’utilisation faite par les enfants des technologies numériques a considérablement changé. Les appareils modernes permettent aux enfants d’interagir, d’entrer en contact, de jouer et de partager des contenus avec autrui, souvent sans surveillance parentale.
Les conclusions de l’enquête «EU Kids Online» de 2020 montrent qu’une majorité d’enfants déclarent utiliser leur smartphone «quotidiennement» ou «presque tout le temps», et que le temps passé en ligne a presque doublé par rapport à 2010 dans de nombreux pays. L’âge auquel les enfants commencent à utiliser des appareils numériques diminue également.

Or, selon le réseau de lignes d’urgence INHOPE de l’UE, le nombre d’images en ligne d’abus sexuels présumés commis contre des enfants dans le monde aurait presque doublé entre 2017 et 2019.
Le problème s’est encore aggravé pendant la crise de la COVID-19, en particulier pour les enfants qui vivent avec leurs agresseurs.
Les enfants peuvent être manipulés en ligne à des fins d’abus sexuels ou d’exploitation sexuelle, et il arrive que des images et vidéos explicites, créées dans le cadre d’une relation consensuelle avec d’autres enfants ou sous la contrainte, soient diffusées sans leur consentement.

Dans le monde, plus d’un jeune sur trois déclare avoir été victime de cyberharcèlement.
Les enfants peuvent subir ou reproduire des comportements toxiques, agressifs, perturbateurs ou entraînant une dépendance, ou être ciblés par des contenus inappropriés, sexistes ou racistes.
Cela peut par ailleurs décourager la participation (par exemple des filles) aux activités en ligne et avoir une incidence sur les droits des enfants.

Les propos racistes, xénophobes et antisémites, les fausses informations et les discours politiques extrêmes conduisant à la radicalisation sont de plus en plus répandus sur internet. 


Les mesures phares de la stratégie : d’un code de conduite global de l’UE et proposition relative à une identité numérique


La Commission facilitera la mise en place d’un code de conduite global de l’UE sur une conception adaptée à l’âge en se fondant sur les nouvelles règles contenues dans la proposition de législation sur les services numériques et dans le respect de la directive SMA et du RGPD. 

Malgré la législation existante de l’Union (directive SMA et RGPD), les mécanismes de vérification de l’âge et les outils de consentement parental restent inefficaces dans de nombreux cas, les utilisateurs n’étant souvent tenus de n’indiquer que leur date de naissance au moment de l’enregistrement. 

Aussi, la Commission soutiendra des méthodes permettant d’apporter la preuve de l’âge, susceptibles d’être reconnues à l’échelle de l’UE. Elle se fondera sur les travaux en cours, à savoir euCONSENT qui est un projet pilote financé par l’UE visant à concevoir une solution interopérable pour la vérification de l’âge et le consentement parental.

La Commission lancera une demande de normalisation concernant une norme européenne sur le contrôle/la vérification de l’âge en ligne dans le cadre de la proposition relative à une identité numérique, à partir de 2023.
Elle soutiendra l’élaboration, dans le cadre de la proposition relative à une identité numérique, à partir de 2024, d’une preuve d’âge numérique reconnue à l’échelle de l’UE et fondée sur la date de naissance.

Elle collaborera avec les États membres (qui, conformément à la législation nationale, peuvent choisir de délivrer des identifiants électroniques aux moins de 18 ans en vertu de la récente proposition relative à une identité numérique européenne), les parties prenantes concernées et les organisations européennes de normalisation avec comme objectif prioritaire le renforcement des méthodes efficaces de vérification de l’âge. Ces travaux encourageront les solutions commerciales grâce à un cadre solide de certification et d’interopérabilité. 

Outre la vérification de l’âge pour accéder à certains contenus en ligne, la Commission inclura dans le code de conduite destiné aux fournisseurs en ligne, qui sera mis en place dans le cadre de la stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes pour la période 2020-2025, un chapitre ciblant les contenus exclusivement destinés aux adultes, afin de lutter, en particulier, contre le partage d’images intimes non consensuelles, qu’elles soient authentiques ou manipulées, qui pourraient également concerner des enfants, mais pas uniquement. 


Quelles sont les autres mesures prévues par la stratégie ?


La Commission:

  • veillera à ce que le numéro harmonisé 116 111 s’occupe des cas de cyberharcèlement, en coopération avec les lignes d’assistance SIC cofinancées par l’UE, d’ici à 2023;
  • cofinancera les lignes d’assistance et d’urgence pour un internet plus sûr dans l’UE, y compris celles qui auront à l’avenir le statut de «signaleurs de confiance» au titre de la législation sur les services numériques, afin d’aider le public, en particulier les enfants, lorsqu’ils sont confrontés à des contenus préjudiciables et illicites, à partir de 2022;
  • partagera les recommandations relatives au (cyber)harcèlement formulées par le groupe d’experts pour soutenir le bien-être à l’école, à partir de 2023;
  • dressera, d’ici à la fin de 2022, l’inventaire des travaux de recherche sur l’incidence du neuro-marketing sur les enfants afin de soutenir les activités coordonnées ayant trait au contrôle de l’application qui seront menées au titre du règlement relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs à partir de 2023.  


Agir au-delà de l’UE : promouvoir le réseau INHOPE et le forum de l’UE sur l’internet

La Commission coopère avec les organisations de la société civile et les organisations internationales et régionales par l’intermédiaire de l’Alliance mondiale WePROTECT visant à mettre fin à l’exploitation sexuelle des enfants en ligne.
La Commission soutient également les efforts déployés au niveau mondial depuis des années en finançant le réseau de lignes d’urgence INHOPE, évoqué ci-dessus, qui est présent dans 46 pays, ainsi qu’un outil informatique commun. 

Conformément à la stratégie de l’UE pour une lutte plus efficace contre les abus sexuels sur des enfants, la Commission travaille en étroite collaboration avec les entreprises du secteur des technologies sous l’égide du forum de l’UE sur l’internet.
Lancé par la Commission européenne en 2015, le forum de l’UE sur l’internet réunit des représentants d’entreprises technologiques, des États membres de l’UE et de la Commission afin de lutter contre l’utilisation abusive de l’internet à des fins terroristes et de renforcer la lutte contre les abus sexuels commis contre des enfants.
Ce Forum annuel pour un internet plus sûr fera le point sur l’évolution de la situation internationale et permettra d’échanger les meilleures pratiques.

La Commission indique qu’elle promouvra la nouvelle stratégie pour un internet mieux adapté aux enfants dans ses relations avec d’autres organisations internationales et pays partenaires dans le but d’orienter les partenaires internationaux vers une transformation numérique fondée sur une approche respectueuse des droits de l’enfant.


synthèse du texte par Pierre Berthelet alias securiteinterieure.fr

 


A lire sur securiteinterieure.fr :


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

remarques et suggestions à formuler à securiteinterieure [à] securiteinterieure.fr

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.